Par Primavera,

Caricature par Med Freeman
Comme à chaque fois que les choses dégénèrent, et après quelques jours de suspense attisant le doute, la peur et l’impatience, BCE premier ministre du gouvernement provisoire a bien voulu daigner rompre le silence et s’adresser enfin à la populace pendue à ses lèvres, attendant des explications, cherchant des réponses, une consolation. Ainsi, muni de son incontournable “honnêteté dans la parole et dévouement dans le travail”, BCE s’est installé tranquillement dans son fauteuil à la Kasbah, jambes croisées, sourire aux lèvres et a aligné devant lui trois petits fils qui voulaient jouer aux journalistes mais qui étaient finalement trop contents, trop reconnaissants d’être là pour faire leur travail comme il se doit. Oui ils étaient trop contents surtout celle de tv7 visiblement très fière en plus de sa coupe de cheveux et de ses chaussures à talon, si fière qu’elle a oublié le pacte qu’elle a signé avec ses compatriotes, celui de poser deux questions chacun. En effet et comme l’a dénoncé Lotfi Laaméri plus tard, on leur a dit que l’entretien ne durerait que 30 minutes et ils se sont mis d’accord que chacun aurait droit à deux questions. Mais la journaliste experte et compétente de tv7, déstabilisée par le sourire en coin de papy BCE s’est laissée emporter par le plaisir du moment et a monopolisé la conversation. Ainsi, ce qui était supposé être un sympathique entretien avec un vampire s’était transformé soudain en un horrible silence des agneaux. Ces agneaux, désabusés par le comportement égoïste de leur agnelle de collègue, n’ont pas su tirer profit de leur présence et poser les questions qu’il faut.

L’entretien devait donc durer une demi heure, seulement voilà, quand papy se déchaine et commence à évoquer le bon vieux temps ou traiter un ancien ministre de tous les noms, ou à contourner les questions qui fâchent pour nous parler des 22000 émigrés clandestins pour la énième fois, de l’économie qu’il faut relancer et surtout des prières de rue, il est difficile de l’arrêter. Ainsi, au lieu d’assister à un entretien pertinent avec le premier ministre, on a eu droit à un énième numéro de Abd El Aziz El Aroui, un numéro lent et long d’une heure où les journalistes avaient tout juste l’air d’enfants s’alignant devant leur maitre et osant à peine lever le petit doigt mais sans jamais oser lui dire “monsieur j’ai pas compris!”. BCE ayant répété dès les premières minutes de l’entretien que lorsqu’il gouverne, personne ne gouverne avec lui, là encore silence agneau ! Pas le moindre souffle, pas la moindre contestation de cette phrase puant l’arrogance et la dictature. Non il vaut mieux évoquer un autre sujet moins épineux que le complexe de supériorité de cet homme coincé dans l’ère Bourguibienne qu’il tente de ressusciter de toutes les forces de ses 86 ans.

Parlons d’autre chose, de Rajhi par exemple. Là BCE se contenant au début, a fini par perdre son sang froid et déverser toute la haine qu’il a envers l’enfant terrible du ministère de l’intérieur, ce crétin de Farhat Rajhi, ah oui il mérite la guillotine, et qu’on se dépêche de le condamner et de l’exécuter à la place publique, ce menteur, à l’esprit moyen, irresponsable, mal élevé, mal intentionné ! Non il faut le condamner tout de suite c’est bien plus urgent que de condamner les ex RCDistes. Ah et soi dit au passage, n’oubliez pas l’indépendance de la juridiction, je n’ai rien à y faire ou préférez-vous que je m’en mêle ? Et qu’on ne me parle plus de Kamel Ltayef, je le connais, c’est suffisant ! Allons parlons d’autre chose, quoi ? Les journalistes tabassés ? Je n’en connais qu’un, qui sont les autres ? Tu as des noms ? Ah non je ne suis pas au courant ! Et là encore silence agneau ! Pas un des trois journalistes n’a eu le courage de faire son métier et de casser la gueule à ce menteur ! De lui dire qu’il devrait avoir honte de mentir ainsi à son âge et quand bien même il ne serait pas au courant de ce qui se passe, c’est encore pire et il devrait démissionner lui aussi ! Tout cela sans parler des enfants et des femmes qu’on a sauvagement battus au vu et au su des caméras du monde entier ! Mais non je vous l’ai dit papy est coincé dans l’ère ténébreuse de Bourguiba, quand lorsque quelqu’un osait blasphémer et insinuer l’existence d’un gouvernement d’ombre comme l’a fait cet imposteur de Rajhi, il écopait de dix ans de prison ! Ah la belle époque !

Mesdames et messieurs, le spectacle a assez duré comme ça, je pense qu’il est grand temps de faire comprendre à papy que sans la révolution des jeunes il n’aurait jamais rêvé de réaliser le fantasme de diriger le pays, car c’est lui qui le dirige aujourd’hui (et non pas ce guignol de Foued Mbazza), et que cette même jeunesse lui demande très gentiment de bien vouloir finir son café et de plier bagage et dégager le passage que l’on puisse bâtir notre pays loin des chiens enragés du RCD et de tous ceux qui ont vendu leur âme au diable et comploté avec eux, voilà !

Donc Papy, tu prends ta pilule (tu en as plus besoin que nous) et tu dégages !

PS : Pour les journalistes, la prochaine fois épargnez-nous le ridicule de votre minable manège à trois, quand vous voulez faire un entretien, rien de tel qu’un tête-à-tête, un face à face à la 60 minutes. Ah désolée je divague, ce n’est que la Tunisie.. prisonnière de son RCancerD !

* Caricature par Med Freeman