Le projet de rachat de l’Olympique de Marseille (OM) par l’homme d’affaires tunisien Mohamed Ayachi Ajroudi n’en finit pas de faire des vagues. Quelque 700 millions d’euros ont été annoncés par les médias français pour la transaction qui suscite la polémique tant en Tunisie qu’à l’étranger, notamment dans les milieux sportifs européens. Des dirigeants issus des horizons les plus divers ont déjà présidé aux destinées de l’OM. Actuellement propriété d’un businessman américain, Frank McCourt, le club français a eu pour président de 2005 à 2009 le franco-sénégalais Pape Diouf. Ce ne sont donc pas les origines tunisiennes d’Ajroudi qui suscitent la controverse. C’est plutôt son éventuel rôle de porteur de valises pour le compte d’hommes d’affaires du Golfe, plus précisément saoudiens et émiratis, qui soulève les interrogations des médias français. Ajroudi, lui, garde le silence sur le montant consacré au projet de rachat, même s’il dément jouer le rôle de porte-valise pour une quelconque partie.
Mais avant d’entamer les négociations, Mohamed Ayachi Ajroudi a fait appel aux services d’une société américaine, “Net Reputation”, afin de faire briller son image sur Internet. En janvier 2020, cette société avait contacté Nawaat pour lui demander de retirer un article au sujet de son client. Malgré le refus du journal en ligne, le représentant de l’entreprise a insisté, allant jusqu’à proposer une contrepartie financière. Evidemment, la proposition a été catégoriquement rejetée.
La piste saoudo-émiratie
Le projet de rachat s’inscrit dans le cadre du conflit opposant le Qatar à l’Arabie Saoudite et aux Emirats Arabes Unis, relève le journal français Le Figaro. L’homme d’affaire qatari Nasser al-Khelaifi s’étant payé le Paris Saint-Germain, le choix des Saoudiens s’est porté sur l’OM, a noté le média. A cet égard, Le Figaro comme plusieurs autres journaux français ont souligné les liens entre Ajroudi et les milieux d’affaires saoudiens et émiratis, rappelant qu’il opère en Arabie saoudite depuis les années 80.
Cependant, Ajroudi a été présenté comme étant un intermédiaire (ou une vitrine), pour le compte de ceux qui souhaitent investir dans le club français. Même en cas de finalisation de l’accord, il ne sera ni le propriétaire ni l’actionnaire principal du club, précise la presse française. A cela, le Tunisien répond qu’il ne sera ni l’intermédiaire ni la vitrine d’aucune partie. Il précise que l’affaire n’intervient pas dans le cadre des tiraillements du Golfe.
Néanmoins, l’homme d’affaires a admis la présence d’investisseurs saoudiens et émiratis, soulignant qu’ils ne détiendront pas de part majoritaire. Dans un entretien accordé à l’AFP, il affirme ainsi : « dans le tour de table, les Saoudiens et les Emiratis ne dépasseront pas la majorité, il y aura des entreprises de tout le bassin méditerranéen sans exclusion ».
« L’homme au chapeau de cow-boy », comme l’appellent les médias français, ne sera pas le président de l’OM, mais dirigera plutôt le Conseil d’Administration du club. Dans cette perspective, la présidence du club marseillais serait assurée par l’homme d’affaire français d’origine algérienne, Mourad Boudjellal, l’actuel président du Rugby club toulonnais.
Patron d’une chaîne-voyou et d’un parti fantoche
En Tunisie, Mohamed Ayachi Ajroudi s’est fait connaitre en tant que politicien, homme d’affaires et propriétaire de la chaîne télévisée Al Janoubiya. Sur le plan footballistique, il a assumé les fonctions de président du Stade Gabésien, ce qui a valu au club d’être relégué en deuxième division.
Sa première apparition sur la chaîne Al Janoubiya en tant que nouveau propriétaire de la station date de 2013. Pour l’occasion, il avait évoqué l’ouverture de nouveaux studios pour la chaîne à Paris et dans les régions du sud de la Tunisie. Accessoirement, Ajroudi avait parlé de renforcer sa grille de programmes et de la doter de nouveaux équipements. Sept ans plus tard, la chaîne continue de diffuser de vieilles émissions, ainsi que des programmes dont elle n’a pas dument acquis les droits. En somme, la chaîne tv a surtout servi localement et à l’international à faire reluire l’image d’Ajroudi, en vue d’ambitions politiques. Fin 2013, après l’assassinat du martyr Mohamed Brahmi, le businessman a participé au dialogue national en tant que fondateur du Mouvement tunisien pour la liberté et la dignité. Il entendait ainsi prendre part à la désignation du chef du gouvernement. Il a par la suite renoncé à la présidence de son parti puisque la loi régissant le secteur audiovisuel interdit aux responsables des partis politiques de détenir des chaînes de télévision et de radio. L’éphémère mouvement n’a pas survécu longtemps au retrait de son dirigeant.
