Le 25 décembre 2013, la Banque Centrale De Tunisie a décidé d’augmenter le taux d’intérêt directeur. En effet quelque mois plus tôt lors d’une interview au cours de l’été 2013, le gouverneur de la BCT, monsieur Chedly Ayari, nous expliquait que cette mesure était prise en vue de dissuader les contrebandiers de prendre des prêts pour justement se livrer à la contrebande. Il est vrai que cette mesure qui consiste à lever le taux directeur afin de contrer l’inflation découle des grands principes de la macroéconomie. D’un point de vue de politique monétaire il s’agit d’une décision “raisonnable” que nous ne critiquerons pas; mais est-ce bien la solution adaptée aux problèmes de la Tunisie ? En effet, comme l’explique l’imminent prix Nobel Paul Krugman dans son livre « End This Depression Now! », ces outils de la macroéconomie ont démontré leurs limites aux US quand la Réserve fédérale (FED) a continué en vain à réduire le taux directeurs afin de booster l’économie, favoriser la croissance et par conséquent l’investissement puis l’emploi.
Qu’en est il de la classe moyenne à qui on a déjà augmenté le coût de la vie à coup de suppression des subventions sur l’énergie et bientôt sur les produits alimentaires de première nécessité. Si cette classe moyenne qui représente selon la Banque Africaine De Développement (BAD), plus de 80% de la population tunisienne n’est pas en mesure, à cause de l’augmentation du taux directeur, de bénéficier d’un crédit de consommation ou d’acheter une voiture; et si les Petites et Moyennes Entreprises (PME) et les Petites et Moyennes Industries (PMI) ne peuvent plus s’offrir un crédit à des taux raisonnables afin de maintenir leurs activités, comment assure-t-on dans ces conditions une croissance économique ? Ne faut-il pas prendre des mesures pour s’attaquer aux sources mêmes du problème de l’inflation plutôt que de sacrifier tout ce beau monde ?
Pourquoi cette inflation ?
La manière dont nous soignons l’inflation en Tunisie me rappelle fortement l’état d’un patient atteint d’une infection majeure. Au lieu de lui administrer un antibiotique, le médecin se contente de lui prescrire du Paracétamol. Il baisse ainsi la fièvre qui n’est qu’une conséquence de l’infection mais ne stoppe pas l’infection qui continue à ronger le corps du patient. Cette image décrit bien l’inflation en Tunisie ainsi que les modalités thérapeutiques mises en place pour soigner l’économie. L’inflation résulte en effet de la contrebande car nous ne contrôlons pas bien nos frontières, nous fermons les yeux sur le commerce informel dans les régions frontalières et nous ne pénalisons pas nos producteurs qui préfèrent vendre en Libye certains produits afin de générer une marge de bénéfice plus importante, même au détriment du marché local et des caisses de l’Etat.
La deuxième cause de l’inflation est la dépréciation du dinars. En effet, les prix des produits importés ont augmenté considérablement suite à la dépréciation du dinars.
Les coûts de production de certains produits ont augmenté en raison de la hausse des prix du carburant et des matières premières et suite aussi à la dépréciation de la monnaie locale.
Quand en plus la banque centrale lève les restrictions sur les importations et que la demande de devise étrangère s’accentue et aggraver la dépréciation du dinars.
Chedli Ayari : ” Nous naviguons à vue…!”
Aux Etats Unis il existe une institution rattachée au congrès américain qui s’appelle le Congressional Budget Office. Indépendante dans ses analyses et ses rapports, son principal rôle consiste à faire des simulations économiques afin de faire des prévisions sur l’impact des projets de loi à caractère économique et les décisions monétaires et fiscales, sur les principaux indicateurs économiques avant que ces décisions ne soient prises.
Avant d’augmenter le taux directeur, pouvez-vous Mr Ayari sortir votre modèle économique – vous devez certainement en avoir un – et nous dire quel sera l’impact de cette augmentation du taux directeur sur la consommation, l’investissement intérieur privé et sur l’emploi ? De combien prévoyez-vous la décroissance du taux de l’inflation suite à cette mesure ?
Quand le Taux de Rendement de l’Épargne (TRE) est de 3.25% et que l’inflation est de 6.1%, faut-il épargner ou consommer avant que les prix n’augmentent ? Bien sur qu’il faut consommer. Mais si personne n’épargne, comment les banques peuvent-elles mobiliser des ressources pour octroyer des crédits aux professionnels et aux particuliers et réaliser une croissance?
De nouveau à la conférence de la Banque Africaine de Développement qui présentait alors son rapport sur l’Afrique du nord, Chedly Ayari nous lance de nouveau sa phrase habituelle pour décrire le plan économique et monétaire « Ecoutez…nous naviguons à vue ». Il est choquant de voir le gouverneur de la banque centrale, qui ne cesse de nous inviter à envoyer des signaux forts aux investisseurs étrangers, faire des aveux aussi irresponsables. Alors que selon la législation, la mission du gouverneur de la banque centrale est le contrôle de l’inflation, peut-on ainsi dire que Ayari a échoué dans sa mission ?
[…] Mariem Ben Abid. “Comment combattre l’inflation et asphyxier la classe moyenne” from Nawaat.org. (note: will translate main ideas from the French in a few days) […]
[…] étranglera les investisseurs et les ménages, il y a aussi la politique monétaire. Par ailleurs, un autre article, également publié sur nawaat s’était attardé sur la décision de la BCT d’augmenter le taux directeur comme […]
[…] عمليات الاقتراض وبالتالي تقليل نسبة السيولة في السوق مما يؤدي، نظريا، إلى خفض نسبة التضخم وارتفاع الأسعار، إذ كلما ارتفعت نسبة الفائدة قل تزود البنوك بالسيولة […]