Un rassemblement de 100 mille personnes a eu lieu samedi 27 février à l’avenue Mohamed V au centre ville de Tunis, à l’appel du parti Ennahdha. Objectifs affichés : « soutenir les institutions », en l’occurrence le parlement et le gouvernement, et appeler à l’élection des membres de la Cour constitutionnelle. Or cette manifestation a aussi été l’occasion d’évaluer le poids politique du parti qui gouverne depuis 2011. En somme, il s’agissait de répondre à la manifestation du 6 février 2021 contre le pouvoir en place, et à celle du Parti Destourien Libre ayant lieu à Sousse.
Tous les rassemblements à caractère politique, culturel ou sportif sont interdits en vertu de la décision gouvernementale relative à la prolongation du confinement partiel. Si les partis de l’opposition et les mouvements contestataires n’ont pas respecté les mesures sanitaires, comment le parti au pouvoir se permet- il de descendre massivement dans la rue ?
Dans un communiqué daté du 27 février 2021, Ennahdha a appelé le peuple à manifester pour soutenir la démocratie et les résultats du scrutin. A noter qu’en mars 2020, lors de la première vague de l’épidémie Covid-19, le leader d’Ennahdha et le président de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) avait appelé les Tunisiens, dans une allocution au parlement en, à éviter les déplacements et à se confiner chez eux. « Il faut limiter les déplacements […] Rester chez soi est un conseil d’or », a-t-il martelé. Une année plus tard, alors que l’épidémie bat son plein, et en l’absence de campagne de vaccination, Abdelkarim Harouni, président du Conseil de la Choura du parti Ennahdha déclare le 1er mars 2021 sur Mosaique FM : « Ennahdha doit manifester dans la rue, parce que la situation actuelle du pays l’exige ». Un revirement flagrant du parti dominant, qui soulève bien des questions.
Le parlement a adopté en plénière, le 26 mars 2020 des mesures exceptionnelles pour la continuité du travail parlementaire. Ces mesures prévoient entre autres le déroulement des séances plénières et des réunions des commissions à distance, en vue de réduire les risques de contamination par le Covid-19. Cette décision a été approuvée à l’unanimité des élus d’Ennahdha, y compris par Rached Ghannouchi, le président de l’ARP. La même mesure a été prise en janvier 2021 : le parlement tient ses plénières au bâtiment annexe et les réunions des commissions se tiennent en présentiel avec la possibilité d’y assister en ligne via une application. Le parlement insiste, à travers ses différentes structures, notamment le bureau de l’ARP présidée par Rached Ghannouchi, à mettre en place les mesures exceptionnelles permettant aux députés de travailler à distance. Cependant, Ennahdha, le parti majoritaire au parlement et qui soutient le gouvernement, a appelé ses adhérents à rejoindre massivement la manifestation de soutien aux institutions prévue pour le samedi 27 février 2021. Aux oubliettes donc, les consignes du protocole sanitaire, en l’occurrence la distanciation sociale et le port du masque. Pis : les partisans d’Ennahdha ont bénéficié du privilège des déplacements inter-régions et déployé des moyens logistiques en ce sens.
Pour rappel, le chef du gouvernement Hichem Mechichi, soutenu par Ennahdha, a décrété le 3 octobre 2020 un confinement partiel qui prévoit principalement le port obligatoire du masque, l’interdiction des rassemblements à caractère politique, culturel, sportif ou autre et un couvre-feu de 20h à 5h. Le ministère de la santé a appuyé cette décision en prolongeant les mesures préventives jusqu’au 7 mars 2021.
Suite à ces mesures, plusieurs secteurs ont été affectés, dont les restaurants touristiques et les bars et tous les travailleurs de nuit, y compris les serveurs, les cuisiniers, les groupes de musique, etc. Les cafés, les bars et les restaurants ont été appelés à ne pas dépasser 30% de la capacité d’accueil dans les espaces fermés et 50% dans les espaces ouverts. En outre, le protocole sanitaire leur impose de se conformer au couvre- feu qui commence à partir de 20h du lundi au vendredi, et de 19h à 5h pendant le weekend.
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