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D’atermoiements en reports, même après son pseudo lancement, le dialogue national se perd en conjectures. De « sessions préparatoires du dialogue» en « séances préliminaires », en cette semaine de remise des prix Nobel, on se dit alors que la classe politique tunisienne n’est pas loin d’être nobélisable pour toute son œuvre de procrastination.

Cinq réunions des protagonistes du dialogue national n’ont pas été suffisantes à son lancement effectif. Pis, les divergences apparues durant la semaine du 7 au 12 octobre autour de la question clé de la future ISIE ont relégué à l’après Aïd al Adha les prévisions les plus optimistes quant à l’entame des choses sérieuses.

Le casse-tête politico-légal ISIE 2

C’est la vigilante ONG ATIDE qui dès l’été 2013 saisissait le Tribunal administratif et obtenait la suspension du processus de sélection des candidatures des membres de la future instance de supervision des élections. En cause : une sélection fondamentalement basée sur des quotas partisans.

Invité en vertu de son expertise à s’exprimer lors de la 4ème séance informelle du dialogue national, c’est le même trublion président de l’ATIDE Moez Bouraoui qui mettra en garde contre les limites du consensus politique en tant que mode de résolution de conflits en l’occurrence juridiques.

Pas moins de 7 procès menacent en effet d’action rétrospective une nouvelle ISIE. Dans le cas d’une adoption, comme cela est pressenti, d’une version amendée par Ennahdha de la proposition du juriste Rafaa Ben Achour (un retour au premier cercle des 36 candidatures initiales, soit une fuite en avant pour Bouraoui), c’est tout le processus électoral qui pourrait être contesté par le Tribunal administratif plusieurs mois après les résultats des élections.

Ce scénario apocalyptique n’est pas le seul à mettre en péril la transition. L’autre problème de taille réside dans la question du temps nécessaire à l’immunisation juridique de l’ISIE 2 : la rendre inattaquable à l’avenir suppose non seulement une remise à plat de sa genèse mais aussi une table rase logistique qui ferait perdre au pays 4 à 5 mois au bas mot selon l’ATIDE.

Dans ces conditions, la perspective d’élections en 2014 devient de moins en moins réaliste.

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L’idée de « l’ISIE 1.1 » refait surface, un moindre mal ?

C’est pourquoi l’association lève ce qui était devenu un tabou en proposant de recycler l’ancienne ISIE de Kamel Jendoubi, ne serait-ce que pour la mise à jour des bases de données d’électeurs préexistantes. Un travail qu’elle effectuerait soit parallèlement à la création de l’ISIE 2, soit par une substitution pure et simple.

Or, à l’exception de la LTDH qui abonde dans le sens de l’ATIDE en soutenant la reconduite de l’ex militant des droits de l’homme Jendoubi, les deux plus grands pôles du dialogue national que sont Nidaa Tounes et Ennahdha ne semblent pas vouloir d’une opération électorale qui échappe à leur emprise au profit de l’ex entité indépendante ISIE.

D’autres voix moins politiquement correctes, à l’image de Samia Abbou et Tarek Kahlaoui, pointent du doigt l’appartenance de Rafaa Ben Achour au comité élargi de Nidaa Tounes, ce qui le rend à la fois juge et partie, ainsi que l’apolitisme des membres de l’ISIE 1 qui n’est plus d’actualité.

Quoi qu’il en soit, l’évolution des pourparlers laisse entrevoir une solution qui ne satisfera en aucun cas la société civile : en optant pour des rafistolages destinés à rectifier le tir, les acteurs du dialogue national prennent plusieurs risques.

Le premier, le moins probable, est de s’exposer à de nouvelles poursuites à long terme, le tribunal administratif étant toujours souverain pour répondre à l’avenir aux objections d’ONG procédurières. Le 2ème est de voir apparaitre de nouvelles discordes en commission, le règlement intérieur de l’Assemblée constituante prévoyant que tout projet doit recueillir l’aval de 17 députés sur les 22 membres des 6 commissions constituantes avant de passer en séance plénière.

Enfin, l’Histoire retiendra que le sort des futures élections aura été décidé par deux grandes forces de droite, en dehors de l’Assemblée, ce qui en soi est un semi échec de la démocratie naissante.

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Le CPR émet une fin de non-recevoir

Moins médiatisée mais tout aussi compromettante pour la pérennité du dialogue national, une conférence de presse se tenait vendredi 11 octobre au siège du CPR, avec la participation du Parti de la Justice et du développement de Mohamed Salah Hedri (coloration islamiste) et du Courant al Mahabba qui se considère comme le grand exclu du dialogue.

Coïncidant avec l’expiration du délai imparti par le quartet aux non signataires de sa feuille de route, Imad Daïmi y a réitéré sans grande surprise le rejet de l’idée même du dialogue national. Plus surprenant cependant est le caractère définitif et sans appel du refus de participer à ce qu’il qualifie de « mascarade ».

Le boycott du parti présidentiel vient affaiblir avant la trêve de l’Aïd un dialogue déjà mal engagé. En clair, la conquête verticale du Palais de Carthage par Nidaa Tounes ce n’est pas pour demain. C’est aussi le moment qu’a choisi Ali Larayedh, samedi, pour une sortie médiatique dans laquelle il a martelé que son gouvernement ne démissionnera pas sans obtenir la garantie de la finalisation d’une somme de missions, encore moins sous la pression d’un échéancier prérequis.

Mais force est de constater le bilan bien maigre du dialogue à l’heure qu’il est, qui se résume à la création encore balbutiante de 3 commissions ad hoc : l’une consacrée à l’avancement de la Constitution, une 2ème relative aux élections, et une 3ème censée superviser la composition du futur gouvernement, commission refusée dans un premier temps par Ennahdha.

En s’attardant sine die sur les réglages techniques de ses propres modalités, le dialogue national n’intéresse plus vraiment le tunisien moyen, las de ce qu’il perçoit à juste titre comme des magouilles politiciennes de partage du pouvoir.