Cinéastes tunisiens 101

« L’Amour des hommes » de Mehdi Ben Attia : regards inversés

Sans rien renier de ses deux précédents films, Mehdi Ben Attia poursuit avec « L’Amour des hommes » sa quête de désirs fragiles et de corps qui se cherchent. C’est une histoire de regards inversés entre une jeune photographe tunisienne et ses jeunes modèles masculins. Sauf qu’en renversant le schéma iconoclaste de ce rapport de force, bonne idée du reste, la caméra cherche à se caler moins aux côtés des personnages qu’à leur place. Le film est en salles depuis sa sortie le 11 avril 2018.

Cannes 2018 : «L’Oiseau Bleu» de R. Omrani & S. Sivakumaran, sans substance

« L’Oiseau Bleu » du Tunisien Rafik Omrani et de la Sri-lankaise Suba Sivakumaran n’est au meilleur des cas que le prétexte d’un décor propice à la fiction sociale, le temps d’une soirée arrosée. Raté, malheureusement, malgré sa bonne volonté. Produit dans le cadre de la Tunisia Factory 2018 et projeté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, il est actuellement en salles en Tunisie.

Cannes 2018: «Best Day Ever» d’A. Daoud & A. Amini, un court qui en dit long

S’il ouvre ses quatre points de vue à la relativité généralisée, « Best Day Ever » de la Tunisienne Anissa Daoud et de l’Afghan Aboozar Amini fait que les quiproquos cognent fort dans une cellule familiale, avec une mise en scène qui vient donner un joli coup de pied dans la fourmilière. On ne peut que s’en réjouir. C’est l’une des propositions les plus maîtrisées de Tunisia Factory 2018. Projeté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, il est actuellement en salles.

Cannes 2018: « Omertà » de Mariam Ferjani & Mehdi Hamnane, mal négocié

Bien que porté par un bel élan, « Omertà » de la Tunisienne Mariam Ferjani et du Franco-algérien Mehdi Hamnane est à l’image de la jeunesse qu’il met en scène : en détresse. Sa mise en scène, collant à ses personnages, n’en est pas moins mal négociée. En pilotage automatique, le film a le souffle court. Produit dans le cadre de la Tunisia Factory 2018 et projeté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, il est actuellement en salles.

Cannes 2018 : « Leila’s Blues » d’Ismaël & Fateme Ahmadi, vibrante épure

Dans « Leila’s Blues », du cinéaste tunisien Ismaël et de la réalisatrice iranienne Fateme Ahmadi, le drame se taille dans un triangle familial, aimanté par l’autisme d’un fils, la quasi-absence d’un mari, et le silence d’une mère qui décide d’avorter. Tenant bon la barre, ce court-métrage à la narration classique est plus enclin à ouvrir des portes qu’à les fermer. Produit dans le cadre de Tunisia Factory 2018 et projeté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, il est actuellement en salles en Tunisie.

«Vent du Nord» : La condition ouvrière en cache-sexe de l’impensé colonial

Le film « Vent du Nord » est venu enrichir le paysage cinématographique tunisien par une approche originale ; un cinéma social traitant de la condition ouvrière en mettant en parallèle la vie et les souffrances vécues par deux ouvriers : l’un, tunisien, ayant remplacé l’autre, français, suite à la délocalisation de l’entreprise. La thèse qui sous-tend le film est simple : Le capitalisme mondialisé, par la soif jamais inassouvie de ses agents crée de la souffrance, aussi bien au nord qu’au sud. Bien que dans deux pays occupant des camps différents de part et d’autre de la domination impérialiste, le film montre une communauté de destin dans la souffrance de chacun.

« Forgotten » de Ridha Tlili : la révolution, le temps d’après

Le dernier volet de la quadrilogie documentaire de Ridha Tlili nous ramène encore une fois en territoire de marge. Sur fond de désillusion ambiante, deux années après la révolution, « Forgotten » suit quatre amis à la vie ébréchée, oscillant entre le dépit devant tant d’espérances trahies et la possibilité encore de faire bouger les choses. S’il va dans le sens d’une suffisance formelle qui n’est pas étrangère à la démarche du cinéaste, ce dernier chapitre aurait mérité un coup d’aiguille pour marquer enfin une passation de regard qui s’impose. Le film a été projeté en avant-première le 23 décembre 2017, dans le cadre des Rencontres du Film Documentaire de Redeyef.

« Beyond the silence » d’Intissar Belaid : un documentaire à double hélice

Avec l’audace de qui ne veut rien devoir à personne, la cinéaste Intissar Belaid revient dans « Beyond the silence » sur son rapport complexe avec son grand-père. C’est en coupant l’écran en deux, qu’elle met en parallèle son univers et le quotidien de son grand-père. Le parti pris de ce court-métrage d’une vingtaine de minutes, est suffisamment distingué pour qu’on le tienne éloigné des formes aseptisées du genre. Ce film a été projeté en avant-première, dans la soirée du jeudi 15 juin 2017, à l’Institut Français de Tunisie.

« Bourguiba de retour » de Hichem Ben Ammar : rembobiner, et après ?

Le retour, un tantinet polémique, de la statue équestre de Bourguiba à l’entrée de Tunis, vingt-neuf ans après avoir été démontée au lendemain du coup d’État, a eu finalement droit à son documentaire, signé Hichem Ben Ammar. On pourrait s’attendre à ce que « Bourguiba de retour » fasse vibrer deux ou trois cordes du présent sur la même note d’un récit national lève-cœur, où tout doit revenir à la niche. Mais s’il n’ouvre pas toutes les pièces du dossier que charrie le retour du « combattant suprême » sur la scène publique, il est permis de se demander si l’on n’a pas affaire à un feuilleté de déjà-vu rembobiné sur grand écran.

« Derrière la vague » de Fathi Saidi : l’immigration clandestine en contre-champ

“Derrière la vague” sonde les conditions qui pousse ces jeunes dans les embarcations de fortune et expose les répercussions dramatiques pour leurs familles. Entre calvaires et mobilisations pour réclamer aux autorités tunisiennes et italiennes des explications quant au sort de leurs enfants, le point de vue de ces familles permet à Fathi Saidi de déplacer le problème de l’immigration clandestine du champ au contre-champ. Le film sera projeté ce dimanche 9 avril 2017 à 17h, au 4ème Art (Tunis), dans le cadre de la 11ème édition de Doc à Tunis.

« Corps étranger » de Raja Amari : du réchauffé à basse température

En langage placé sous haute surveillance, on dira que le cinéma de Raja Amari est un cinéma paillard, par sa manière de mettre le désir à toutes les sauces. Ce qui est louable en soi. Les Secrets (2009) s’est nourri aux mêmes mamelles que son premier court-métrage Avril (1998). En changeant de terrain, Corps étranger navigue aussi un peu dans les mêmes eaux que Satin rouge (2002). Serait-ce le modèle d’un cinéma indisposé à l’évolution ?

« No Man’s Love » de Nidhal Chatta : du cinéma en liberté

Avec « No Man’s Love », c’est du cinéma, du vrai, qui a de nouveau droit à notre estime. Dans ce road-movie, Nidhal Chatta nous embarque dans une vertigineuse recherche de soi. Jetant l’ancre de ses images entre la masse profonde d’une mer menaçante et l’étendue d’un désert de craie, cette fiction est aussi libre que son antihéros. Il nous aura fallu seize ans pour que la possibilité nous soit enfin offerte de découvrir ce petit diamant cinématographique. Distingué en 2000 aux Journées Cinématographiques de Carthage, le film est en salles depuis mercredi 30 novembre 2016.