Les martyrs sont partis l’année dernière. Les blessés ont prolongé la souffrance sous la couette en lisant Proust. Tant d’efforts pour ne pas perdre le fil de la révolution. Souvent les gens s’endorment. Les familles des blessés ne décollaient pas de l’attente depuis janvier. La rougeur qui émaille nos visages leur serait-elle imputable ?

Les intellectuels tunisiens abîmés comme ils sont dans les bons sentiments d’une laïcité francophone un peu trop figée. Attachés dans la résignation et le double langage des droits de l’homme. Pourquoi déranger leur sommeil ?! Ils ont renforcé les murs aux alentours de leur modernisme de supermarché, et depuis l’aube du 24 Octobre, on n’entend plus qu’un lourd et bavard silence.Il est midi. Que penses-tu de la modernité made in Seltia ? Une mascarade qui se prétend démocrate pour étouffer et réduire le peuple au silence.

Un an est passé. J’ai dit hier à mes amis égyptiens, yéménites, libyens, syriens, que j’allais insensiblement mieux. Si seulement je pouvais me confronter à cette réalité dont je ne sais ce qu’elle est, au moment où le conseil constitutionnel se met en place, sinon un sentiment inquiet et qui prévoit de se lever le matin.

L’idée que le CPR nous sauvera provisoirement du néant, n’a pas encore tout à fait secoué l’immobilisme. Pour l’instant l’urgence est là, le gouvernement élu doit commencer dans quelques jours. Nos modernistes ne semblent pas se rendre compte de combien cette entreprise est difficile, leurs réactions restent enfermées dans une attitude rouge de la honte, du désir inassouvi, un bain glacé accompagné de quelques bières et d’une dandine démocrate au fond de culotte mourant.

On retrouve les valses d’Ettakattol ! Au moins, bien meilleures que l’attente. Le PCOT promu en catastrophe agent de douane refusant l’entrée au Prince de Qatar. Inventer les protestations puisqu’elles sont rares !! Une de plus, une autre encore. Le PDP imprégné de blanches transpirations nocturnes se plonge dans un bol d’autocritique. Le PRD, première cigarette et affronter la douche ou la foule, pas facile le choix. Le pôle, lui, la franco-folie lui colle toujours aux fesses. La Nahda, elle, redoutable après deux décennies de souffrance sous la torture et la somnolence en exil. Maintenant, l’économie face à face, l’hystérie de nos modernistes et la névrose de certaines dames. Éviter à tout prix le huis clos, évacuer les tensions intérieures, écouter les angoisses refoulées, assainir… le supermarché de la culture, sans oublier la Police et la Mafia, et trouver une convention partagée. Presque un miracle ! Bonne chance Nahdaouis, et n’oubliez pas que l’honneur, l’intérêt, le plaisir sont les clés de la volonté d’autrui, et qu’il faut se méfier des diners offerts par des gens paisibles !

Ceux qui n’ont pas voté le 23, je leurs dirai ceci : La démocratie, c’est comme la femme, elle se donne à celui qui la poursuit et non à celui qui la regarde passer dans la rue sans même lui dire un mot ! Votez, la prochaine fois. De mon temps on entrait dans un parti comme on entrait dans une tombe. J’avais seize ans lorsque j’ai interrompu mon activisme au sein d’un parti, et jamais ne le repris. Amen.

Après chaque révolution, il y a souvent des coupures, des inconséquences, des bévues, des incohérences, des interruptions, des maillons qui manipulent, l’éternel retour du cauchemar impérialiste… mais toujours la liberté gagne, une ouverture du sens, l’effacement des barrières entre les humains et un peu plus de justice.

L’exil m’est douloureux. Lundi c’est dimanche.