Les démonstrations de force au niveau politique, syndical et parlementaire s’accroissent contre un gouvernement chancelant qui peine à réaliser ses promesses électorales du scrutin du 23 octobre 2011. Suite à un énième scandale sécuritaire où des centaines de manifestants de la ville de Siliana ont été attaqués à la chevrotine par les forces de l’ordre, les ministres d’Ennahdha au gouvernement Jebali ont multiplié les apparitions médiatiques pour justifier la violence sécuritaire contre ce qu’ils appellent “des bandits manipulés par l’opposition et l’UGTT”. Au-delà de leur théorie du complot, rien de concret n’a été apporté.
Après la violence de la police contre les habitants de Siliana, des centaines de partisans d’Ennahdha se sont rassemblés le 4 décembre devant le siège de l’UGTT. Ils se font appeler Ligue de Protection de la Révolution. Cette Ligue a un statut légal, cependant ce n’est qu’un groupement de partisans d’Ennahdha constitué après le 14 Janvier dans une tentative de récupération du mouvement populaire non politisé. Leurs actions sont devenues de plus en plus suspicieuses à cause de leur provocation, voire attaque, contre toute voix qui s’oppose au gouvernement guidé par Ennahdha. Ils se sont illustrés lors de la manifestation du 9 avril, par des attaques lors de meetings politiques de l’opposition, par l’attaque contre Abdellia… Après le décès d’un partisan de Nidaa Tounes à Tatatouine, suite au lynchage par ces groupements organisés, ils ont été désignés par le mot de “milice”, ou sorte de branche répressive contre l’opposition, qu’elle fasse partie de la société civile ou de politiciens.
Cependant ce mardi 4 décembre, cette Ligue s’est pointée devant le siège de la centrale syndicale qui allait, comme chaque année, commémorer l’anniversaire de l’assassinat de Farhat Hached, leader historique et fondateur du syndicat.
Ayant prévu le départ à 15 heures depuis le siège dans la Place Mohamed Ali (à Tunis) jusqu’au mausolée du défunt Hached à la Casbah, des centaines de partisans d’Ennahdha se sont réunis devant le bâtiment deux heures plus tôt. Venus, non pour célébrer le soixantième anniversaire de l’assassinat de Hached, ils se sont mis à provoquer les syndicalistes criant par centaines “Dégage !”, ” Le peuple veut assainir l’UGTT ! »
Perçues comme une action de provocation et d’atteinte à la mémoire de Farhat Hached et en l’absence de police, les joutes de propos offensants enveniment la situation pour finir dans la violence quand des hommes, portant des t-shirts rouges avec le logo du syndicat, sortent du bâtiment armés de bâtons. Les affrontements ont aboutis à des dizaines de blessés des deux côtés. Les forces de l’ordre ne viendront que plus tard pour s’imposer dans la foule. Les manifestants d’ennahdha seront défendus par leur parti et par les ministres en leur imputant la responsabilité de la dégénérescence de la situation.
Gouvernement Jebali contre l’UGTT
Suite à ces évènements de tension et de violence, Houcine Abbassi, Secrétaire Général de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), a déclaré le lendemain, après la clôture des travaux de la réunion du comité administratif, une grève générale annoncée pour le 13 décembre prochain suite aux agressions et provocations de la ligue autoproclamée protectrice de la Révolution d’Ennahdha.
Le chef du parti islamiste a riposté le même jour dans une conférence qualifiant les manifestants d’Ennahdha de pacifiques.” Il a ensuite soutenu la LPR. Il a également appelé à vider le bâtiment de l’UGTT des bâtons et de tout ce qui peut être utilisé pour la violence.
Concernant l’annonce de la grève générale, Rached Ghannouchi a répondu que
Nous ne pensons pas que cette grève soit nécessaire puisque le gouvernement a répondu aux demandes sociales que l’UGTT a exigé, entre autres l’augmentation des salaires dans les secteurs publics et privés. Leurs demandes n’ont rien de social :
Ils ont demandé la poursuite des agresseurs contre l’UGTT et cela est une demande d’ordre judiciaire et cela n’est pas du ressort du gouvernement. Ils ont aussi appelé à la dissolution de ” La Ligue de protection de la Révolution” et on leur a dit ‘Allez voir la justice’ […] Ils ont dit qu’ils s’adresseront à la Confédération Syndicale Internationale (CSI) et ont leur a répondu que c’est de leur droit de le faire mais que cela ne nécessite pas une grève générale. […] Ils cherchent les problèmes au lieu de chercher des solutions.
En effet, dans la journée du 4 décembre, le chef du gouvernement Hammadi Jebali ainsi que des représentants de l’UGTT et de l’UTICA ont signé une convention pour l’augmentation des salaires des employés du secteur privé d’une valeur de 6%. Cependant, les demandes de l’UGTT concernent cette fois-ci la dissolution de la LPR qui récidive par la violence en défendant la politique du parti islamiste.
