Les frappes aériennes ciblant Daech à Syrte se poursuivent, tout autant que les révélations sur les activités militaires américaines en Tunisie. La dernière preuve vient de la part de responsables américains, relayée par le Washington Post du mardi le 26 octobre. Alors que le discours officiel souligne une assistance militaire américaine limitée à la collecte d’information, le quotidien américain affirme qu’au-delà de ses « missions d’espionnage en Libye », les US seraient en train « d’ouvrir la voie » [smooth the way] pour une base de drones armés en Tunisie.

Sous couvert d’anonymat, des responsables de l’administration américaine auraient confirmé que des drones non-armés de type « Air Force Reaper » effectuent depuis juin 2016, des missions à partir de la Tunisie, pour aider la campagne de frappes aériennes dans le golfe de Syrte.

Mardi 26 octobre, Belhassen Oueslati, porte-parole du ministère de la Défense, s’est empressé de démentir l’information fuitée par le Washington Post. Le même jour, un communiqué officiel du ministère de la Défense rappelle que la coopération militaire entre la Tunisie et les US ne concerne que « l’entrainement par des militaires américains pour les forces armées tunisiennes sur l’utilisation d’un matériel sophistiqué de reconnaissance et de contrôle des frontières ». Selon le quotidien de Washington, cet embarras traduit le souci de l’administration américaine de ne pas compromettre les négociations. Pour leur part, les responsables tunisiens craignent la réaction de l’opinion publique, très hostile à l’interventionnisme américain.

Les officiels des deux pays ont ainsi élaboré cette collaboration à huis-clos. Nawaat a leaké en mars 2016 des documents concernant un accord entre la présidence de la République tunisienne et le Département d’Etat américaine datant de novembre 2015. L’article 2 d’un Mémorandum d’entente sur une base militaire américaine en Tunisie donne libre cours aux flux d’équipements, personnel, et services militaires “entre les deux pays” :

Les ministères de la défense des deux partis et des individus concernés par cet accord sont exonérés de toute taxe dans chacun des deux pays. Les deux ministères de la défense et les individus sous leur commande peuvent importer, exporter, utiliser leurs biens personnels, leur matériels techniques, matériels d’entrainement et autres services nécessaires pour la mise en place de cet accord.

Ils sont exonérée de tout taxe exigible mais aussi ils ne sont pas soumis aux autorisations préalables ni aux contrôles ni aux taxes domaniaux et les impôts.

L’article 2 du Mémorandum d’entente sur la situation des militaires américains en présence temporaire sur le territoire tunisien et les militaires tunisiens sur le territoire américain

C’est la deuxième fois depuis juillet que le ministère de la Défense tente de rectifier une information diffusée dans la presse étrangère concernant les programmes de coopération militaire en Tunisie. Lors de la dernière conférence de l’OTAN à Varsovie le 9 juillet 2016, l’Organisation annonce son plan pour la création d’un centre de renseignement en Tunisie. Deux jours après, le 11 juillet, le ministère précise l’existence depuis 2014 d’un centre de fusionnement animé par des compétences militaires tunisiennes.

Depuis le mois d’août, quelques 300 frappes aériennes auraient été réalisées à partir des bases aériennes en Europe et à Sicile. De telles opérations se poursuivraient bientôt depuis le Niger, où la couteuse construction d’une nouvelle base de drones promet de rendre le pays le nouveau « centre clé » des activités militaires américaines sur le continent, relate The Intercept. Si des documents officiels obtenus par le journal en ligne révèlent les détails et les travaux en cours (qui s’achèveront l’année prochaine) pour le projet au Niger, les plans pour une éventuelle base armée en Tunisie avancent toujours, mais de moins en moins, à bas bruit.