Le 23 octobre et la légitimité, retour sur les faits:

le décret Article 6 – L’assemblée nationale constituante se réunie, après la proclamation des résultats définitifs du scrutin par la commission centrale de l’instance supérieure indépendante des élections, et se charge d’élaborer une constitution dans un délai maximum d’un AN à compter de la date de son élection. : Nous Tunisiens Libres. Nous croyons en un état de droit. Nous faisons front légitimement contre ceux qui abusent de la confiance du peuple afin de garder le pouvoir et d’en abuser.

En se basant sur cet article 6, des tunisiens ont appelé à manifester le 23 octobre devant l’Assemblée Constituante pour mettre fin à sa légitimité et à celle du gouvernement, invitant les gens à un “grand sit-in qui ne prendra fin qu’avec la fin de l’ANC, un évènement qui serait l’espoir d’une renaissance”, d’après les organisateurs.

D’autres appels ont été lancés, sur l’avenue Habib bourguiba (Tunis) et partout dans les régions exigeant la fin de ce gouvernement. Des partis politiques ont appuyé cet avis dans les plateaux de télé et lors de leurs conférences de presse en lançant à chaque occasion l’expression ” le 23 octobre sera un rendez-vous …”

Sur ce, le jour du 23 octobre est devenu “l’apocalypse” à la tunisienne pour beaucoup de gens.

Retour sur l’article 6: d’où ça vient? Et comment ça marche?

Cet article 6 de la déclaration du processus transitoire est un décret loi ratifié par l’ex-Président provisoire de lla République Fouad Mebazza et l’ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi, et tout le jeu de la légitimité se joue sur ce décret loi.

Dans une intervention sur la radio mosaiquefm, Monsieur Iyadh Ben Achour, juriste tunisien, spécialiste des théories politiques islamiques et de droit public est revenu sur ce décret. M. Ben achour a expliqué qu’en réalité, aucune loi n’exige la fin de la légitimité de l’ANC. Cependant, il ajoute que le document «Déclaration du processus transitoire » que 11 partis politiques ont signé avant les élections est un engagement politique plutôt que juridique.

Un mois avant ce fameux 23 octobre, et quand le sujet de la légitimité a commencé à prendre de l’ampleur, M.Mohamed Abbou est sorti dans la radio rappelant les gens à l’ordre avec une loi pro-peine capitale qui peut s’appliquer sur toute personne menaçant la légitimité de ce gouvernement:

« La loi tunisienne réserve la peine de mort à tous ceux qui œuvreraient au renversement du pouvoir par la violence ».

Dans le même cadre, une vidéo de Samir dilou, ministre des Droits de l’homme et de la Justice transitoire et Porte-parole du gouvernement, a circulé sur le Net.

M.Dilou paraissait très à l’aise en parlant de ses propres prévisions pour le 23 octobre 2012. Dans la vidéo, il ironise en répondant aux citoyens qui ne savent pas ce qu’il y aura après ce jour en disant qu’ “après le 23, il y aura certainement le 24”. La foule des partisans du parti islamiste Nahdha présents commence alors à applaudir et s’éclate de rire suite à la “blague” du ministre…

Légitimité, fin de la légitimité: quand chacun vise ses propres intérêts

À l’approche de la date du 23 octobre, chacun des partis politique essaye de trouver sa place. À Tataouine et à l’initiative de la ligue régionale de la protection de la révolution, une manifestation contre le retour des rcdistes a fini par de violentes confrontations entre manifestants, les employés de l’Union régionale de l’Agriculture et de la pêche.

Ces évènements ont causé la mort d’un un responsable de Nida Tounes (Appel de la Tunisie dont le chef est Béji Caïd Essebsi). Une scène terrible de violence politique

Notre site Nawaat est revenue sur les conséquences de ces évènements dans La Polit-Revue sous le titre ” La violence politique tue “

Dans une conférence de presse, Béji Caid Essesbsi a utilié le terme “assassinat politique” et a présenté la scène comme lui il l’a vue ou il a voulu voir: De la violence unilatérale, des pratiques inacceptables préparées et légitimées par les partis au pouvoir…En laissant de coté les vidéos montrant les attaques aux manifestants à l’aide des cocktails molotov d’abord lancés par des membres de l’URAP.

Depuis la mort de ce responsable, le mouvement Nida Tounes a changé de discours, un discours que la majorité de l’opposition a repris: Non à la violence ! Non aux assassinats politiques ! Oui pour la dissolution des ligues de la protection de la révolution. Une bonne occasion pour appuyer leurs avis vis-à-vis de la fin de la légitimité…

Deux marches ont eu lieu sur l’avenue Hbib bourguiba, l’une de Nida Tounes, Al Jomhouri et Al massar et l’autre du front populaire.

Ennahdha et le Cpr, deux partis au pouvir, premiers responsables des manifestations à Tataouine ne se sont pas privés de changer leurs discours eux-meme.

Un meeting à Beb Souika organisé le dimanche 21 octobre par le comité de la protection de la révolution du même quartier populaire a eu lieu, auquel Mme Mehrzia Labidi( députée d’Ennahdha ) et Mme sihem ben sedrine ont assisté.

Sihem Ben Sedrine s’est expliqué sur sa participation à cette conférence vu la vague des critiques qu’elle a reçu. Beaucoup d’internautes ont réagi suite à sa participation à une conférence organisée par des gens accusés de la mort d’un tunisien à Tataouine.

La majorité des responsables d’Ennahdha ont invité les tunisiens à faire du 23 octobre un jour de fête: la fête d’une année de légitimité. Ennahdha a défendu les comités de protection de la révolution et elle est les a même permis de manifester le 23 au grand Tunis, devant l’Assemblée Constituante et à l’avenue Habib bourguiba.

Ces comités appuyés et encouragés par le pouvoir ont fait tourner leurs invitations sur les réseaux sociaux incitant les gens à se déplacer de partout vers Tunis “pour soutenir le processus révolutionnaire”…

La nuit du 23, les pages d’ennahdha ont circulé des photos des membres des comités de la protection de la révolution, déjà installés devant l’ANC.

Le ministère de l’Intérieur ainsi que le ministère de la Défense se sont bien préparés pour ce jour du 23 octobre. Du fil de fer barbelé, des barrages devant les institutions publiques et des militaires et des agents de la BOP (Brigade de l’Ordre Public) partout.

Aujourd’hui, on est le 23 octobre 2012, un an après la date du scrutin de 2011 et aucun heurt n’a été enregistré ce matin. Les trois présidences ont adressé un mot au peuple au sein de l’ANC lors d’une réunion extra-ordinaire. Des vrais programmes pour les jours à venir ? Pas vraiment…

L’opposition s’est absenté de la réunion dans un acte de protestation, mais réellement y a t-il de vrais programmes et des alternatives pour les jours à venir ? Pas vraiment non plus…

Pour une fois le gouvernement et l’opposition se sont mis d’accord. Quant au peuple, il survit malgré tout.