A l’ombre des anciennes promesses renouvelées, les discriminés politiques ont exigé la signature d’un accord définitif et péremptoire prenant en compte les résultats des négociations avec le gouvernement. C’est ainsi qu’ils bénéficient du soutien de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT). La centrale syndicale a déclaré, dans un communiqué, avoir incité le gouvernement à « se charger de la question du chômage en répondant favorablement aux exigences des discriminés politiques », lors de la réunion de son secrétaire général Noureddine Taboubi avec le chef du gouvernement, tenue mardi 1er août.

3 grèves de la faim et une série d’atermoiements

Depuis fin décembre 2015, les discriminés politiques ont entamé une série de protestations, dont trois grèves de la faim. Le premier des accords a été signé avec le gouvernement Essid le 18 Janvier 2016, incluant la régularisation du dossier dans les sept mois, mais la modification de l’équipe gouvernementale et la démission du gouvernement Essid en août 2016 a retardé la concrétisation des points figurant dans l’accord. Avec l’arrivée du gouvernement Youssef Chahed, c’est Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et les organisations des droits de l’homme, qui s’est emparé du dossier. La relation entre les discriminés et le nouveau ministre s’est vite envenimé, après que celui-ci ait qualifié leurs revendications d’inacceptables. C’est dans ce contexte que la seconde grève de la faim a été entamée le 26 décembre 2016, poussant le gouvernement à chercher des solutions de sortie de crise. Abid Briki, ancien ministre chargé de la fonction publique, a donc été chargé du dossier. Celui-ci, à la suite d’une visite au local où se déroule la grève, a promis de recruter toutes les personnes y participant dans la fonction publique.

Cette visite, largement médiatisée, a poussé les discriminés politiques à suspendre la grève et reprendre les négociations. Cependant, Abid Briki a été démis de ses fonctions deux semaines plus tard, le 25 février 2017, un retardement de plus pour ce dossier. L’affaire a été transférée au ministère chargé des relations avec l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP). La première séance de négociation s’est donc tenue avec Iyad Dahmani, nouvellement chargé du dossier, le 30 mars 2017, suivie d’une autre le 24 avril entre le chef du gouvernement et deux représentants du Front Populaire et du Mouvement du Peuple. Lors de cette réunion, Youssef Chahed a promis de régulariser l’ensemble du dossier et tenir un conseil ministériel sur le sujet, ainsi que d’entamer le recrutement de juin à fin décembre 2017. Promesses, une fois de plus, non tenues. S’en suivi une autre série de protestations qui s’est soldée par une autre grève de la faim clôturée le 08 août.

Influences politiques et conséquences

Cette voie parsemée de promesses officielles a laissé dans les rangs des discriminés politiques un sentiment d’absence de volonté des gouvernements précédents, surtout que l’affaire a fait l’objet de certains tiraillements politiques avec l’instabilité de la formation gouvernementale et la multiplication des ministres et responsables chargés du dossier. Ce contexte a affaibli l’engagement de chaque gouvernement de régler le dossier, et a soumis celui-ci aux considérations muables du pouvoir. En plus, l’appartenance de la majorité des discriminés à une certaine famille politique, principalement le Front Populaire, a servi de prétexte au pouvoir afin de transformer un dossier social en une affaire de tension partisane. Ainsi, Nidaa Tounes a joué un rôle important dans l’atermoiement du dossier sous prétexte qu’il bénéficie à un parti politique opposant. S’ajoute à cela le caractère conservateur de la bureaucratie administrative qui a noyé le dossier dans les abysses des procédures et l’a dispersé sur plusieurs ministères et départements. Et ce, sans oublier les luttes non-avouées avec les nouveaux ministres, à travers la non-préparation des rapports et l’entrave à l’exécution de certains points techniques.

Bien que la cause ait été soutenue par certains partis politiques et organisations nationales, c’est bien le soutien récent de l’UGTT qui représente un tournant poussant le gouvernement à entreprendre de sérieux nouveaux pas. Ce soutien a été annoncé au cours d’une séance ayant réunie, le 27 juillet 2017, le secrétaire général, Noureddine Taboubi et deux représentants des discriminés politiques. Taboubi a promis d’intervenir pour la régularisation de la situation des discriminés dans les plus brefs délais. Cette politique s’est vue concrétiser lors de la réunion de l’UGTT avec le chef du gouvernement, mardi 1er août, au cours de laquelle le syndicat a pressé le gouvernement de trouver une issue à la crise. Malgré l’aveu de la légitimité du dossier des discriminés politiques par la majorité de la classe politique, y compris au sein du pouvoir, le gouvernement entretient un certain flou en s’abstenant de signer des accords officiels.