Sous l’ombre du portrait, les peintures d’Ibrahim Màtouss font du clown leur allié le plus sûr. La grammaire plastique se réinvente ici d’un tableau à l’autre en troquant la toile tendue contre la chaire de bois. Dans « Métamorphosis », son exposition personnelle qui se poursuit jusqu’au samedi 31 décembre à la Galerie A. Gorgi, le plasticien démaquille les visages et crucifie les corps en les précipitant à des vitesses opposées. S’ils prêtent leur grâce mélancolique à plus d’un regard, ces clowns ne déposent jamais leurs gros nez rouges au vestiaire.
Haythem Zakaria : le dessin à coups de points !
La pensée, la vraie, s’éprouve à coups de marteau. En matière d’art, le dessin ne déroge peut-être pas à la règle. A cette différence près qu’il gagne à s’exercer à coups de points. Et ce n’est sans doute pas Haythem Zakaria qui le démentira. Dans Ruthmos, sa nouvelle exposition, il ne faut pas attendre un tour de taille-crayon de plus, comme chez les dessinateurs en mal de grand art, pour que le geste soit d’une rare lucidité. La mesure d’un métronome, les coups d’un feutre pigment ou d’un tampon encreur suffisent au contraire à percer le mur de la fascination.
« Mnēmē » de Nidhal Chamekh : l’art par temps de détresse
Se faire le chiffonnier de la mémoire des luttes. Nidhal Chamekh ne recule décidément plus devant cette tâche qu’il s’est fixée depuis « De quoi rêvent les martyrs ? » (2011). Mais à quel temps décline-t-il cette mémoire dans « Mnēmē », son exposition à Selma Feriani Gallery (29 octobre – 12 novembre 2016) ? D’une main, il ramène la virtuosité du dessin à un principe de délicatesse. De l’autre, il accorde la rémanence des formes et des luttes au retour du refoulé, où l’image se peuple de fantômes. Entre deux mains qui s’alternent, c’est la pratique du montage qui permet à Nidhal Chamekh de prendre la mémoire à rebrousse-poil.