Tunisie, Ben Ali élections 2009 non merci
Discréditons ceux qui mettent en doute les réussites tunisiennes !


 

Lors de son discours prononcé le 3 avril 2009 pour la clôture de la première session ordinaire du Comité central du RCD, le président Tunisien n’a pas manqué de rappeler ses positions relatives à la liberté d’expression et son corolaire la liberté de l’information. Il a par ailleurs lancé un appel solennel à discréditer, entre autres, les sceptiques quant aux « réussites tunisiennes ».

 

Tunisie : Ben ali, discours RCD

 

« La critique loyale -affirme Ben Ali- qui ne porte pas atteinte à l’honneur des gens, qui a pour but la quête de la vérité et qui cherche à servir l’intérêt général est acceptable [elle n’a pas à être acceptable, c’est un droit garanti par notre Constitution, celle-là même en vertu de laquelle le président de la République prononce ses discours]. Nous l’encourageons et encourageons à y réagir – poursuit Ben Ali-, quitte à corriger les faits, le cas échéant, et à susciter le débat à ce sujet, si nécessaire, de manière à consacrer le droit à la liberté d’informer et le climat démocratique civilisé que nous voulons pour notre pays.»

Plus bas, dans le même discours, le président tunisien assène :

« Tout en réaffirmant l’importance que nous attachons à l’activité du Rassemblement au plan extérieur, j’appelle à intensifier cette activité, à l’utiliser à bon escient au service de nos intérêts nationaux et pour discréditer les allégations des affabulateurs et autres sceptiques qui tentent de semer le doute sur la pertinence de notre démarche et l’ampleur de nos réussites. »

Autant en parlant des «affabulateurs», je veux bien. Après tout, depuis la nuit des temps, il y a toujours eu des affabulateurs. Et le fait de porter la contradiction à ces affabulateurs avérés est non seulement dans l’ordre normal des choses, mais nécessaire également. Et si la contradiction est pertinente, cela ne peut que contribuer, en effet, à les discréditer. Et il suffit d’un mot, un seul, du président de la République pour faire cesser les affabulations de la TAP et de Mouldi M’Barek, en particulier lorsqu’il s’agit de rapporter les propos des encarts publicitaires sur l’international Herald Tribune comme étant les analyses de sa rédaction. Et faire cesser de telles affabulations payées par le contribuable relève sans aucun doute de l’intérêt national.

En revanche, « appeler » expressément et non moins solennellement à discréditer les « sceptiques qui tentent de semer le doute sur la pertinence de [la] démarche et l’ampleur [des] réussites » semble particulièrement choquant dans la bouche du chef de l’Etat. Celui-ci confond ainsi son rôle de président de tous les Tunisiens avec celui d’un chef de parti. En puis, pourquoi s’opposer au RCD et à la politique de son chef, si l’on n’a pas la conviction (et non pas simplement des doutes) que la démarche n’est pas aussi pertinente et que les réussites ne sont pas à la hauteur des capacités de la Tunisie !

Dès lors, comment, en lançant un tel appel, peut-on garantir la neutralité des élections et le bon déroulement des compagnes électorales ? Et à quoi peut bien servir la liberté d’expression si elle ne sert pas mettre en doute la pertinence des choix et l’ampleur des réussites ? Est-ce uniquement à acclamer l’actuel pouvoir et son chef ? Le but de toute élection politique n’est-il pas –en théorie du moins pour le cas de la Tunisie– de donner la possibilité à des concurrents de succéder à ceux dont l’action n’est pas jugée satisfaisante ?

Certes, dans le pays du jasmin, on n’est pas à une contradiction près. Sauf que cette fois-ci, les choses deviennent officielles : Discréditer ceux qui n’adhèrent pas aux orientations des gouvernants actuels.

Astrubal, le lundi 6 avril 2009
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