Culture 509

Salah Farzit, l’autre facette du “zoufri”

Rencontre avec l’un des monuments de la musique populaire tunisienne qui révélera des facettes méconnues de l’artiste. Celle de l’auteur de poésie dans une langue arabe aussi classique que châtiée. Le chanteur, célèbre pour son cultissime mezoued lancinant, est aussi un passionné de littérature et de poésie. Entretien dans le vieux Tunis, avec un artiste dont les refrains incisifs n’ont pas perdu de leur tranchant au fil des années.

Quand le ministère de l’Equipement menace le patrimoine architectural

En deux semaines, la pétition contre le projet de loi « Immeuble Menaçant Ruine » a déjà réuni plus de 1 100 signataires. Lancée par les associations de défense du patrimoine bâti, elle tire un signal d’alarme contre le projet de loi élaboré par le ministère de l’Équipement et prochainement soumis à l’Assemblée des Représentants du Peuple. Une proposition législative considérée comme précipitée, absurde et dangereuse par des experts en patrimoine.

Exposition « Awj » de Nja Mahdaoui : un néo-kitsch pris à la lettre ?

Si la pratique calligraphique de Nja Mahdaoui requinque un lettrisme ambiant, suffit-il qu’elle s’entretienne à feu tiède par une dextérité lyrique pour laver l’œil de quelques habitudes visuelles ? Encensée plus que méditée, cette démarche ne résiste pas pour autant à rameuter le contingent des réflexes décoratifs. Où le vérifier ? À la galerie ElMarsa, à Tunis, où se tient actuellement sa rétrospective « Awj » jusqu’au 7 avril 2018.

Interview avec Habibi Funk à Tunis

Pour le finissage de Geniale Dilletanten, exposition itinérante de l’Institut Goethe (20-28 janvier), la performance de djing d’Habibi Funk fait salle comble au Marengo Club, au centre-ville de Tunis. De son vrai nom, Jannis Stürtz, co-fondateur du label Jakarta Records à Berlin, donne, à travers le projet Habibi Funk une deuxième et parfois une première vie aux œuvres méconnues d’artistes de la scène underground des années 70 et 80 de la Tunisie, d’Algérie, d’Egypte, du Soudan et du Liban. A l’occasion de son séjour tunisois, Nawaat l’a rencontré. Interview.

Interview avec Walid Mattar: «Résister aujourd’hui, c’est consommer le minimum»

« Vent du Nord » est dans les salles de cinéma tunisiennes depuis le 10 janvier, et sortira en France le 28 mars 2018. La délocalisation d’une usine de chaussures du Nord de la France vers la banlieue de Tunis met en scène les chemins de vie d’Hervé, ouvrier licencié, et Foued, qui prendra son poste. Leurs regards se croisent et en appellent à notre humanité. Déjà multi-primé, le film a été accueilli comme un souffle d’espoir, tout en étant une critique habile du capitalisme globalisé. Alors que l’équipe du film termine sa tournée tunisienne ce week-end, Nawaat est allée à la rencontre de son réalisateur, Walid Mattar.

« Benzine » de Sarra Labidi : en contrechamp d’un drame social

Avec le contexte de crise qui sied au drame, les dessous de son plancher social et toute la bonne foi de ses petites gens, « Benzine » pose le contrechamp de l’immigration clandestine, à travers la quête désespérée d’un couple secoué par la disparition de son fils. S’il manie mieux les silences que les mots, grâce entre autres à une justesse photographique sans afféteries, ce premier long-métrage de Sarra Abidi s’avoue un peu trop appliqué. En salles, à partir du mercredi 24 janvier 2017.

Interview avec Lotfi Achour… Comédie noire, western couscous et rapport à l’autorité

« La laine sur le dos », le dernier court-métrage de Lotfi Achour, a été présélectionné pour le César du Meilleur Film de Court Métrage 2018. Il raconte l’histoire d’un vieil homme et de son petit-fils qui, transportant leurs moutons à travers le désert tunisien, se font immobiliser par deux policiers au bord de la route. Ces derniers ne vont pas les laisser repartir aussi facilement… Un western revisité qui ouvre habilement une réflexion plus large sur notre relation au pouvoir et à l’autorité. Lotfi Achour a accepté de partager avec nous son regard sur la création de ce film et les considérations qui l’habitent.

Les 10 meilleurs films tunisiens (2011-2017)

Entre 2011 et 2017, une poignée de films se sont distingués, dans le documentaire comme dans la fiction. S’ils se font néanmoins rares, dix en tout et pour tout se détachent de la mêlée. Audacieux, inventifs ou simplement touchants par ce qu’ils mettent en scène, ils n’épargnent pas plus la sensibilité que les neurones. Les goûts, on n’y insistera jamais assez, se discutent. Ce n’est que du subjectif. Mais ici, on assume tout. En voici notre cuvée.

Les 10 pires films tunisiens (2011-2017)

Entre 2011 et 2017, le nombre de films insipides, aussi médiocres qu’inintéressants, ne se compte plus sur les doigts de deux mains. Simples navets qui ont du mal à convaincre, franchises débiles ou véritables mauvais films ? Les goûts se discutent, bien sûr. Ce n’est que du subjectif. Mais ici, on n’y va pas par quatre chemins. En voici le pire des pires.

