Les fins de semaine sur le mode vendredis du plébiscite VS samedis de l’opposition se suivent et se ressemblent en Tunisie. Face à une opposition incapable de transformer l’essai, le nouveau credo du pouvoir semble se résumer désormais à « cause toujours ». Nous sommes face à ce qui ressemble de plus en plus à une authentique guerre d’usure.
Et si le ver était dans la pomme ?
Mardi 3 septembre, les chancelleries occidentales continuent à s’enquérir de la suite des évènements à Tunis. Cette fois, c’est la ministre italienne des Affaires étrangères qui a fait le déplacement. Après s’être entretenue avec une délégation d’Ennahdha présidée par Rached Ghannouchi, Emma Bonino ne s’y trompe pas : c’est Béji Caïd Essebsi et Mohsen Marzouk, responsable à Nidaa Tounes des relations extérieures, que la ministre reçoit en guise de représentants de l’opposition, ou plutôt de « l’autre camp ».
Cette diplomatie parallèle, Nidaa Tounes l’affiche et s’en vante sur les réseaux sociaux. Cet état d’esprit triomphaliste, c’est probablement l’une des raisons de la déroute des négociations politiques, un mauvais feuilleton qui vaudra aux journalistes et paparazzis de rentrer bredouille jour après jour durant la semaine écoulée.
Mercredi, puis de manière plus officielle jeudi, c’est la coalition du Front du salut national qui décide quasi unilatéralement de mettre fin à ce petit manège stérile, estimant qu’en face, ses interlocuteurs de la troïka la mènent en bateau depuis le départ.
Là encore c’est le siège de Nidaa, aux Berges du Lac, qui abrite la conférence de presse annonçant l’arrêt des pourparlers, comme pour mieux signifier, si besoin était, que « c’est ici que ça se passe ». Le communiqué qui en émane ainsi que la teneur des propos des intervenants laissent entrevoir que le Front du salut entendait négocier en position de force : on y parle « d’imposer » ses solutions et de repasser par la rue, en évoquant déjà les commémorations du 40ème jour du décès de Mohamed Brahmi.
Et ce que l’on a observé à cette occasion samedi confirme ce degré de mainmise Nidaa sur le sit-in du Rahil. Flanqué de son fils et stratège Hafedh, Béji Caïd Essebsi osera cette fois haranguer la foule rassemblée au Bardo. Il se convertissait même au jargon de la gauche, entre deux bégaiements convenus, évoquant « les camarades Belaïd et Brahmi » et la « glorieuse révolution ». Un cas d’école de récupération politique qui ne semble pas gêner les veuves des martyrs.
Le semi bide que fait Essebsi trouve son explication quelques heures auparavant, lorsque des slogans explicitement hostiles à Nidaa Tounes retentissaient lors de la marche de Bab Saâdoun : « Ennahdha et Nidaa, associés dans la tyrannie », ou encore « Pas de place à la droite dans les luttes des classes laborieuses ». Ils émanent de la tendance la plus socialiste de la famille politique de Brahmi. Le même cortège contenant des militants et banderoles Nidaa, rarement marche n’aura été aussi hétéroclite, diverse jusqu’à la contradiction, sans parler des drapeaux du régime syrien et des quelques portraits de Bachar al Assad.
Le pouvoir ne fait pas mieux
Côté troïka, c’est Mustapha Ben Jaâfar qui est envoyé au casse-pipe mercredi, lors d’un périlleux exercice télévisé où rien de nouveau sous le soleil ne sera annoncé. Décidé quelques jours à l’avance, le discours du président de l’Assemblée, optimiste, n’était sans doute pas pensé pour être lu dans le contexte d’une pareille débandade générale.
Néanmoins, Ennahdha et le CPR ne font pas la fine bouche, en saluant de concert « un pas dans la bonne direction ». C’est qu’en réalité la majorité parlementaire met l’appel de Ben Jaâfar à regagner les rangs de l’ANC dans le cadre d’un plan plus global : Ennahdha a mis à profit ces semaines de tergiversations pour mimer l’opposition, en se réorganisant à son tour, mais aussi en reprenant les mêmes erreurs que le Front du salut national.
Ainsi le voile était levé le 6 septembre sur l’« Alliance nationale pour la réussite de la transition démocratique », une coalition inédite de 12 partis, ou plutôt de 11 micro partis + … Ennahdha. Il n’aura pas échappé aux observateurs que là où le FSN est dominé par l’hégémonie Nidaa, la manœuvre est encore plus grotesque dans le cas de cet autre front où le parti au pouvoir éclipse tous les autres par sa simple présence.
Les aléas de la vie et de la mort ont voulu qu’Ennahdha ait cette même semaine son propre martyr, Ahmed Bargaoui, membre du Conseil de la Choura, décédé par noyade en Turquie, d’où il a été rapatrié. Ses funérailles samedi ont donné à voir un parti soudé autour de Ghannouchi à Monastir, pourtant fief du bourguibisme s’il en est.
