Mercredi 30 septembre 2015, 10 heures du matin. Je me rends à l’Institut supérieur des études appliquées en humanités de Tunis pour couvrir la rentrée universitaire, un événement organisé par l’Union générale des étudiants tunisiens (UGET) sous le titre : « les étudiants ne pardonnent pas ».
Vers 14 heures, une marche de quelques dizaines d’étudiants et de militants de l’UGET se dirige vers le ministère de l’Enseignement supérieur pour dénoncer le projet de loi sur la réconciliation économique et financière et pour rappeler les revendications de l’Union. A quelques mètres de la Place Bab Saadoun, des policiers, en tenue et en civil, interceptent la marche. A coups d’insultes et de coups, ils commencent à disperser les manifestants. Alors que l’équipe de Nawaat était en train de filmer, des agents ont attaqué Mohamed Ali Mansali, journaliste reporter d’images. Ils l’ont empêché de filmer, lui ont arraché sa caméra et sa carte professionnelle, l’ont bousculé, pour le conduire au poste de police de Bab Souika, où toutes les séquences vidéo, faisant état des agressions policières, ont été supprimées. Il a été libéré une demi-heure après. Sa caméra lui a été rendue, sans qu’aucun procès verbal de l’interrogatoire ne soit rédigé.
Entre-temps, j’ai été encerclée par quatre policiers qui ont arraché ma caméra. J’ai beau montrer à mes agresseurs ma carte de journaliste et leur rappeler mon devoir d’informer et l’illégalité de leurs agissements, ils ont continué à m’agresser, à m’insulter à se moquer de la loi. Ils arrachent ma carte de journaliste de mon cou, continuent à me harceler, mais je parviens à m’enfuir grâce à l’aide des militants de l’UGET.
Après la libération de mon collègue, nous sommes allés au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT). Nous y avons déposé plainte et je me suis engagée à porter plainte contre mes agresseurs. Entre temps, Walid Louguini, chargé des relations avec les médias au ministère de l’Intérieur m’appelle. Il me demande de venir à son bureau pour lui expliquer ce qui s’est passé.
A 16h30, je suis allée avec mon collègue au siège du ministère de l’Intérieur. Après avoir écouté les détails de l’agression policière, Walid Louguini nous a dirigés vers l’inspection générale du ministère de l’Intérieur pour rencontrer Taoufik Bouaoun, inspecteur général des forces de sécurité. Celui-ci a également écouté le récit de l’agression que nous avons subie. Il a promis d’ouvrir une instruction interne pour que nos agresseurs rendent comptes de leurs actes. Taoufik Bouaoun a ainsi chargé l’un de ses subordonnés d’ouvrir une enquête et de recueillir nos témoignages. Tout au long de notre déposition, la personne en charge du procès verbal a tenu à rappeler son impartialité. Pour lui, il fallait absolument appliquer la loi à tout le monde et punir ceux qui l’enfreignent, même s’il s’agit de « collègues ».
A 19 heures, après avoir fini de recueillir nos paroles, l’agent nous a assuré que nous allions être convoqués le lendemain pour une confrontation avec les agresseurs. A ce jour, soit plus de sept mois après l’agression, personne ne nous a contactés pour cette confrontation.
Vendredi, 2 octobre 2015, mon collègue Mohamed Ali Mansali et moi sommes allés déposer plainte contre nos agresseurs. Comme nous l’a indiqué Imen Bejaoui, l’avocate collaborant avec le syndicat des journalistes, nous nous sommes dirigés vers poste de police le plus proche du lieu de l’agression, soit celui de Bad Saadoun. Là bas, après-avoir écouté notre plainte, le responsable sécuritaire s’excuse de ne pas pouvoir donner suite à notre demande. Il nous confie que l’affaire est compliquée, qu’elle le dépasse et qu’il ne peut pas instiguer une enquête contre ses collègues. Il affirme ensuite que l’agression ne s’est pas produite dans la zone géographique qui relève de ses compétences et qu’il fallait donc se référer au poste de police de Bab Souika. Je lui réponds que le poste de police de Bab Souika est le lieu où mon collègue a été amené et là où ses images ont été effacées et qu’il était absurde de déposer plainte auprès de ceux mêmes qui nous ont agressés et porté atteinte à la liberté de la presse. Le responsable s’est alors excusé. Pour lui, nous n’avions aucun autre choix.
Nous avons quitté les lieux. Alors que nous attendions un taxi, l’agent nous a rejoints pour nous conseiller d’aller au district de police voisin de son poste et demander à rencontrer le chef du district pour éviter nos agresseurs, rattachés au poste de Bab Souika. Nous avons suivi ce conseil, mais le chef du district de Bab Saadoun s’est excusé sous prétexte que le lieu de l’agression ne relève pas de sa zone de compétence. Il a par la suite préconisé avec insistance de porter plainte directement auprès du chef du district de la Medina.