« Forgotten » de Ridha Tlili : la révolution, le temps d’après

Le dernier volet de la quadrilogie documentaire de Ridha Tlili nous ramène encore une fois en territoire de marge. Sur fond de désillusion ambiante, deux années après la révolution, « Forgotten » suit quatre amis à la vie ébréchée, oscillant entre le dépit devant tant d’espérances trahies et la possibilité encore de faire bouger les choses. S’il va dans le sens d’une suffisance formelle qui n’est pas étrangère à la démarche du cinéaste, ce dernier chapitre aurait mérité un coup d’aiguille pour marquer enfin une passation de regard qui s’impose. Le film a été projeté en avant-première le 23 décembre 2017, dans le cadre des Rencontres du Film Documentaire de Redeyef.

« Le Bandit » de Taoufik Ben Brik : littérature couillarde ou machine à texticules ?

Si Ben Brik ne cesse de prêcher une littérature qui se veut couillarde, on lui doit quelques paquets de « texticules » méconnues. Le Bandit, qui vient d’être réédité aux Sud éditions, treize ans après sa première publication parisienne, en est un bon exemple. C’est l’histoire d’un Plagieur qui vole des bribes de livres entiers pour les recycler en un livre plein de tics, de trucs et de machins. Mais pour le « fou du paragraphe » qu’il est, on regrette qu’il le fasse en poseur. Faudrait-il lui taper dans le dos ? Un peu, oui, car ce serait dans tous les cas aussi efficace que de l’inviter à boxer.

Exposition « Parterre(s) » d’Aïcha Filali : le torchon dans l’âme

Les neurones en feu et le sourire en coin, Aïcha Filali dote de vieilles loques d’une brève biographie, brodée en point de chaînette. Résultat ? Une sorte de mise à mal des étiquettes institutionnelles de l’art, qui a le cul entre deux chaises : entre la velléité des pièces à conviction qui s’égrènent sur les cimaises et le détour du banal dont un tas de serpillères sous plexi finira bien par avoir la peau. L’exposition « Parterre(s) » se poursuit à la Galerie A. Gorgi (Sidi Bou Saïd), jusqu’au 20 décembre 2017.

« El Jaïda » de Salma Baccar : une grosse panne de point de vue

Occupé à chercher ses raisons dans l’histoire, El Jaïda joue au portrait de groupe. La réalisatrice Salma Baccar fait ici récit de quatre destins croisés, huit mois avant l’indépendance, pour dépoussiérer le regard sur Dar Jouad, une ancienne institution de correction et de rééducation des femmes. Sujet à une grosse panne de point de vue, ce film actuellement en salle s’oublie vite. Il noie son propos dans une savonnade progressiste à deux doigts de l’insipide.

JCC 2017 : « La Belle et la Meute » de Kaouther Ben Hania, mal vu mal dit

Faut-il trop s’emballer devant « La Belle et la Meute » ? L’actualité lui étant favorable, il se dote non sans raison d’un certain potentiel de séduction. Mais on est plutôt déçu de découvrir dans nos assiettes un film qui se pare des attributs « coups de poing », plutôt dans le ventre qu’en pleine figure. Car il y a fort à redouter d’un cinéma en prise avec de gros sujets bien collants, guetté par le risque du sensationnel ou par sa surenchère racoleuse. Projeté en avant-première mercredi 8 novembre au Colisée, il est en lice dans la compétition officielle des longs métrages de fiction, dans le cadre de la 28ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC).

JCC 2017 : « Mustapha Z. » de Nidhal Chatta, portrait au vitriol de l’un des nôtres

Non sans causticité, c’est d’un type à coté de la plaque que « Mustapha Z. » brosse le portrait. En la réchauffant par quelques ingrédients de la comédie loufoque, Nidhal Chatta mijote sa recette fictionnelle avec la loi des séries : quand quelque chose tourne mal, le reste s’ensuit presque automatiquement en une cascade improbable de coups du sort qu’on n’a pas cherchés. Forte du jusqu’au-boutisme de son scénario, la satire sociale met ici par moments de gros sabots. N’empêche, ce quatrième long-métrage de l’auteur réussit sans prétention à nous offrir une pinte de bon sang. Projeté en avant-première le lundi 6 novembre au Colisée, il est en lice dans la compétition officielle des longs métrages de fiction, dans le cadre de la 28ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage.

JCC 2017 : « Vent du Nord » de Walid Mattar, du cinéma social en contrepoint

Avec l’envie assumée de remettre la fiction à l’ordre du jour, Walid Mattar fait souffler son Vent du Nord entre deux rives. L’histoire, propulsée ici par l’indomptable vent d’une économie sauvage, se replie sur les trajectoires de vie de deux ouvriers qui, du nord de la France vers la banlieue de Tunis, prennent valeur de destin. Sans repousser l’horizon d’un cinéma social auquel son propos tend les bras, ce premier long-métrage laisse effleurer une sensibilité qui en fait un film intelligemment construit et délicatement accueillant. Projeté en avant-première hier dimanche au Colisée, il est en lice dans la compétition officielle des longs métrages de fiction, dans le cadre de la 28ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage.

Gilbert Naccache, l’intempestif

À l’heure du bilan, le militant a de l’énergie à revendre. Dans le dernier opus de sa quadrilogie, fraîchement paru sous le titre « Ana…chroniques » (Chama éditions, 2017), Gilbert Naccache remonte ses « souvenirs des dernières années du vingtième siècle et un peu au-delà ». Il prend tout ce qui remonte, depuis sa sortie de prison en août 1979 jusqu’à la révolution du 14 janvier 2011, en se livrant à une manière alerte d’historiciser le présent et d’actualiser l’histoire. Sur soixante-dix ans de distance, ces mémoires font vibrer chez lui deux cordes jumelles, celle de l’observation et celle de l’analyse.