Rafraîchissant la mémoire des amnésiques: ce premier président, issu de la fameuse Constituante qui instituait un régime présidentiel « new-look » censé tourner la page des présidences caudillo, était fier, au moment de son élection, d’avoir écrasé son adversaire Marzouki, avec un score sans appel et une majorité présidentielle réunie au sein de l’auberge espagnole: Nida. Cela remonte à l’euphorie de la « victoire » de 2014. Depuis, l’auberge du président a quasiment implosé. Et ce, dès les premières heures où les appétits de pouvoir et leurs retombées sonnantes et trébuchantes ont rendu la cohabitation entre les différentes factions impossible. S’en est suivi la trouvaille du « gouvernement de consensus national » présidé par Habib Essid, puis celle du « gouvernement d’union national » du fringant Chahed.
Personne ne releva, qu’en l’espèce, nous étions exactement en train de répéter le scénario déjà exécuté par Ennahdha lorsqu’elle opta, afin d’atténuer l’ampleur de son échec à gouverner, pour un gouvernement de « technocrates » sous la férule d’un « expert » tout droit parachuté par les « pétroliers », nous avons nommés: Mehdi Jomâa et sa « diplomatie du méchoui ». Le nouveau premier ministre, Chahed, avait pour ordre de former un gouvernement où toutes les coteries politiques auraient droit à un strapontin. Cela avait l’avantage de vite faire oublier la débandade de la maison mère Nida et, en passant, faire porter la responsabilité d’un scénario d’échec, entrevu dès l’accession de notre Béji et sa smala aux affaires, au nouvel attelage politique. Le programme rédigé, selon les dires du candidat Béji, par « plusieurs centaines d’économistes », appuyés sur tout ce que le pays compte de « spécialistes » et d’« experts », n’a pas connu l’once d’un début de réalisation. Les promesses ou les tours de prestidigitation n’engageant que ceux et celles qui y ont cru.
Comble de la situation, nous assistons, depuis l’éclatement de l’auberge présidentielle, à cette situation cocasse où la deuxième auberge; que d’aucuns continuent à vanter la hardiesse de son cheikh et la discipline quasi stalinienne de ses cadres, nous avons nommé Ennahdha, sortie exsangue d’un exercice gouvernemental d’à peine deux années. Là aussi, nous avons pu mesurer le vide sidéral d’un « programme », rédigé, lui aussi, par une ribambelle de « spécialistes » et d’ « experts », avec cette promesse insensée de créer plus d’un demi-million d’emplois. C’est aujourd’hui, paradoxalement, l’auberge frèriste qui sert de béquille. Elle tente d’empêcher que le locataire de Carthage, son protégé de la Kasbah et leur attelage gouvernemental de connaitre une crise profonde. Celle-ci ouvrant la voie à un véritable effondrement du système dans une configuration géopolitique où les Frères Musulmans ne sont plus en odeur de sainteté auprès de leurs ex-mentors et soutiens financiers wahhabites.
C’est la piqûre de rappel, que nous sommes bien dans une séquence de révolution permanente à l’échelle du petit Etat tunisien et, plus largement, à l’échelle de l’ensemble arabe. Cela a l’avantage de clore, définitivement, les bavardages sur les possibles colmatages du système avec des « réformes structurelles », fussent-elles concoctées et achalandées par les têtes pensantes des grandes institutions financières.
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