Cette nouvelle augmentation arrive après environ un an de la réduction du prix du litre de gasoil de 60 millimes. Par ailleurs, il n’est que la continuité d’une série d’augmentations qui n’ont pas cessé depuis 2009, ce qui a conduit à une hausse des prix des carburants de 30 % en 8 ans, au moment où le pouvoir d’achat poursuit sa chute.
Prix des carburants en crescendo
Cette série d’augmentations a été entamée en février 2010, sous Ben Ali, avec une décision du gouvernement de Mohamed Ghannouchi de hausser le prix de l’essence de 50 millimes et celui du gasoil de 60 millimes. Une hausse qui se poursuivra jusqu’au mois courant enregistrant une augmentation de 27% en moins de 7 ans. Le changement politique survenu le 14 janvier 2011 n’a pas changé la donne puisqu’un plan de réduction progressive des subventions allouées aux carburants et autres denrées de base a été concocté conformément aux dispositions du plan d’ajustement structurel du Fond Monétaire International (FMI), précédemment adopté par le président déchu et reconduit dans une mouture plus exponentielle.
Fluctuations du marché et déficit de la balance énergétique
L’augmentation continue des prix du pétrole brut sur le marché international durant les dernières années du régime de Ben Ali et celles qui ont suivi sa destitution a influencé les prix des produits pétroliers en Tunisie, au point d’atteindre environ 115 dollars pour le baril de pétrole brut en 2014, parallèlement avec la dégradation continue de la situation économique. Le besoin de s’adapter à cette conjoncture a amené l’Etat à procéder à des augmentations successives afin de rattraper le déficit de la balance commerciale énergétique et les pertes de la caisse de compensation. En revanche, la diminution des prix à moins de 45 dollars pour le baril a permis au gouvernement de bénéficier d’une certaine marge de confort en 2015 et 2016. Ce qui explique la légère réduction du prix de l’essence de 20 millimes au début de l’année 2016, et de 110 millimes pour le gasoil, répartie sur deux échéances, durant la même année. Des changements qui auraient dû être bénéfiques aux budgets publics après la baisse des subventions aux carburants et la tendance positive au niveau de la balance commerciale pétrolière, et par conséquent, la diminution de la pression sur le taux de change et les réserves en devise surtout que l’Etat a annoncé le début de la régulation automatique des prix de certains produits pétroliers. Sauf que la dernière augmentation est intervenue en porte-à-faux de la réalité du marché international. C’est que le prix du baril n’a pas dépassé les 50 dollars conformément aux prévisions budgétaires du gouvernement pour 2017.
Contradictions gouvernementales
Les premiers signaux de la dernière augmentation des prix des produits pétroliers ont été émis au moment de l’aggravation de la crise à El Kamour à Tataouine, simultanément avec la fermeture de la vanne du champ de production pétrolier. Le Ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi Imed Hammami a préparé le terrain à cette résolution en annonçant le 31 mai dernier que « le gouvernement pourrait se retrouver contraint à augmenter le prix des carburants suite au blocage de la production et du pompage du pétrole à Tataouine à cause du sit-in d’El Kamour ».
Pour sa part, Fadhel Abdelkefi, ministre de l’Investissement et de la Coopération internationale qui assure l’intérim au ministère des Finances, a affirmé que l’augmentation récente de l’essence et du gasoil est un pas préparé à l’avance depuis le projet du budget de 2017. Il a également lié cette dernière hausse à la nécessité de combler le déficit croissant de la caisse de compensation surtout suite à la dégradation de la valeur du dinar tunisien et la montée des coûts de l’importation du pétrole. Toutefois, la dernière augmentation ne peut être sans rapport avec le plan d’ajustement structurel du FMI et la deuxième tranche de son prêt qui a appelé dans son communiqué du 12 juin à accélérer la mise en œuvre des points stipulés par l’accord du prêt dont la révision de la subvention aux carburants.
Opposition de l’UGTT
La récente augmentation du prix des carburants a suscité l’indignation de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) qui a exprimé son opposition à cette mesure dans son communiqué du 04 Juillet 2017, la qualifiant d’« excessive » et « sans justification économique ». Le bureau exécutif de la centrale syndicale a même considéré cette hausse comme « un maillon dans la chaine des coups portés à l’économie tunisienne venu après avoir poussé le dinar à l’effondrement et augmenter le taux d’intérêt et autres mesures libérales qui ne servent que les capitaux étrangers, paralysent l’exportation, engloutissent les entreprises dans le déficit, aboutissent à les fermer ou les démanteler et donc perdre des milliers d’emplois ». L’opposition de l’UGTT à cette mesure gouvernementale pourrait s’expliquer par ses répercussions sur différents secteurs économiques, de quoi déstabiliser le système de production dans son ensemble. Un scénario perçu par l’organisation syndicale comme une manœuvre gouvernementale pour se désengager de l’accord des augmentations salariales et « la vider de tout sens » comme conséquence à la hausse imminente dans tous les produits et les services liés au secteur des carburants.
L’article nous laisse sur notre faim. Pourtant le titre était alléchant.