Tout laisse à penser en revanche que vendredi dernier était la dernière ballade de santé pour les partisans du parti islamiste à la Kasbah. Chargé du « volet anar’ » de la contestation sur le terrain malgré les réticences du conservateur Essebsi, le Front populaire a annoncé via Hamma Hammami qu’à partir de lundi 9 septembre, l’esplanade de la Kasbah serait occupée par les siens, en vue d’une « escalade finale ».
Sur place, les procès et convocations d’artistes et d’hommes de médias ayant lieu dans les parages devraient aider à la mobilisation.
Au bout du tunnel, un horizon bouché
Mis devant le fait accompli, le quartet syndicats-ONG présidé par l’UGTT est contraint de reconnaître l’évidence d’un échec retentissant. Le gouvernement Larayedh ne démissionnant pas avant 4 à 8 semaines, l’initiative de la centrale syndicale n’a jamais été prise au sérieux. Tandis que l’opposition campe sur un délai fixé à 2 semaines max.
A quoi riment ces querelles techniques de calendrier ? En un mot : les élections. La phobie électorale est telle de part et d’autre que le simulacre de dialogue national n’est en somme qu’une partie d’échec où prévalent opacité, procès d’intention et coups fourrés.
Abdellatif Mekki accuse le Front populaire de vouloir retarder les prochaines élections d’une année entière, histoire de reconfigurer les pouvoirs régionaux, nerf de la guerre de tout scrutin national. Zied Lakhdhar ne dément pas réellement, suspectant quant à lui Ennahdha de vouloir expédier les élections pour les mêmes raisons, tant que le dispositif nahdhaoui est solidement en place en régions.
Le Tunisien moyen, l’électeur, se trouve donc face au spectacle cynique de partis qui s’assoient à la même table tout en se considérant les uns les autres comme « putschistes » et « tueurs ». Aussi anecdotique que cela puisse paraître, la malédiction a voulu que son équipe nationale soit de surcroît sortie à domicile de la coupe du monde. Gare à un peuple poudrière, privé de spectacle, trahi par ses élites politiques.
[…] Revue politique de la semaine écoulée par Nawaat […]
Nous sommes le 22 septembre 2013.
Une fois encore
La situation en Tunisie exige un réel dialogue pour un réel consensus entre les partis politiques:
– 1: Ennahda comme parti politique, ne parait pas être en crise, ni en situation de schizophrène.
Les partis de la Troïka, comprennent les inquiétudes de l’opposition. Mais les efforts de l’écoute, pour le consensus et autour du dialogue doivent être de deux côtés. Nous sommes en phase transitionnelle, et nous devons s’écouter davantage. Ennahda, le CPR, Ettakatoul et leurs alliés ont fait les efforts nécessaires.
– 2 : Le gouvernement essaie d’avancer essentiellement sur trois grands axes :
sur le plan des grandes politiques ‘’politiques publiques, dans le transport, la santé, l’infra structure, les écoles/collèges/lycées, les solidarités avec les plus précaires, la guerre contre le terrorisme, les prix dans le marché, la place de la Tunisie dans le monde,…’’. Sur ces volets, les citoyens et les visiteurs qu’ils sont des touristes ou des tunisiens de la diaspora qui sont rentrés cet été, l’ont constaté.
Et sur ‘’les politiques envers les entreprises et l’investissement’’, des facilitations aux entreprises d’investir, d’embaucher… Il y a pas mal d’avancées malgré toutes les difficultés (fiscalité,…). Un grand travail sur le climat favorable à l’investissement et au tourisme, est fait… Ok, il reste beaucoup à faire. Et chacun pourra apporter sa petite ou grande contribution.
Aussi le gouvernement essaie d’avancer sur le volet de la cohésion à plusieurs niveau et surtout, dans le domaine des institutions sécuritaires (police républicaine, armée républicaine, une douane qui fait son travail). Oui il y a des changements positifs. Mais il faut le dire il reste beaucoup à faire, surtout au niveau de la corruption. Les citoyens eux-mêmes pour des simples oublis ‘’de papiers d’assurances’’ oubliés à la maison (…), préfèrent donner un billet que se faire allumer par un procès verbal (la voiture n’est qu’un exemple parmi d’autres). Idem à la douane (la culture de la petite corruption a bien augmenté plus qu’avant, et des fois rien d’ordre spécial ou grave ‘’ni stups ni armes’’). Sur ces volets on a tous beaucoup à travailler. C’est de notre responsabilité conjugué (citoyen, service public, gouvernement).
– 3 : le volet de la justice transitionnelle, dérange beaucoup. Ok, on le comprend.
Sauf que la Tunisie de la révolution ‘’la nouvelle Tunisie’’ n’est pas là pour tuer ni appauvrir, ni asservir ni esclaver.
