Les articles publiés dans cette rubrique ne reflètent pas nécessairement les opinions de Nawaat.

A ce qu’il parait Hamadi Jebali a eu une attaque cardiaque. Peut être que son malaise a été accompagné d’une vision qui l’a incité à opérer des choix qui peuvent nous paraitre inadmissibles, autrement, je ne trouve pas d’arguments autres que ceux dénotant une malveillance perverse et de mauvaises intentions, un peu comme la réticence de nos politiques face au concept de l’open gov. Rabbi Yechfih…

Il est totalement admis et accepté que le chef du gouvernement nomme par lui même, les directeurs des médias publics, après tout, ce sont des organes de l’état.

Un samedi après midi, au moment où tout le monde était embourbé par la question des salafistes, calife Jebali nous honore avec des nominations qui soulèvent une multitude de questions.

Nous n’allons pas revenir ici sur les parcours de ceux fraichement placés a la tête de l’islameyya 1- excusez le lapsus- de la wataneyya 1 et 2 ou du journal la presse, mais nous allons plutôt essayer de réfléchir sur les raisons et les motivations derrière de telles décisions.

Pour commencer, il est important de savoir qu’au delà de l’argument absolu de la religion qu’a utilisé Ennahdha durant toute la compagne électorale, le parti vainqueur a aussi joué la carte de la rupture avec le passé. Je m’explique : ceux qui n’ont pas adhéré à Ennahdha parceque c’est un parti religieux, l’ont fait en se disant que, des gens ayant souffert de la répression violente, croupi en prison et vécu la torture et l’isolement durant des années, allaient surement rendre la monnaie de sa pièce à leur tortionnaire : l’ancien système de Ben Ali.

Au lieu de cela, si Jebali a offert des postes sensibles (de prestige) à des personnes qui excellent dans l’art de la propagande.

Pour un peu caricaturer la scène: quand les nahdhaouis et les autres prisonniers d’opinion attendaient la mort en prison, ces experts en maquillage de la réalité, louaient les mérites de l’instigateur du changement et décrivaient tout l’amour que lui portait son peuple en cachant au passage, la triste vérité. Vous allez me dire qu’ils y étaient contraints, je reste convaincu que ce n’est qu’un abandon des valeurs et principes personnels et une course derrière la richesse et le prestige. Et oui, un an après ledépart de Ben Ali, nous avons déjà la mémoire courte et avons oublié que la dictature avait instauré un système basé sur la compétition : Celui qui vante les mérites, rend hommage, flatte, remercie, reconnait, applaudit, lèche est celui qui sera valorisé parmi les siens. Il y avait donc des cancres et des premiers de classe. Jebali a promu les meilleurs. La valorisation de la médiocrité. Peut être que le chef du gouvernement n’a pas voulu gâcher de tels talents, il est rare de trouver de telles compétences après la révolution et, on le comprend ! De plus, nous n’avons eu droit à aucune explication, aucun argument ayant motivé ces choix insensés n’a été communiqué. Devait t-on juste accepter le sort et fermer notre gueule ? Maktoub…

Essayons de nous mettre pendant quelques instants à la place du premier ministre, essayons de comprendre son geste déraisonnable : vous êtes dans votre grand bureau tout neuf et vous devez choisir des noms pour des postes clés concernant des medias ayant une grande influence sur la majorité des tunisiens. Pendant que votre président attirait tous les regards vers lui à coups de dérapages médiatiques, vous aviez eu le temps et le calme nécessaires autour de vous pour opérer un choix raisonné. Après des jours de consultations, après avoir envisagé toutes les possibilités, alors que l’économie du pays est à genoux, alors qu’on attendait de votre gouvernement des réactions face aux multiples grèves et sit in, devant la montée de la violence, après l’atteinte à l’intégrité et à l’honneur de nos universités, vous décidez de recycler les anciens protégés de Zaba ! A-t-on cherché à nommer des responsables ou à semer la pagaille au sein des tunisiens ? A croire que les vives réactions qui ont suivi le maintien de H.Essid dans le gouvernement provisoire, n’ont nullement touché notre premier ministre préféré. Ce dernier s’était d’ailleurs plaint il y a quelques jours, de la virulence des médias envers ennahdha, sans oublier la fameuse affaire du quotidien « le maghreb ».

Quel est donc le but derrière ces nominations ? Supposons que ces personnes soient les seules qui puissent occuper ces postes en Tunisie. Dans ce cas précis, soit le gouvernement n’a pas pu prévoir ou mesurer la réaction du peuple face à ces choix, ce qui serait aberrant et dénoterait d’une incompétence intolérable et d’une totale déconnexion avec le terrain, soit on nous prend pour plus imbécile que ce qu’on est déjà.

Que dire de ceux qui ont tenu tête aux journalistes venus contester ces nominations lors des manifestations place el Kasba? Surement fussent-ils motivés par la nostalgie des beaux jours et la douceur de vivre sous la dictature.

On se sent insulté, touché dans notre amour propre. A quelques jours du 14 Janvier, alors qu’on s’apprêtait à célébrer fièrement le premier anniversaire de notre révolution, ces décisions sont tombées comme un couperet, une véritable honte pour les martyrs qui, l’année dernière au même moment, faisaient face aux chiens sauvages de Ben Ali.

« Les tunisiens devaient juste voter, le reste on s’en occupe ! »

Un gouvernement passif devant les faits graves auxquels on assiste quotidiennement mais bien présent quand il s’agit de verrouiller l’information ou de modifier les lois en sa faveur, ceci n’est pas de bon augure.

Cette impression frustrante de ne pas pouvoir participer à la reconstruction du pays devient de plus en plus pesante. Aujourd’hui le rôle de la société civile tunisienne consiste à arrondir les angles, limiter les dégâts, un peu comme un gardien de but dans une équipe composée de joueurs lamentables.

Merci à tous ceux qui sont allés dans la rue pour contester ces décisions et heureusement que le gouvernement est revenu sur ses décisions.

Maintenant, plus que jamais, la grogne du peuple commence à se faire sentir. Arnaqués, humiliés, dirigés par des incompétents qui insistent sur le fait qu’ils ne sont pas aussi provisoires que ca, la confiscation de la révolution devient une crainte légitime.