Erkiz Hip Hop : Rappeurs tunisiens et français explorent le groove du mezoued

Erkiz Hip Hop innove. Le rap et le mezoued sont l’expression de deux époques différentes mais ont une trajectoire quasiment similaire. Longtemps ignorés voir reniés, aux antipodes de la culture dominante, ces deux registres musicaux sont les invités d’honneur de l’événement. Une fusion des répertoires et des genres chers au coordinateur du collectif Debo, l’artiste hip hop Trappa. En empruntant au mezoued sa mélodicité authentique, le rap apporte ses rimes contestataires au rythme des ornements de la darbouka, loin de la facilité des refrains imbriqués et du sampling simpliste. La forme se veut surprenante et expérimentale, étoffée de sonorités de smooth jazz et d’accents reggae. Imbibés d’un riche background de musiques urbaines et traditionnelles, les artistes d’Erkiz Hip Hop ont offert, aux quelques centaines de personnes présentes, un concert qui expérimente le croisement des genres et des disciplines. Mention spéciale pour l’instrumentation réalisée par Jihed Khmiri, réunissant une pléiade de percussionnistes aux bendirs et aux darboukas, un bassiste, un guitariste, un claviériste et un batteur.

Dans une esthétique musicale et citoyenne atypique, la scène émergente tunisienne montre une de ses facettes les plus méconnues, à la fois joviale et enragée. Pour les rappeurs, « c’est un vrai challenge », nous confie Belhassen, rappeur tunisien porte-drapeau du tandem Empire. Le même terme est utilisé par Mombi du groupe marseillais 3ème Œil. En effet, le mezoued se joue sur des gammes spécifiques et a son propre mode rythmique. C’est donc un véritable tour de force pour les compositeurs de cette création et pour les rappeurs. Oui, car il faut que ça soit « rapable », lance le percussionniste Malek Ben Halim après le concert.

Néanmoins, sur la forme, cette création n’est finalement qu’une suite de morceaux alternant les prestations de duos franco-tunisiens pas toujours convaincants. Un décalage s’observe entre rappeurs tunisiens et français, certains bien moins à l’aise dans cette fusion. Dilué dans une approche institutionnelle, le concept semble avoir été condamné à être formaté, à force de pousser vers la collaboration entre artistes des deux rives de la Méditerranée au détriment de l’harmonie entre leurs styles. Par exemple, le contraste est frappant entre deux rencontres de deux artistes français avec le même rappeur tunisien. Si Demi Portion a trouvé en Vipa un acolyte au flair aiguisé, Ichon a sombré et n’a pas su attraper les bouées de sauvetage lancées par Vipa.

Cependant, si ce projet si ambitieux n’est pas tout à fait abouti, espérons que ce n’est que le prototype, et qu’il continuera d’être élaboré. Erkiz Hip Hop a inauguré une pratique musicale et scénique qui détonne dans le rap actuel, où les instruments traditionnels peuvent jouer un rôle clé au service d’une musique profondément contemporaine et originale. Un concept inédit à suivre.

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  1. 1
    Bechir Toukabri

    Assurément la “révolution de 2011” n’a pas ouvert des horizons heureux ni crée des styles artistiques de qualité. Elle ouvert la voie au niveau de la musique à la marginalité, à la déviance, à la perversité, à gout artistique glauque et maladif et repoussant pour des gens normalement constitué et au gout très sain.Et puis voilà que l’auteur trouve du génie dans cette fusion entre le rapp et le mezoued. En réalité (Et l’auteur l’a bien montré) le résultat n’est pas une fusion mais une véritable “chakchouka” (ou ratatouille) entre deux genres pervers, glauques et absolument contradictoires.La libération de la création artistique à produit vraiment de la merde.

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