point-exclamation

Comme à l’issue de l’attentat du Bardo, nous rappelons encore une fois que le massacre d’aujourd’hui ne sera pas le dernier. D’autres attentats auront encore lieu et d’autres victimes tomberont sous les coups ignobles des barbares et des lâches.

Aussi cyniques mes propos soient-ils, les attentats font partie de la vie des démocraties. Nous devons apprendre à vivre avec. Et parce que nous sommes « la vie » et eux, les barbares, que mort et destruction, nous devons continuer à vivre sans jamais renoncer à cet idéal de démocratie auquel nous aspirons. Nous y renoncerions… et c’est justement ce que cherchent à atteindre les auteurs des actes barbares !

De même, faut-il souligner que ce qui distingue les citoyens ordinaires des responsables politiques, c’est le fait que l’on exige des seconds un minimum de lucidité, de retenue et de clairvoyance, notamment et surtout durant les événements tragiques d’une gravité exceptionnelle.

Et c’est durant pareilles circonstances que l’on distingue les personnes à la carrure des grandes femmes ou des grands hommes d’État. L’attentat d’aujourd’hui (28 juin 2015), le plus grave de l’histoire de la Tunisie, incarne un de ces événements d’une gravité exceptionnelle, s’avérant également un révélateur qui distingue les hommes à la « vulgaire » carrure de ceux à ladite carrure d’homme d’État !

Au rythme des attentats qui se sont succédé, certaines personnes n’en ont, en effet, raté aucun pour se lâcher, comme pris, à chaque fois, par une sorte de réflexe pavlovien les poussant à tenir des discours parfois ahurissants. Une rhétorique basée sur la « guerre contre le terrorisme », justifiant tous les excès –à peine masquée- en matière d’abus de droit comme des garanties fondamentales.

Oui, nous sommes en pleine « guerre contre le terrorisme » et non point contre la République, ses institutions et les libertés fondamentales qu’elle proclame. Oui, nous sommes en pleine « guerre contre le terrorisme » et non point contre nos propres idéaux démocratiques et les valeurs proclamées et garanties au sein de notre Constitution.

Oui nous sommes en guerre contre les barbares et non point contre nos codes de procédure comme nos lois destinées à protéger les citoyens, à poursuivre les lâches et à sanctionner, d’une façon parmi les plus sévères au monde, les auteurs d’actes terroristes.

Cela semble pourtant évident que la Tunisie est en guerre contre les barbares et non point contre ses propres citoyens ; qu’elle est en guerre contre le terrorisme et non point contre sa propre démocratie.

Or, certains propos que j’ai entendus -cette après-midi et ce soir- de la part de hauts responsables de partis politiques (y compris parmi ceux participant au gouvernement), sont très inquiétants. Des discours, bien qu’évoquant la « guerre contre le terrorisme », relevait davantage d’une croisade contre les institutions démocratiques de ce pays et contre sa Constitution.

Par pudeur, on ne citera pas des noms et on ne rapportera pas certains propos scandaleux, du moins pour ce soir. Le but n’est pas de personnaliser nos propos, mais d’attirer l’attention sur le fait que si nous ne prenons pas garde à pareils discours, il n’est pas impossible que la Tunisie glisse imperceptiblement vers un retour aux pratiques d’un régime que nous avons tous condamné un certain 14 janvier. Et le plus inquiétant, c’est que nous allons encore subir de sévères attentats. Entre temps, si l’on cède à la rhétorique de ceux qui aspirent à sacrifier la jeune démocratie tunisienne au prétexte de la guerre contre le terrorisme, les barbares grappilleraient un début de victoire !

Si la foi en notre démocratie (avec ce qu’elle suppose) vacille devant la foi de ceux qui pensent pouvoir l’abattre, alors le terrorisme aurait atteint un de ses objectifs !