Dimanche 12 février, la police arrête à Siliana Mohamed Amine Hammami et Dhia Jalladine, deux futurs bacheliers, pour délit de consommation de cannabis. La loi 52 continue à criminaliser les plus vulnérables, tout en épargnant les vrais coupables. La surenchère politique et les promesses électorales mensongères n’ont fait que retarder la réforme de la loi 52 malgré les multiples appels de la société civile à la réformer. Une année après le dépôt du nouveau projet de loi  n°79 – 2017, la Commission de la législation générale a commencé son examen le 2 janvier 2017. Devant une minorité parlementaire favorable à des réelles réformes dans la loi, la majorité des députés semble réticente à une dépénalisation de la première consommation. Or les données statistiques présentées à la Commission parlementaire manquent de précision. Explications.

Lundi 2 janvier, Ghazi Jeribi, ministre de la Justice, présente devant la Commission de la sécurité et la défense de l’ARP  les derniers chiffres sur la population carcérale. Le lendemain, il expose d’autres chiffres devant la Commission de la législation générale. Si le 2 janvier, le nombre total des détenus en 2016 pour des affaires de stupéfiants est de 6662, il devient le lendemain 6700 devant la Commission des droits et des libertés. Le même jour, le ministre de la Justice affirme qu’il existe 3000 détenus pour première consommation et 3010 récidivistes. Un écart de 590 détenus en moins de 24 heures. Ces incohérences n’aident pas à comprendre la réalité de la répression de l’usage et du trafic des stupéfiants, ni à saisir son évolution dans le temps.

Suite à nos demandes de clarification des différents chiffres annoncés à l’ARP ou publiés sur le site du ministère, nous avons reçu un document officiel du ministère de la Justice corrigeant les contradictions dans les statistiques de 2016 mais aussi celles de 2015. Notre graphique a été établi sur la base de ce document. Il s’avère que le nombre total des prisonniers de la loi 52 n’est pas de 6662, comme cela a été avancée par le ministre lui-même et reproduit par les médias, mais de 6854. Au 31 décembre 2015, les prisonniers pour affaires de stupéfiants représentent 30,56% de la population carcérale. Leur taux est de 28,96 % en 2016.

Rappelons que, pour un consommateur condamné une première fois, le projet de loi proposé par le gouvernement remplace la peine de prison par un engagement à suivre des soins jusqu’au bout. En cas de refus ou d’arrêt des soins, le consommateur doit payer une amende de 1 000 à 2 000 dinars. Conformément aux conventions internationales signées par la Tunisie, le projet de loi met en avant la prévention et allège les peines pour les consommateurs. Une réforme fortement contestée par la majorité des députés.