Par ailleurs, Houcine Abassi a nié le fait que les syndicalistes aient usé d’armes lors des affrontements chose qui a été démentie par les vidéos transmises dans les réseaux sociaux où les bâtons ont été utilisés par les syndicaliste et par les partisans d’Ennahdha.
Dans la même journée, Hamadi Maamer, chef de la “Ligue de Protection de la révolution” à Sfax, a organisé un sit-in devant le siège du gouvernorat, pressant les députés de l’Assemblée Constituante d’adopter la loi d’exclusion de certains responsables RCDistes (soutenue par la Troïka) des postes politiques et administratifs.
Ainsi, l’attaque de la LPR contre l’UGTT qui s’est soldée par la violence des deux côtés, et les appels à l’adoption de la loi anti RCD, a crée une tension palpable au niveau politique, notamment avec la montée dans les sondages du parti Nidaa Tounes.
Dans un coup de force, l’UGTT a donc annoncé une grève générale, prévue pour le 13 décembre. Considérée comme une menace directe, le gouvernement Jebali serait acculé à dissoudre cette Ligue car, la date en elle-même coïncide avec la visite de la secrétaire des Affaires étrangères Hilary Clinton pour participer à la 9 ème session du Forum de l’avenir programmé depuis le gouvernement Béji Caid Essebsi et qui devra être sous une présidence tuniso-américaine.
Contre les Ligues d’Ennahdha, les députés boycottent les séances plénières
A l’Assemblée Constituante, le bras de fer entre Ennahdha et les députés de l’opposition continue. Le député Selim Ben Abdessalem a commenté sur sa page facebook la situation
Aujourd’hui, après une séance où tous les amendements des députés de l’opposition ont été rejetés en bloc par les députés d’Ennahdha, l’article 22 du texte sur l’ISIE n’a pas été adopté, faute de recueillir les 109 voix nécessaires. Face à ce refus total de recherche du consensus de la part d’Ennahdha (qui trouve normal de rejeter tous les amendements de l’opposition mais anormal de voir rejeter l’article entier), les députés de l’opposition ont décidé d’être présents à l’ANC les 3 prochains jours tout en boycottant les séances, et ceci pour exiger :
– Que le chef du gouvernement vienne s’expliquer devant l’ANC concernant les évènements de Siliana et les derniers évènements ayant eu lieu devant le siège de l’UGTT,
– La dissolution des ligues dites de protection de la révolution,
– La recherche d’un vrai consensus sur le texte sur l’ISIE.
Cette réponse est malheureusement apparue comme la seule envisageable après les blocages auxquels nous avons assisté et le refus du gouvernement et d’Ennahdha d’assumer leurs responsabilités dans les graves évènements de ces derniers jours.
Aujoud’hui serait donc le deuxième jour du boycott d’environ une soixantaine de députés. Par ailleurs, des grèves organisées hier par l’UGTT dans les villes de Sfax, Kasserine, Gafsa et Sidi Bouzid ont été un sorte d’un avant-goût pour la grande grève prochaine. Le gouvernement va-t-il céder à l’ultimatum de la grève du 13 décembre ? Le Chef du gouvernement acceptera-t-il de confronter les élus du peuple ? Qu’en adviendrait-il de la LPR ? Beaucoup de questions dont les réponses dépendront des prochains évènements de l’actualité brûlante en Tunisie.
ya lilia famma tsawer fiha ettihad mte3 zlalet warrihelna bellehy..