En arrivant au district de la Medina, nous demandons à rencontrer le chef du district. L’agent d’accueil, nous informe que son supérieur n’était pas là ou qu’il s’apprêtait à partir. Notre insistance sur le caractère urgent et personnel de l’affaire, nous ouvre le passage. Nous sommes donc montés à l’étage où se trouve le bureau du chef du district. Il était étonnant de constater que tous les bureaux étaient vides. Au fond d’un couloir sombre, nous frappons à une porte. Aucune réponse. Nous attendons près de 20 minutes. Un policier en civil est venu nous demander la raison de notre présence. Il est parti puis revenu pour nous dire que le chef du district nous attendait. En franchissant le seuil de la porte, nous sommes abasourdis : le policier qui a empêché mon collègue de faire son travail, qui l’a humilié en lui arrachant sa carte de journaliste et sa caméra et qui a donné les ordres pour confisquer la mienne (comme le montrent nos enregistrements vidéo), n’est autre que le chef du district de la Medina. Il était clair qu’il était au courant de notre présence. Il feint l’étonnement et nous demandant la raison de notre présence. Nous nous sommes expliqués et il nous a demandé de descendre au bureau d’enquête pour déposer notre plainte.
Nous avons attendu le secrétaire pendant plus d’une demi-heure durant laquelle un agent nous a interrogés verbalement. Plusieurs autres policiers se sont relayés au bureau de l’enquête. Certains d’entre eux étaient ceux qui ont supprimé les séquences vidéos de mon collègue. Nous avons été conduits par la suite dans un autre bureau, avec un autre agent qui a posé les mêmes questions. Pour la troisième fois, on nous a introduits encore dans un autre bureau, où un nouveau secrétaire et un autre agent ont recueilli notre déposition.
Commence alors un marathon de questions-réponses. Le procès verbal a été déchiré trois fois. Non seulement le secrétaire commettait plusieurs fautes de langue, plus grave, il a essayé de qualifier mon agression de simple altercation. Après plus d’une demi-heure, un autre secrétaire est venu remplacer le premier. J’ai dû alors tout répéter. Quand ils m’ont enfin donné le PV, il y été écrit que je ne portais aucune trace d’agression physique. J’ai refusé de le signer. J’ai insisté pour que mes douleurs soient mentionnées, comme j’ai exigé une réquisition pour un examen médical.
Sous prétexte d’absence de traces visibles de l’agression, la réquisition m’a été refusée. Je me suis acharnée à revendiquer mon droit à un examen médical. J’avais des douleurs au niveau de la cage thoracique à cause des coups violents qui m’ont été portés par mes quatre agresseurs. Après de longues heures d’interrogatoire et d’attente, ils ont fini par apporter les rectifications nécessaires et par m’accorder la réquisition. Ils m’ont une autre fois informée d’une future confrontation avec mes agresseurs. Certains d’entre eux apparaissent dans le reportage publié par Nawaat. Parmi eux, figure le chef de district de la Medina. A ce jour personne ne m’a contactée au sujet de la confrontation.
Je suis allée ensuite aux urgences de l’hôpital Charles Nicolle. On m’a prescrit un repos de dix jours et des antalgiques. J’ai transmis le certificat médical au président du syndicat des journalistes pour qu’il poursuive la démarche judiciaire.
Ce témoignage n’est ni personnel, ni l’expression d’un cas isolé. Il est emblématique des agressions et des bavures que subissent les journalistes au quotidien. Certains portent plaintes, d’autres préfèrent le silence à cause de l’intimidation. Aujourd’hui, 3 mai 2016, le harcèlement, les agressions à l’encontre des journalistes continuent dans une impunité totale. En dépit de plusieurs plaintes et d’innombrables communiqués de dénonciation, aucune mesure judiciaire n’a été menée à terme, aucun agresseur n’a comparu devant la justice pour rendre compte de ses agissements. Jusqu’à quand ?
Le problème en Tunisie c’est que le pays est dirigé par des singes et que la police tous comme le ministère est formé d’incompétents et de moyens rageux qui applique leurs lois. J’ai eu affaire aussi une fois a la police lors d’un accident impliquant beaucoup de voitures, alors que j’étais en train de filmé l’autoroute et d’un coup un des singes de la police sait cru être une star internationale et a commencé a me harceler et a me demander d’arrêter de filmé. Tout les fait que vous décrivers mérite des sanctions contre les singes de la police. Si j’étais le président de la République ou le ministre j’en ferais un exemple demain matin 08H00 pétante pour que la loi soit appliquée contre les policiers qui se croient au dessus de les lois.