Litiges immobiliers
Ayachi Ajroudi ne s’est guère illustré par ses investissements en Tunisie. Il a coutume d’annoncer en grandes pompes des mégaprojets qui sont cependant restés lettre morte. En 2013, après le rachat d’Al-Janoubiya, il avait fait miroiter la construction d’une « immense cité des médias » à l’image de celles fleurissant en Californie. Sauf que l’affaire n’a pas dépassé le stade de la déclaration d’intention. En avril 2017, lors d’une conférence de presse organisée par Mnaouer Ouertani, le précédent gouverneur de Nabeul, Ajroudi avait présenté un méga projet touristique comprenant des hôtels, des espaces commerciaux et de loisirs, ainsi que des complexes résidentiels. Le projet devait s’étendre sur 500 mille mètres carrés et offrir 5 mille emplois, pour un investissement estimé à plus de 800 millions d’euros. Toutefois, le scénario échafaudé ne sera pas concrétisé.
Ajroudi a été à plusieurs reprises traîné devant les tribunaux tunisiens dans le cadre de litiges immobiliers. En juin 2012, le citoyen Seifallah Blili a découvert que le sulfureux businessman s’est accaparé son terrain de 6536 m² situé dans une zone forestière à Henchir el Faouara, du côté de Hammamet. Ayachi Ajroudi avait construit un terrain de basket sur les terres appartenant à Blili, dans une zone forestière où il est expressément interdit de bâtir.
Mohamed Ayachi Ajroudi a également eu un différend avec Farhat Jouini, l’ancien directeur d’Al-Janoubiya, au sujet du siège de la chaîne appartenant à la société gérant le Mondial Hôtel. L’édifice de cinq étages situé sur le boulevard 9 avril au centre de Tunis appartient à Jouini. Et le litige a porté sur le non-paiement des loyers, ainsi que la falsification du contrat de location. Finalement, Jouini récupérera son bien, et la chaîne a été contrainte de se trouver un autre siège, à Tunis.
Personal branding
La communication est un élément clé dans la stratégie d’Ajroudi. Sur Facebook, il publie régulièrement des photos de sa personne, en compagnie de personnalités politiques et économiques internationales. Ajroudi apparait ainsi posant notamment avec le président français Emmanuel Macron, son prédécesseur François Hollande, l’ancien secrétaire d’État américain John Kerry, le défunt milliardaire et marchand d’armes saoudien Adnan Khashoggi…
Certaines de ces photos ont été prises en marge de conférences ou de réceptions, dans de luxueux hôtels parisiens. Et Ajroudi se plaît à systématiquement les diffuser sur Facebook assorties de légendes valorisant sa personne. On lira ainsi, « la rencontre a permis d’examiner les questions régionales et les moyens de renforcer la coopération entre les deux pays »…
Cependant, l’homme d’affaires ne parviendra pas à se hisser au rang des personnalités influentes dans les médias tunisiens. Il se servira toutefois de sites web d’informations douteux, à l’instar d’Al-Thawra News et Tunisie Secret pour promouvoir son image et ses projets, en mettant à contribution des figures médiatiques. Dans ce contexte, Ajroudi a fait appel à Boubaker Essghaier, l’un des propagandistes les plus en vue du régime de Ben Ali et à Taoufiq Baccar, le dernier gouverneur de la Banque centrale avant la révolution.
Reste à savoir si en traînant autant de casseroles, l’homme d’affaires parviendra enfin à réaliser ses rêves de grandeur. Les Français en général, et les Marseillais en particulier, lui permettraient-ils de passer du trompe-l’œil aux lumières du stade Vélodrome ?
A con artist made in tunisia
Il me rappelle un autre fanfaron un certain slim Ryê7y…. Deux grands “parleux” et de petits “fejeux”… Ils vendent du vent aux voiliers et pêtent plus haut que leurs Q