Il s’agit tout simplement d’un procédé légitime et tout à fait naturel par le fait de la révolution. C’est à tous les tunisiens de se dire les choses. Le rôle du gouvernement, est de mettre un ensemble de monde autour de la table, pour proposer se qui fera justice, réhabilitation, nouvelle règles de fonctionnement pour les services publics à tous les niveaux pour finir avec la corruption des valeurs et des relations économiques, commerciales… et en final réconciliation nationale. La tunisie appartient à nous tous, elle n’est la propriété de personne ; en tunisie il n y a pas des propriétaires et des locataires, nous sommes tous et toutes citoyens, libres et égaux.
Sur ce sujet de la justice transitionnelle, il ya eu en deux ans des multiples conférences et forums. Donc surement il y a un certain nombre des bonnes idées qui ont émergé et qui pourront aider à faire aboutir ce volet.
– 4 : Il est regrettable que l’opposition ‘’le front populaire et ses contours’’ , avec l’appui de ‘’nida tounis ‘’ « parti constitué après les élections du 23 octobre 2011 » et les anciens du régime, et avec l’appui des lobbys d’intérêt qui se sont constitués pendant la dictature (sous la base des relations d’intérêt étroit et même mafieux, et avec comme repères , la corruption des valeurs), s’obstine sur des positions incompréhensible, pour un démocrate. Cette opposition dite de gauche, laïque, moderniste, après les résultats des élections de 2011, a délaissé les objectifs de la révolution (liberté, dignité, travail, démocratie, réconciliation nationale, vivre ensemble…), pour partir sur un chemin parallèle qui coupe court avec le consensus et la vie démocratique mature. Et elle a engagé un travail de mise à cahot, même si cela pourra provoquer un ébranlement total de la situation. Les actuelles déclarations de l’UGTT (menace de grève générale) après que les différents rencontres ont abouti à l’acceptation par tous du dialogue national sans exigences préalables et avec la proposition du quartette, qui est à affiner pour qu’elle puisse être appropriée par tous les partis.
– 5 : Durant les deux dernières années, Ennahda et la Troïka en général, a/ont une part de responsabilité. Normal ils sont au pouvoir, et c’est aussi aux partis au pouvoir d’anticiper certaines actions.
– 6 : Au jour d’aujourd’hui, du moment où la responsabilité est partagée, pourquoi, s’éloigner de la porte de sortie, du moment où il ne reste qu’un pas ? A quel honneur le soir même de l’acceptation d’Ennahda, et des partis de Troïka, de s’assoir à table pour le dialogue national, et de discuter de la proposition du quartette, le tous s’effrite, avec des déclarations de guerre contre l’économie et la tranquillité publique ?
– 7 : A mon petit et humble sens, l’opposition ne souhaite pas discuter d’une feuille de route sur la quelle est inscrit l’expression ‘’prochaines élections’’, même si c’est elle qui la écrit. L’opposition est essentiellement ‘’un grand nombre du front populaire’’, ne souhaitent pas des futures élections. Les élections ne font pas partie de leur projet partagé.
– 8 : Notre quartette (l’UGTT, l’UTICA, la ligue des droits de l’homme, l’union des avocats), ne sont pas dans le jeu politique, ils sont dans la médiation/proposition. Prendre des initiatives (militantes), pour exiger (je ne sais quoi) est du ressort des partis politiques. Ok, nous sommes en révolution en continu, ok, nous avons beaucoup à faire encore pour la réalisation des objectifs de la révolution, la justice transitionnelle, construire l’état civil, neutre transparent et pour tous,… mais en aucun cas les tunisiens ‘’leur très grande majorité’’ accepteront que la société civile devient un acteur politique directe au service des partis politiques. Nous ne vivons pas actuellement sous une dictature, ben Ali harab, le RCD dégage, il est dissout, le parti unique va te faire foutre à vie ; c’est fini tous ça. Nous sommes gouvernés par une alliance représentative et grandement représentative. Il ne s’agit pas d’un jeu d’enfant. Nous sommes dans une phase de construction démocratique, il faut la démocratie, il faut le consensus, il faut la bonne volonté. La Tunisie n’ira plus jamais dans le sens du parti unique qui fera état et société au même temps comme c’était le PSD et le RCD. Mr le martyr Bouazizi et ses frères martyrs ont enterré définitivement le parti qui fera état et société. Fini les solutions universelles, uniques, globales, de gauche ou de religion, ou de pingouins.
– 9 : Nous n’avons pas le choix, osons la démocratie. Osons le dialogue, nous avons beaucoup à gagner en s’écoutant les uns et les autres. Dissipons les peurs.
– 10 : Le peuple ne pardonne jamais à ceux qui menacent son économie et sa tranquillité publique et sa sécurité. Il y a un état, et il doit être responsable.
Ben Ali harab. Mandhouj Tarek.