C’est un avis comme un autre, libre expression.C’est une idiotie, de maintenir cette grève générale, mais apparemment l’équipe dirigeante de l’UGTT, souhaite aller jusqu’au bout de ses armes, alors s’épuiser. Et connaissant l’idéologie qui anime cette équipe dirigeante le pire n’est pas à exclure. Cette équipe pourra rentrer dans une impasse sans issu, et même faire des choix qui dépassent la logique et la tradition syndicaliste (voilà pour ne dire que ça). La grève générale est un droit comme toutes les autres formes de grève, sectorielle, partielle… juste à rappeler (à titre d’exemple), qu’en 1981 François Mitterrand a eu le droit à 18 mois de non grève (de trêve), puis les syndicats ont jugé la situation selon leurs lectures en matières d’enjeux politiques au niveau de chaque tendance qui dirige chaque syndicat (le syndicalisme en France est plutôt un syndicalisme politique), et aussi décider de mettre en exécution la menace par la grève, selon leurs lectures en matière de nouveaux acquis sociaux qui pourraient être gagnés (augmentations du SMIC, amélioration des conditions du travail…) (et puis l’histoire on la connaît tous). La Tunisie après la révolution a vu l’UGTT rentrer dans les revendications salariales plutôt que dans une forme de participation (en forme de proposition). La participation de l’UGTT au 1er gouvernement au lendemain du 14 janvier 2011 était une erreur historique (c’est la recherche de la place politique par le pouvoir politique), chose indécente et inconvenante pour un syndicat de l’ordre de l’UGTT. À mon sens l’actuelle équipe souhaite payer en particulier cette erreur historique à ce gouvernement des urnes. J’admets que ce gouvernement n’est pas à 100% dans la logique de faire court (en matière de période provisoire) (avec bonne intention peut-être). Ce gouvernement a pris le chemin le plus long (il agit d’une manière a faire une restructuration organique à l’administration), c’est de l’impossible, car sa mission est limité par le temps, (même s’il reste trois ans avec l’accord de toutes les parties -syndicats, société civile de toute couleur, partis politiques- il n’arrivera pas à mener jusqu’au bout ses reformes organiques de l’administration et de l’économie au sens le plus large, et ce n’est pas la responsabilité du mouvement Ennahdha tout seul, toute la troïka sa responsabilité est engagée. Les objectifs de la révolution ne sont pas le programme de ce gouvernement sur un 18 mois voir même 3 ans comme il a proposé l’actuel président de la république lors de la campagne électorale 2011. les objectifs de la révolution est un travail pour tous les gouvernements successifs dans un espace temps de toute la vie. Il est du rôle et du devoir de tous les futurs gouvernements de veiller que la situation des citoyens s’améliore fur et à mesure. Dans ce sens (améliorer le quotidien des tunisiennes et des tunisiens, en pouvoir d’achat, en liberté, en égalité, en égalité des chances… -en mieux être tout simplement-), ce gouvernement s’est laissé allé dans le sens de répondre aux revendications de tout genre. Dommage que se gouvernement n’a pas posé (que les constituant-e-s n’ont pas posé) des règles de conduite plus strictes et plus claires dès le début et dans le sens à faire vite pour que l’ANC se consacre à poser les règles du futur stable et durable (adopter une nouvelle constitution, des hautes instances indépendantes pour les élections et les médias, poser une date proche -un an, 15 mois maximum- pour les futures élections, et une justice transitionnelle pour que tout le monde passe à autre chose que pleurer sur le passé, faire le deuil. Voila avec le temps qui passe le flou se construit, et devant l’indécis «l’inconnu» toutes les forces vulnérables – les syndicats, les forces de la contre révolution, les hommes d’affaires en suspicion d’être traduits en justice, les pauvres qui ont vu peu d’amélioration dans leurs conditions de vie, ou/et même des dégradations aussi de leurs conditions de vie, deviennent imprévisibles et dure à la canaliser. Aujourd’hui on est dans une situation qu’on a construit nous mêmes (par le biais d’un gouvernement élu qui se trompé de logique d’action, une société civile plurielle et dans tous les sens – tranche moderniste/athéiste, et autre différentes d’une manière ou d’une autre-, et des équipes dirigeantes politiko/idéologique qui sont contre le pluralisme politique et culturel dès leurs naissances, et pour cette dernière catégorie il s’agit de nida tounis, et des partis du front populaire essentiellement). Ces trois catégories sont tunisiennes d’histoire et de culture, sauf que certains d’entre eux ne sont pas dans la conjugaison pacifique de leurs divergences avec les autres «essentiellement avec les islamistes, ou plutôt les groupes de l’islam politique». Il urgent que les tunisiennes et les tunisiens se disent qu’ils n’ont de sortie que par le débat et l’admission du vivre ensemble. Personne ne pourra éliminer personne. Rentrer dans une combat d’existentialisme contre un/des adversaires politiques est le choix de la défaite. Aujourd’hui l’actuelle équipe dirigeante de l’UGTT, le front populaire constitué du POCT, de el wattad… sont dans ce choix de vie ou de mort (le combat existentialiste contre Ennahdha et l’islam politique, et même contre les partis qui peuvent faire centre -CPR, ETTAKATOUL…). Quand on est décidé à aller jusqu’au bout, on aura un résultat c’est sûr, et on participera à la fabrication de sa propre l’histoire et de sa propre future place dans la société, c’est certain, et on se fera lâcher et trahir par ses propres alliés objectifs et historiques, inéluctablement. Vive la Tunisie du travail, de la démocratie, de la diversité, du pluralisme. Ben Ali harab. Mandhouj Tarek,
[…] du CPR, s’insèrent à l’évidence dans une tentative de stratégie politique profitant de l’étau qui se resserre de plus en plus sur Ennahdha, pour que le parti islamiste se plie aux conditions de son […]
[…] » se sont rassemblés devant le siège de la Centrale. Après cet incident de violence, l’UGTT annonce une grève générale pour le 13 décembre qui finit par être annulée suite aux pourparlers avec le gouvernement. Un accord est signé, à […]