Les articles publiés dans cette rubrique ne reflètent pas nécessairement les opinions de Nawaat.

Entre vide, peur du vide, angoisse du chaos, crainte du futur, et surtout crainte d’un retour en arrière, et crainte de nouvelles violences, à quoi pourrait ressembler le visage d’une Tunisie qui relève la tête.

Un mois et demi se sont déjà écoulés depuis la fuite de Ben Ali. Et comme le pensaient la pluparts de ceux qui ont la tête sur leurs épaules, cela ne suffisait pas à redonner à la Tunisie sa brillance tant voulue. Le problème de la Tunisie n’est pas Ben Ali seul, mais tout un système, une démagogie, un savoir faire, une manipulation, des cadres hauts placés qui tirent profits de leurs sièges et surtout une mentalité tunisienne qui s’est attaché durant des années au culte de la personne, contre une personne ou pour une personne, pas forcément en critiquant cette personne sur un programme ou une idéologie, mais en jugeant la personne sur un simple fait, une promesse, ou même son physique.

Un mois et demi durant lesquels les Tunisiens se sont divisés ; les raisons des ces divisions se comptent par centaines. On peut citer les grèves, l’UGTT, le PDP, ettajdid, Ghanouchi, Rajhi, l’armée, hammami, l’ordre national des avocats, Mestiri, Ammamou, RCD, etc…et puis s’en est suivi un flou total. Même l’unité des Tunisiens envers le sort des Tunisiens expatriés en Libye ne les a uni que pour un moment éphémère. Même le sort de Kadhafi n’a pu les unir. Et plus grave encore le sort de la Tunisie ne semble plus être un vecteur d’union.

Chacun campe sur une position floue, un flottement qui a comme conséquence l’arrêt total de ce que pourrait être la réconciliation nationale. Il est évident que les errements des deux gouvernements provisoires n’ont pu aider en ce sens, ni leurs hésitations, ni leurs manques de transparence et le décalage qui semble se creuser d’avantage de jour en jour.

Aujourd’hui la Tunisie a besoin de solidarité, a besoin d’apprendre à travailler ensemble, et chaque tunisien a le devoir d’assumer ses actes et ses faits…Nous avons besoin de cette réconciliation.

Or il n’y a pas de réconciliation sans condamnation, et il n’y a pas de pardon sans désignation de coupable. Nous avons besoins de toutes les forces disponibles dans le pays mais à une seule condition : que ceux qui ont pêché confessent leurs pêchés et œuvrent pour les réparer, non pas discrètement mais publiquement.

Nous arrivons donc à cette accusation qui devient à la mode aujourd’hui «membre du RCD, ou ex RCDiste ».

Je rappelle que la page facebook de Ben Ali avait plus de 300 000 admirateur, que le RCD comptait et compte encore 2 millions d’adhérent, que la majorité des Tunisiens ont été liés d’une manière ou d’une autre au RCD ou à ses cellules professionnelles, que nombre d’enfants de la Tunisie ont reçu de la main d’un de ses représentant une récompense pour leurs brillances dans les études à l’école, au lycée ou à la faculté, qu’ils sont allé en colonie de vacances avec des subventions du RCD. Doit-on condamner toutes ces personnes au silence et à la marginalisation ?

Depuis le début de la révolution je n’ai jamais imaginé la Tunisie d’après- révolution aller de l’avant

sans réconciliation, et sans une assemblée constituante(1). Et c’est le devoir du gouvernement provisoire d’assainir la situation avant la tenue de toutes élections. Et c’est précisément là que Ghanouchi a manqué de lucidité.

Aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin de solidarité, de nous serrer les coudes pour bâtir et consolider notre Tunisie.

Désigner des boucs émissaires pour satisfaire une partie du public n’est pas la solution, il manquera toujours quelques uns à la listes. En revanche garantir la grâce à ceux qui collaborent et qui aident à remettre le train de la démocratie sur les rails semble plus opportun. Il faut donner à ceux qui ont, par le passé, œuvré pour l’ancien régime la possibilité de se racheter en aidant à éclairer les zones sombres et à donner plus d’impulsions au réveil tunisien à la condition qu’ils confessent leurs pêchés les reconnaissent et aident la justice à trouver tout les autres coupables .

Nous ne pourrons pas aller loin dans le processus démocratique sans cette réconciliation. Et nous ne pouvons pas discuter des programmes électorales, de politiques d’idéologie dans une ambiance chaotique ù règne la peur et l’instabilité. Nous ne pourrons pas comprendre sans écouter, et ne nous pourrons pas écouter sans que les esprits se soient calmés..

J’appelle ce nouveau gouvernement à œuvrer dans ce sens, à encourager les anciens cadres du régime à sortir de l’ombre, à confesser leurs pêchés et à se mettre à travailler pour la Tunisie, et plus jamais pour leur propres intérêts.

Je l’appelle aussi à condamner tout usage de violence excessif contre les manifestants ou les casseurs, et de traduire les responsable en justice, et à essayer de calmer la rue tunisienne et la rassurer en lui tendant l’oreille et la main pour travailler ensemble.

J’appelle les Tunisiens, à la réconciliation, à la solidarité et à l’union.

J’appelle enfin toutes les forces politiques, syndicales, associatives et la société civile à éveiller la conscience politique des Tunisiens et leurs expliquer en quoi consiste une assemblée constituante, et à être unis derrière cette revendication qui est la seule alternative à l’émergence d’une nouvelle constitution et la concrétisation d’une vrai démocratie. Je les appelle aussi à préciser dès aujourd’hui leurs programmes électorales pour une éventuelle élection de cette assemblée.

Vive LA Tunisie, libre souveraine et démocratique

(1) Commentaire intitulé « Non, et Non » sous le pseudonyme Bakounine à un sujet posté sur cette page de Emma Benji le 02/01/2011