Commentant l’audition publique des victimes des événements de Siliana, l’éditorialiste de l’un de nos principaux quotidiens nationaux, reproche à Sihem Ben Sedrine, la présidente de l’IVD, d’avoir fait preuve de partialité. En donnant la parole, à titre de témoins, à Hamadi Jebali et à Ali Laarayedh, respectivement Premier ministre et ministre de l’Intérieur à l’époque des faits, ainsi qu’à l’ancien gouverneur de Siliana, elle aurait cherché à « protéger » le parti islamiste et à le dédouaner de ses responsabilités dans les atrocités commises à l’encontre des manifestants. Dans un entretien donné à radio Mosaïque, Sihem Ben Sedrine a d’ailleurs répondu à ce type d’accusations.
Mais ne nous y arrêtons pas plus que ça. Une question – indépendante des choix effectués par l’IVD – peut se poser toutefois concernant la dernière audition publique : comment l’opinion publique a-t-elle perçu les interventions des anciens ministres de la Troïka ? Ont-elles atténué la portée des témoignages des victimes ? Il m’est évidemment bien difficile d’y répondre. Pour ma part, dans les tentatives d’autojustification des responsables interrogés, j’ai vu de terribles aveux. Le plus pitoyable, malgré son arrogance, a sans nulle doute été Hamadi Jebali dont le sourire indécent n’a fait que souligner le cynisme.
Oh, certes, ni lui ni Ali Laarayedh ne s’accusent d’avoir eu quelques responsabilités dans le recours à des tirs à la chevrotine et il ne coûte rien de les croire. Il est plausible en effet, sans pour autant en être certain, qu’une telle décision ait été du ressort des responsables opérationnels. Il faut souhaiter que d’autres enquêtes permettent de voir plus clair sur ce point. Mais, quoi qu’il en soit, leur insistance maladroite à amoindrir la gravité des faits de répression à l’encontre de toute réalité montre assez que le choix de la violence la plus brutale pour mettre un terme à la mobilisation populaire émane bien du gouvernement. La rhétorique politique que mobilisent à ce propos les anciens ministres les accuse plus qu’elle ne les disculpe. En substance, nous ont-ils affirmé, leurs efforts pour gérer la crise en douceur et lui trouver une issue négociée se sont heurtés à la détermination de l’UGTT et d’autres forces hostiles à la Troïka, décidées à renverser le gouvernement par tous les moyens. Ces forces auraient manipulé la détresse et l’impatience sociale des habitants de Siliana pour les pousser à l’affrontement, menaçant les institutions de l’Etat, l’intégrité physique des policiers et même la vie du gouverneur de la région. Dès lors, si l’on suit leur raisonnement, l’Etat était en péril et, face à la violence des manifestants, la violence policière s’imposait. En un mot, que ces ministres n’ont quand même pas osé prononcer, les forces de l’ordre auraient été en situation de légitime défense. A entendre les deux anciens ministres d’Ennahdha, la question ne serait pas dans l’usage de la violence pour mater un mouvement de contestation sociale ni même dans le recours à des formes de violence létale mais seulement dans l’utilisation de la chevrotine. Maigre concession qui, là encore, ne fait que souligner l’immense responsabilité politique qui est la leur.
Et cette responsabilité politique ne concerne pas exclusivement les événements de Siliana. Elle est bien plus vaste, en réalité. Qu’à Siliana comme ailleurs des forces politiques, dont certaines forces contre-révolutionnaires, aient cherché à exploiter le désarroi des classes populaires et leur révolte pour affaiblir Ennahdha voire pour provoquer la chute de la Troïka n’est pas contestable. C’est même le BE-A-BA de la politique. Mais réduire la dynamique populaire contestatrice à l’expression d’une sorte de complot témoigne soit d’un terrible aveuglement, soit d’une mauvaise foi sans borne.
C’est là que réside la principale responsabilité politique d’Ennahdha et accessoirement des autres partis de la Troïka. Soucieux d’assoir leur pouvoir dans l’Etat, de stabiliser au plus vite et à leur profit la situation politique, ils ont considéré avec hostilité les mouvements sociaux qui prolongeaient la révolution comme ils ont méprisé leurs revendications les plus légitimes. Plutôt que de chercher à brider les résistances de ceux-d’en-haut, ils ont cherché à briser les résistances de ceux-d’en-bas. Le retour au pouvoir des anciens RCD-istes, l’alliance parlementaire et gouvernementale actuelle, le renouvellement de la puissance policière, la « réconciliation », pour le dire vite, découlent de cette politique. Ils ne sont pas de la seule responsabilité d’Ennahdha mais ils sont aussi de sa responsabilité. Cette responsabilité, ni Hamadi Jebali, ni Ali Laarayedh ne peuvent la reconnaître. Ils ne peuvent même pas en être conscients car cette politique leur est en quelque sorte « naturelle ». Elle est inscrite dans l’ADN du parti Ennahdha.
…de la capacité des leaders islamistes, même ceux qui paraissaient les plus “éclairés”, d’envisager des erreurs, leurs fautes ou leurs crimes.
Ce qui achève de convaincre, ceux qui en doutait ou restaient à convaincre, que ces messieurs et dames sont du Parti de l’Absolu et peu à même de voisiner avec qui ne partage pas leurs convictions sûres et vraies…comme le Verbe de Dieu.
Il convient de rendre hommage aux Tunisiens de savoir composer avec ces absolutistes. Et, c’est le moins!
L’auteur semble aImer à se gargariser de mots fantamagoriques comme les “révolutionnaires dela brouettes” de 2011? De quelle révolution parle-t-il?Un soulèvement populaire n’est pas uner évolutionILdevrait rafraichir ses connaissances sur le véritable sens des mots, sinon ilva tomber dans le fantasme.:
Condamnant toutes les répressions policières; mais la révolution si elle a été tuée, c’est par les mauvais choix de tous les tunisiens… nous étions tous capables de faire fuir le dictateur, et nous sommes tous coupables à travers plusieurs mauvais choix… Les partis politiques ont su corrompre le processus révolutionnaire… Mais rien n’est perdu, on pourra toujours se ressaisir, si on veut . Si on veut !