Les citronniers de Sbikha ont soif

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Les récoltes d’agrumes et de légumes de cette année seront faibles. Sécheresse mais surtout mauvaise gestion de l’eau affectent depuis des années l’agriculture en Tunisie. Cette fois, la soif frappe la région de Sbikha (gouvernorat de Kairouan) première productrice nationale d’abricots, de petits pois, de piments et de tomates et deuxième région productrice des agrumes. Sous prétexte de sécheresse, le ministère de l’Agriculture décide de fermer le barrage de Nebhana jusqu’à nouvel ordre. Entre temps, les champs se dessèchent dans la chaleur de l’été.

le 1er juin, la Direction générale des barrages et des grands travaux hydrauliques décide de fermer le barrage de Nebhana. Une décision qui, selon les agriculteurs, met en péril la récolte de cette année. « Puisque l’État ne propose pas d’alternatives aux petits agriculteurs qui n’ont pas les moyens d’irriguer leurs champs » explique Mounir Derbal, militant environnemental et journaliste local de Sbikha. Selon lui, l’État a négligé la maintenance du barrage depuis sa création en 1965. « La fermeture du barrage est due aux accumulations des sédiments depuis des décennies. Nous aurions pu éviter cette catastrophe si l’État a fait son travail et s’il a prévu d’autres forages pour alimenter les 19 milles hectares de terres agricoles de la région » proteste Mounir.

Farhat Belgacem Derbal, agriculteur et propriétaire de 6 hectares, rappelle que les problèmes d’eau ne datent pas d’aujourd’hui. « Le manque d’eau a commencé depuis quatre ans. Au départ, on nous donnait de l’eau une fois par semaine puis une fois par mois. Depuis la fermeture du barrage, on achète l’eau à cinq dinars par heure. Ce qui nous coûte près de 150 dinars par semaine. Si notre famille réussi à payer une telle somme, la majorité des agriculteurs n’y parviendront pas » témoigne l’agriculteur.

Avec ses voisins, Farhat réclame des autorisations pour creuser des puits afin de réduire ses frais. « Ou bien qu’ils nous fassent des grands forages en attendant la réouverture du barrage ou nous ramènent les eaux du Nord » suggère l’un des paysans.

Le barrage Nebhana alimente Kairouan et trois autres gouvernorats du Sahel. Nous avons essayé de prendre contact avec la direction du barrage. Le petit bâtiment de trois bureaux était fermé. Le gardien nous a ouvert la grille qui donne accès au site. D’une capacité de 71,6 millions de m3 à sa création, le barrage de Nebhana a perdu 12,9 millions de m3 à cause des résidus. En 2016 sa capacité est estimée à 58,7 millions de m3. Avec 2,4 millions m3, les réserves actuelles atteignent un niveau alarmant. A Tunis, Abdallah Cherid, directeur général des Barrages et des grands travaux hydrauliques dément le manque de maintenance au barrage de Nebhana. « Nous l’avons fermé provisoirement en attendant la pluie ». Mais si elle ne vient pas ? l’État n’a visiblement pas prévu cette éventualité.

Environment

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4Comments

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  1. 1
    KADDOUR

    S’il y a un problème important au niveau des zones d’irrigation,,de l’entretien du barrage,des surfaces distribuées qui doivent correspondre à une surface bien déterminée,et pas plus,à la nature des cultures plus ou moins consommatrices d’eau. A rappeler qu’un hectare d’agrumes consomme 10.000 M3/Ha,de Tomates:5.000 M3/Ha et de légumes 2 à 3.000 M3. Alors il faut choisir et surtout mettre des gens responsables et qualifiés pour la gestion de ces zones.

  2. 2
    Mohsen K.

    Ce qui est laissé sous silence et non dit par les personnes interviewées, c’est que le périmètre irrigué initial sur le barrage Nebhana a été largement étendu par les agriculteurs, pour la production des petits pois et la mise en place de nouveaux vergers, notamment par des personnes ayant fait intervenir des relations occultes au sein du ministère de l’agriculture.
    Autre chose: le périmètre irrigué originel, fait pour produire des abricots et des agrumes a vu sa vocation changer au fil du temps, et sa transformation en oliveraie.
    Les sondages creusés sans autorisation sont légion dans la région et, pour une année sèche comme celle-ci, on a assisté au rabattement de la nappe profonde, et dans certaines localités, l’eau n’est plus disponible même pour la consommation humaine. Sa qualité a aussi été détériorée à force de pompage.
    Il fallait demander aux producteurs s’ils paient le moindre sou à l’Etat, puisque les ventes de leurs marchandises se font hors circuit formel…
    Bref, le barrage est sans eau, certes, à cause de la sécheresse, et le surplus d’eau demandé ne servirait pas à grand chose si un plan d’aménagement de l’ensemble du territoire n’est pas mis en place, notamment pour rationaliser la consommation de l’eau et sa destination (en tant que bien public) vers la production de produits faisant partie de la consommation des tunisiens (pour assurer l’auto-suffisance alimentaire), et non pour enrichir des personnes dont le dernier souci et l’intérêt général, ou aussi pour satisfaire les besoins des agro-industriels (tomate et piment, hyper-consommateurs d’eau).
    Ces agriculteurs n’ont pas parlé de la morelle jaune qui envahit progressivement leurs terres et réduit leur fertilité, comme si l’eau à elle seule résoudrait leur problème!
    Le système et le mode de production de cette région sont bien plus compliqués que ne le laisse entendre l’article. Il fallait creuser davantage et poser les problèmes sous d’autres facettes, en plus de mettre les acteurs face à leurs responsabilités.

  3. 3
    Sputnik

    pas de problème en Israel, plus aride que vous … ils ont de la chance: pas d’ingénieur principal à 23 ans !!!
    ils ont mieux: ing. principal pas avant 40 ou 50 ans … capable de produire des agrumes et mème des poisson en plein désert.

    Israel est un exemple à suivre, pas la France.
    WAKE UP !!!

  4. 4
    wissemtunis

    Très bien. Le problème revient toujours à l’incompetence des responsables et l’absence d’éthique, surtout apres 2011 ou c’est devenu le chaos et la loi de la jungle.

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