Durant la campagne, nous avions déjà relevé cet aspect. Lequel aspect devient d’autant plus remarquable suite aux résultats provisoires de ces législatives tombant heure après heure, chambardant littéralement le paysage politique tunisien. Et, de mémoire, c’est encore plus détendu que lors des élections du 23 octobre 2011, malgré les menaces terroristes.
Et de ce point de vue, c’est une victoire de tous les Tunisiens. Il n’y a point de perdants. Ceux qui n’ont pas eu les sièges auxquels ils aspiraient ont néanmoins gagné :
- l’assurance que tout est désormais possible dans un État qui respecte la volonté de ses électeurs ;
- l’assurance que le perdant d’aujourd’hui est en mesure d’être le vainqueur de demain ;
- l’assurance que les règles démocratiques de la dévolution du pouvoir acquièrent enfin un sens dans notre pays ;
- l’assurance que ceux qui accèdent au gouvernement, n’accèdent pas pour gouverner leurs partisans, mais pour prendre en charge les affaires de tous les Tunisiens de quelque bord politique qu’ils soient.
Et en cela, c’est une victoire de tous les Tunisiens. Quant au terrorisme, il ne vaincra jamais en Tunisie. Du reste, depuis 400 ans au moins, c’est-à-dire depuis que l’État tunisien -au sens wébérien du terme- existe, aucune rébellion n’a jamais réussi à vaincre l’État tunisien. Et pour un tas de raisons (dont il est inutile de revenir ici), aucune ne réussira.
Il est également intéressant de relever que beaucoup parmi ceux qui ont été royalement servis, notamment sur des chaînes TV, ont été littéralement laminés à l’occasion de ces élections. En confondant la notoriété à tout prix avec la popularité, ils découvrent à l’issue de ce scrutin que la notoriété rime drastiquement aussi avec impopularité. Nous l’avons déjà écrit sur Nawaat il y a quelques mois : “Gare à l’usure médiatique !”
Avec ces élections législatives, un grand pas vient d’être franchi. Mais tout n’est pas encore gagné, loin de la. Nous avons encore des montagnes de problèmes à résoudre, tant économiques que sociaux. Et aussi paradoxal que cela puisse paraître par rapport aux propos mêmes que nous tenons au sein de ce papier, l’un des plus importants problèmes demeure pourtant la violence banalisée ayant cours dans notre pays. Ces violences quotidiennes contre les femmes, les fonctionnaires, les enfants, les journalistes, bref toutes ces formes de violences quotidiennes qui demeurent impunies.
La réussite remarquable de ces élections au regard de son caractère pacifique tend à indiquer que la persistance des violences quotidiennes, que nous évoquons, relève des défaillances de l’État et de ses gouvernants. C’est-à-dire de leur capacité à faire le nécessaire pour moderniser l’outil judiciaire devant prendre en charge l’impunité de ces violences. Et sans moyens conséquents, la justice tunisienne ne sera pas la hauteur de cette tâche si cruciale.
La Tunisie est à l’évidence en train de réussir sa transition démocratique. Mais bien plus que les questions économiques, ce qui menace cette transition, c’est aussi la façon avec laquelle la Tunisie traitera les questions liées à la violence, d’où qu’elle vienne… y compris celle perpétrée par l’institution policière.
Quand je vois que c’est Ben Ali qui a gagné je ne peux malheureusement pas partager cet optimisme.
Aucune rédellion n’a réussi à vaincre l’Etat Tunisien, dites-vous? Le terrorisme, non plus?
Le terrorisme a ses pourvoyeurs, ses financeurs et ses partisans qui échappent à la justice faute de volonté politique. La violence diffusée par certains sites, parfois une haine qui en appelle au meurtre adossée à une vulgarité de bas étage s’y répand sans retenue. Si on y ajoute les violences policières et celles faites aux femmes, le terrorisme toujours actif, on est loin d’une société pacifiée.
En revanche, le relatif bon déroulement du scrutin législatif dont les résultats sont globalement incontestés peut ètre lu comme le signe d’une volonté de rupture avec toutes les pratiques absolutistes et violentes.
Mais, que de chemin reste à parcourir pour parler de paix civile.