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Femen

Les trois activistes européennes de Femen pensaient qu’en montrant leurs seins, elles allaient être considérées, en cas de poursuites, comme militantes, ce qui est le cas partout dans les pays démocrates. Elles penser peut-être avoir accès à une prison de santé tunisienne, avec thalasso et connexion wifi. Hélas, elles avaient tort. En effet, elles n’ont fait que découvrir la face cachée de l’iceberg de la réalité de l’incarcération en Tunisie, toujours d’actualité.

En effet, depuis le départ de Ben Ali en 2011, peu de choses ont réellement changé. La conférence de presse qui a été tenue par les trois Femen, dès leur retour à Paris, a mis en exergue une situation dramatique qui va de leurs arrestation à leur interrogatoire, et jusqu’à leurs incarcération pendant un mois à la prison pour femmes de Manouba, près de Tunis.

Les Femen déballent tout, semant la confusion. Elles se montrent à la fois bavardes, inexpérimentées et choquées. Toutefois, elles se trompent sur plusieurs points, et notamment concernant leur jugement, puisqu’elles affirment avoir été jugées selon la loi coranique, ce qui est absolument faux. En effet, le Code civil tunisien est issu d’une réflexion menée par une élite éclairée du pays, juste après l’indépendance, et prend son origine dans plusieurs sources de législation, dont bien évidemment l’Islam.

Les Femens racontent leurs conditions de détention : une cellule surchargée, un accès aux douches limité à une fois par mois, absence d’intimité, cruauté des gardiennes et du système pénitencier et carcéral. Tout ce qui a été révélé peut certes en choquer plus qu’un, mais le plus choquant est le fait qu’un ancien des droits de l’Homme, Moncef Marzouk, soit le président de cette nouvelle Tunisie. Et dire que c’est une révolution populaire spontanée qui l’a mis au pouvoir !

L’autre choc vient aussi du fait que le chef du gouvernement, Ali Larayedh, est un ancien prisonnier politique, qui a vécu des années de sa vie dans ce système tortionnaire, sale, méprisant et inhumain ; et il n’a rien fait, hélas, pour changer la réalité amère des prisons tunisiennes.

L’autre indignation vient aussi du fait que le destin des trois Femen a été décidé par les ambassades européennes à Tunis. Ces dernières ont exercé un lobbying menaçant sur le gouvernement tunisien pour qu’il les libère, aux dépens même de l’indépendance de la justice tunisienne, restée un simple emblème face à un ministre de la Justice encore en rodage !