Le prix du gouverneur de la Banque centrale de l’année décerné à Mustapha Kamel Nabli est une démonstration de press-tidigitation politique.

M. Mustapha Kamel Nabli a été consacré meilleur Gouverneur de Banque Centrale du continent africain de l’année 2012. Cette distinction lui a été décernée au cours d’une cérémonie organisée en marge des assemblées annuelles du Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD) qui parraine cette manifestation.

Cette annonce vient à point nommé pour redorer le blason de MKN, alors même qu’il est sur un siège éjectable, qu’il est contesté par de nombreuses voix qui s’élèvent pour dénoncer la politique monétaire qu’il mène à la BCT, l’obscurantisme de l’institution concernant l’accès aux données financières et économiques de la Tunisie. Par ailleurs MKN s’oppose ferment à un audit de la banque et de la dette tunisienne qui permettrait d’abolir la corruption financière et d’annuler légalement la part odieuse et illégitime appartenant au dictateur ben ali.

Ce prix a été délivré lors de la sixième édition des Trophées AfricanBanker « AfricanBankerAwards 2012 », évènement organisé par IC publications. Or, une vérification sur le site dédié au trophée fait apparaitre que ni MKN ni la BCT ne sont nominés à aucun des prix d’african bankers awards.

Et pour cause, le prix du gouverneur de la Banque centrale de l’année est réalisé en marge de la manifestation qui n’inclut pas les banquiers centraux. Les gagnants du prix du gouverneur de la Banque centrale de l’année sont sélectionnés par le Comité des prix de banquier africain

Le Comité est composé de l’équipe éditoriale d’African Business et le magazine African Banker et il bénéficie de l’expertise des organisations et des personnalités de l’industrie avec une connaissance profonde du paysage des affaires en Afrique.

Ainsi le prix du gouverneur de la Banque centrale de l’année a été décerné par des tunisiens à un tunisien et non pas par un comité d’expert et jury indépendant au groupe de presse IC publications.

Fondé en 1957 par le Tunisien Afif Ben Yedder, le groupe de presse IC Publications, basé à Londres et à Paris, publie plusieurs magazines économiques et financiers en anglais et en français destinés au marché africain dont en particulier African Business, African Banker.

Par ailleurs, la mercredi 07 Avril 2010, Ridha Kéfi l’affirme lui-même dans une tribune lui étant dédié sur tekiano.com : « je suis rédacteur en chef (basé à Tunis) aux magazines New African, African Business et African Banker, publiés à Paris par le groupe ICP de mon ami Afif Ben Yedder ; Je suis conseiller de la rédaction de la revue trimestrielle espagnole Afkar/Idées (Think Tank pro-occidentale dont fait partie le non moins contesté Elyes Jouini). Je vais écrire bientôt à « La Revue », dirigée par l’un des éditorialistes et patrons de presse qui m’ont fait aimer ce métier, M. Béchir Ben Yahmed. ». Ridha Kéfi est également directeur de la rédaction de “Kapitalis.com». Ce site web a été le premier à relayer l’annonce du trophée remporté par MKN.

Dans la même veine, à quelques mois du déclenchement national de la Révolution Tunisienne, en mai 2010, Leïla ben Ali est la seule personnalité tunisienne figurant parmi les « cinquante Arabes les plus influents en 2010 », classement résultant d’un sondage réalisé par le mensuel The Middle East, magazine édité par l’éditeur de presse londonien IC Publications, fondé et dirigé par le Tunisien Afif Ben Yedder.

Les équipes éditoriales de IC publications qui ont décidé d’attribuer le prix à Nabli se sont contentées de motiver leur décision par : « ce prix récompense l’excellent travail qu’il a accompli dans des circonstances très difficiles de la Tunisie post-révolution où il fallait préserver les grands équilibres financiers du pays et assurer la liquidité bancaire». Or la politique de taux directeurs historiquement bas de la BCT, ne permet que de fournir des liquidités bon marché aux banques privées, nuit à l’épargne nationale et ne profite pas au peuple tunisien qui se voit confronter jour après jour à une inflation galopante et ce, alors même que les crédit au PME, PMI sont gelé et que la restructuration des dettes des entreprise agricole sont refusée.

Le contexte politique et macro-économique tunisien entourant le trophée du gouverneur de la Banque centrale de l’année.

Le 28 mai 2012, le site espace manager nous a fait part du projet de création d’un nouveau parti politique « Tahia Tounés ». Nabil Karoui, Taieb Baccouche et Mustapaha Kamel Nabli seraient parmi les hommes forts et Beji Caïd Essebssi serait pressenti comme « le guide » pour orienter ce mouvement et assurer la réussite du processus démocratique en Tunisie. Ce projet ferait suite à l’«Appel de la Nation » de l’ex-Premier Ministre et le nom du parti serait inspiré de « Forza Italia » crée par Silvio Berlusconi en 1994.

