Il s’agit peut-être de l’une des plus longues périodes de clandestinité qu’aura connue la Tunisie de Ben Ali : Moncef Gasmi, un opposant se sachant recherché, s’est caché pendant plus de dix sept ans… en Tunisie. Originaire de Sidi Brahim dans la délégation de Ghardimaou (Nord Ouest de la Tunisie), il était marié et père d’une fillette. Pendant cette longue planque est né son fils. Sa femme, Monjia, a dû affronter les interrogatoires de la police. A l’occasion de l’Aïd El Adha, soit quelques semaines après la
libération des derniers prisonniers du mouvement En Nahdha en novembre 2008, Moncef Gasmi a passé la fête en famille, chez lui. Dans la nuit du 7 décembre 2008, il a été arrêté et détenu plusieurs jours au
district de la garde nationale de Jendouba, puis il a été écroué en vertu de trois affaires datant de 1992 et pour lesquelles il avait été condamné par contumace.

Ayant fait opposition dans deux d’entre elles (il a été accusé de participation à l’incendie du lycée de Ghardimaou et de participation au complot de la Nahdha), sa peine a été ramenée à six ans d’emprisonnement par le tribunal de Première Instance du Kef, qu’il effectue à la prison du Kef. Il a interjeté appel. Dans l’affaire de l’incendie du lycée, un non-lieu a été prononcé. Une autre affaire, correctionnelle (et en principe prescrite ?), où il avait été condamné à 6 mois d’emprisonnement sera examinée le 3 février prochain. Monjia, son épouse, lui rend visite le mardi et regrette que son mari ne soit pas à la prison de Bulla Regia, dans le gouvernorat de Jendouba, plus proche du domicile de la famille.

Lors de la dernière visite qu’elle lui a rendue, Moncef Gasmi lui a décrit ses conditions d’emprisonnement : pas de lit, il doit dormir à même le sol. La température est proche de 0 ° au Kef. Il partage la cellule surpeuplée avec des co-détenus de droit commun, qui fument et l’enfument. L’humidité le ronge. C’est tout ce que Monjia a retenu du quart d’heure de parloir qui lui a été octroyé, sous la surveillance de deux gardiens aux aguets.

La police n’oublie personne. Jamais.

Luiza Toscane