Le président de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE), Farouk Bouasker, a justifié le faible taux de participation aux législatives, estimé officiellement à 8,8%, par le changement du mode de scrutin et par l’absence de l’argent politique dans la campagne électorale. C’est ce qui ressort des déclarations faites par Bouasker, alors qu’il était interpellé par une journaliste, lors de la conférence de presse organisée par l’ISIE, le 17 décembre, après la clôture des bureaux de vote. Mais est-il vrai que ces élections législatives n’ont pas été entachées par des tentatives d’achat de voix et d’autres irrégularités ?

« Pour la première fois, des élections et une campagne électorale ont été tenues sans la moindre intervention de l’argent politique, qui permettait d’acheter des voix. Pour la première fois, les élections tunisiennes se sont tenues sans l’argent suspect de des Etats étrangers, et sans les médias instrumentalisés en faveur des politiques », a déclaré Bouasker.

Cependant, l’Observatoire Chahed pour le contrôle des élections a relevé dans son rapport initial plusieurs irrégularités lors du scrutin et du dépouillement des voix. Le rapport a fait état du viol du silence électoral, de tentatives d’influencer les électeurs, et de distribution d’argent à des électeurs. Selon Chahed, ces irrégularités ont été constatées près du bureau de vote du 1er juin, à Tozeur, à Bir el Hafey, dans le gouvernorat de Sidi Bouzid, du côté du bureau de Nour Al-Hafnaoui à Jendouba, au bureau du 3 août, à Dguech, au bureau de Yasminet 1, à El-Medina al-Jadida, relevant du gouvernorat de Ben Arous, à Amira al-Fahoula, dans la campagne Moknine, au centre Al-Zouhour, du côté de Serss, au Kef, et au bureau du 2 Mars, à Hammem Al-Zriba, dans le gouvernorat de Zaghouan.

Par ailleurs, l’Observatoire Chahed a fait état, dans son rapport, de l’instrumentalisation de l’administration à des fins électorales. A cet égard, il a évoqué le transport d’électeurs vers les bureaux de vote à bord de véhicules administratifs et privés. Ces faits ont été constatés à Souk Lahad, dans le gouvernorat de Kebili, à proximité des bureaux de vote de Bou Abdullah et du 2 mars, ainsi qu’à el-Fahs, au bureau de Cité Saada, à Tozeur, au bureau de vote du 1er juin, et dans le quartier de Hicher,  à Enfidha.

A noter que Loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014, relative aux élections et référendums, dispose notamment dans son article 160 : « Est puni d’une peine d’emprisonnement d’un an et d’une amende de 2.000 dinars quiconque viole, intentionnellement, le secret du vote dans le centre ou bureau de vote ou ses abords ou porte atteinte à l’intégrité du vote ou entrave le déroulement du vote ».

Tandis que l’article 161 de ladite loi dispose : « « est puni d’une peine d’emprisonnement allant de six mois à trois ans et d’une amende d’un montant allant de 1.000 à 3.000 dinars : – quiconque pris en flagrant délit en train de présenter des dons en numéraires ou en nature en vue d’influencer l’électeur ou utilise les mêmes moyens pour amener l’électeur à s’abstenir de voter que ce soit avant, pendant ou après le scrutin ».