Pour bien moins radical que les soldats de l’Etat Islamique, la propriétaire de l’hôtel incarne tout ce que certains laissés pour compte tiennent en horreur : l’establishment bourgeois-moderniste. Une dimension socio-politique clé qui intéresse assez peu les dizaines de médias étrangers amassés devant les lieux.
Je vous présente Wided Bouchammaoui, d’abord parce que c’est mon amie. Zohra Driss
C’est par cette note, presque aussi légère et nonchalante que la ballade mortifère de l’assaillant, que Zohra Driss a conclu une conférence de presse à Sousse au lendemain du massacre, non loin des flaques de sang de la piscine couverte fraîchement nettoyées.
Au fond de la salle, Amel Karboul, l’ancienne ministre du Tourisme qui s’abstiendra de prendre un selfie ce jour-là. Devant, les VIP de l’UTICA, dont la patronne des patrons, invitée d’honneur. Opération com’ pour clôturer la conférence, une jeune jet-setteuse est appelée à la tribune pour « dire son émotion » et louer le parcours de la femme d’entreprise, une femme davantage issue d’une dynastie de self-made woman.
Fille du richissime hôtelier Mohamed Driss surnommé le doyen des hommes d’affaires tunisiens, son père lui offre le joyau de ses 11 hôtels, l’Imperial Marhaba, un 5 étoiles édifié en front de mer tout comme les autres, mais à Hammam Sousse, région symbole du favoritisme régional et clanique de l’ancien régime, abritant les maisons natales de Ben Ali et de nombreux anciens ministres et premiers ministres.
Conservatisme fiscal contre djihadisme insurrectionnel
Qu’il soit missionné ou loup solitaire, l’originaire de Gaâfour (petite ville de la Tunisie profonde cyniquement entrée dans le lexique tunisien comme symbole de la pauvreté) Seifeddine Rezgui visait probablement, en sus des touristes occidentaux, une élue Nidaa Tounes qui accumulait depuis peu le pouvoir de l’argent et celui de la politique.
De facto relayée dans un premier temps dans certains médias, cette thèse est dans un premier temps réfutée par le secrétaire général du parti majoritaire Boujemâa Remili, avant d’être reprise à son avantage par Zohra Driss elle-même : « Je suis une militante féministe. J’ai été visée pour mon inlassable action au sein de la société civile », se prévaut-elle en off devant des journalistes de la TV française.
Tout de noir vêtu, arme d’assaut portée avec décontraction, avec sa démarche sûre et sa longue chevelure, Rezgui n’inaugure pas seulement un type d’attaques d’une ampleur inédite : un certain nihilisme romantique semble fasciner les plus crédules des anarcho-djihadistes. Il ne manquera pas de marquer une jeune génération nourrie à la littérature marketée par l’Etat Islamique. L’organisation sait en effet capter le mal-être post idéologique en administrant une dose de testostérone, sans doute plus attrayante que les modiques salaires du djihad.
« La Tunisie n’a pas 2.000 euros à donner à chaque chômeur », dit à Europe 1 Béji Caïd Essebsi, président de la République qui accorde deux interviews consécutives à Jean-Pierre Elkabbach, mais n’a toujours pas daigné s’adresser au peuple dans une allocution solennelle, suite à ce pire attentat de l’histoire du pays. Après une rapide visite de l’hôtel en compagnie de son inséparable fils Hafedh Caïd Essebsi, l’homme se contentera d’une première réaction édifiante où il désigne deux ennemis imaginaires : la campagne « Où est le pétrole », et le parti islamiste Hezb Ettahrir, à la faveur d’un bon vieux réflexe répressif à l’ancienne, celui de la mise hors la loi de toute opposition, avant toute chose.
A l’instar du peu efficace complexe militaro-industriel que l’Amérique a mis à profit dans sa guerre contre le terrorisme, la Tunisie s’apprête à mobiliser un complexe touristico-policier dans lequel le patronat exigera de l’Etat des passe-droits économiques. Une aubaine pour ceux qui prédisaient dès octobre 2014 que « Zohra Driss se battra certainement pour une politique fiscale qui avantagera les hôteliers au sein de la nouvelle assemblée ».
Associé à un très convenu plan de fermeture de 80 mosquées et de déploiement de 1000 agents armés sur les plages, l’ingérence du secteur privé face à la faiblesse de l’Etat n’a d’égal que l’orthodoxie de l’action gouvernementale. Dans un authentique pays démocratique, de telles défaillances en cascade auraient coûté une démission collective à une équipe essentiellement portée au pouvoir par les promesses électorales de sécurité et de prospérité.
لقد اختار الشعب التونسي “العظيم” بكامل إرادته أن يضع السلطة والنفوذ والثروة بين أيدي أفسد الفاسدين وأبشع المجرمين، وعليه فليتحمّل نتائج خياراته كاملة. في كل الأحوال، هذه المافيا الفاسدة والوقحة من ذلك الشعب الانتهازي والمنافق، وحكموا فيكم فما ظلموا
كما_تكونون_يُولّى_عليكم
اللي_تضربو_يدّو_ما_توجعوش
يحيا_هضاكة
Writings in the sand in Tunisia, not only on the beach but also in the inland… Mass tourism idid indeed benefit only certain layers of Tunisian society, excluding others. Also mass-tourism as such can be questioned. One does not need to be a ‘salafist’ to see the negative impact it does have on any society. Whether an autarkic salafist Tunisia is the answer? I doubt it. But to me as a total outsider it seems that – as in many places in the world – the rural/metropolitan contradiction is the major problem to be solved. One can not have a metropolitan liberal more or less affluent part and the mirror image of it together in one state. I do have no sympathy for ideologues like Adel Almi, but Tunisians should ask themselves the question ho come that he could gain so much ground… by his writing in the sand of words by bullets of those who follow him.