S&P a abaissé mercredi 23 mai 2012, de deux crans, la note de la dette à long terme de la Tunisie à « BB », ce qui signifie que le pays est classé dans la catégorie des emprunts spéculatifs. Dans une interview accordée le 28 mai 2012 à Express FM, le gouverneur de la Banque centrale, Mustapha Kamel Nabli s’est exprimé sur la dégradation de la notation de la Tunisie. Il analyse la nouvelle notation comme étant liée plus aux incertitudes politiques qu’à la situation économique de la Tunisie. Ainsi, MKN impute plus la responsabilité de la dégradation de la note à l’échec de la politique de la Troïka qu’a la politique monétaire qu’il conduit au sein de la BCT qu’il dirige.

Pourtant cette analyse est contredite notamment par le rapport de S&P qui impute la notation particulièrement à la dégradation des indicateurs économiques en plus de la stabilité politique incertaine en Tunisie.

Le site zelzel.net fournit une analyse approfondie du rapport de S&P et explique que la notation est avant tout d’ordre politique qui installe la panique au sein du gouvernement, la zizanie au niveau des interprétations qu’en ont fait les experts économiques tunisiens et qu’elle a plus pour objectif de préparer le terrain politique pré-électorale de la mi-2013 qu’une véritable anticipation à long terme d’une hypothétique sortie de la Tunisie sur les marchés financiers internationaux.

MKN contesté par la société civile du fait du conflit d’intérêt entre son ancien poste à la Banque Mondiale, un des premiers créanciers de la Tunisie et son poste à la BCT où il refuse d’auditer la dette envers, entre autres, son ancien employeur. Certains cadres de la banque centrale ont dénoncé toutes les affaires de corruption, d’affairisme, à plusieurs reprises depuis un an sans que rien n’ait avancé : une lettre ouverte fin 2011, un reportage TV censuré sur Facebook, un élu dénonçant la corruption, rien n’y change et MKN continue de couvrir toutes ces affaires.

Les rumeurs concernant le départ de MKN à la BCT ne sont restées que des rumeurs, l’ANC ayant renouvelé la confiance dans son gouverneur pour conduire la politique monétaire du pays, en toute indépendance et sans aucune transparence.  A ce jour, aucun audit de la dette et de la banque n’a vu le jour de manière indépendante alors même que l’ensemble des partis politiques s’étaient prononcé favorablement à une telle démarche dans la période précèdent les premières élections libres du pays.

Le secteur agricole n’est visiblement pas soutenu, l’inflation des prix des produits alimentaires ne cessent de s’accélérer, les agriculteurs sont déçus de la non annulation des intérêts de leurs dettes, pourtant les tunisiens ont faim malgré des récoltes records nous ditons.

Sur le plan monétaire, la BCT poursuit son injection de liquidité aux banques, maintient sa politique de taux directeur à des niveaux bas qui pénalise l’épargne nationale alors même que les crédits aux PME/PMI faiblissent.

Et pendant ce temps, Kapitalis continue de soutenir MKN à la tête de la BCT

Les USA veulent conseiller la Tunisie en matière de gestion de la dette et de la finance publique. De toute évidence la mainmise des Etats-Unis et leur ingérence dans la politique intérieure et économique tunisienne ne faiblit pas. Les USA, pays le plus endetté au monde, financent leurs guerres par des emprunts et soutiennent virtuellement leur économie décadente par une politique d’assouplissement quantitatif (QE :quantitive easing) c’est-à-dire en faisant marcher l’impression excessive de monnaie pour alimenter banques et circuits financiers spéculatifs par des liquidités massives. Ce pays veut conseiller la Tunisie sur la gestion de l’endettement et surtout l’empêcher d’annuler la part odieuse et illégitime qui a été délivrée au dictateur déchu. Qui plus est, les USA ont offert leur garantie pour que notre pays puisse profiter momentanément de taux d’intérêts réduits sur les marchés financiers internationaux.

La politique des USA n’a qu’un seul objectif, permettre à la Tunisie de poursuivre docilement le paiement de sa dette extérieure quitte à épuiser totalement les réserves de devises et placer le pays sous perfusion au bénéfice de créanciers qui veulent s’assurer des rendements sur les obligations de l’État Tunisien.

En effet, l’actuel ministre des finances, Houssine Dimassi, est obsédé par l’octroi de nouvelles dettes afin d’être en mesure d’assurer le service de la dette pour l’année en cours, son rôle se limite à rembourser des dettes au moyen de nouveaux crédits.

Conclusions :

Le trophée de MKN a des relents de politique malsaine. Il ne se justifie pas par l’exemplarité de la politique monétaire actuelle de la BCT qui est critiquable aussi bien par son efficacité que pour son inaction vis-à-vis de la transparence, des audits et de la politique d’endettement de la Tunisie.

Toute cette affaire laisse à penser que les prochaines élections sont en préparation proactives afin de permettre aux anciens supports du régime dictatorial  de revenir au premier plan de la scène politique dans le pays, stopper les revendications sur un moratoire de la dette, annuler les procédures anti-corruption et blanchir les anciens membres du RCD.