Mouvements sociaux 72

Bye Bye, si Youssef !   

Tout va mal pour l’actuel Premier ministre et il semble avoir bien des difficultés à cacher son désarroi. Comme tout chef de gouvernement qui sent que sa fin politique est proche, il tire à hue et à dia, menaçant d’avoir recours à la répression policière pour rétablir l’ordre et multipliant les concessions secondaires et les promesses sans conséquences.

Réjouissons-nous, les luttes reprennent !

Ennahdha, certaines cliques de Nida Tounes, l’UGTT, des groupes de gauche, sont accusés, les uns ou les autres, de susciter les mobilisations de ces dernières semaines ou de mettre de l’huile sur le feu. Admettons pourtant que tel ou tel parti se solidarise des protestataires en fonction de calculs qui lui sont propres, admettons même que pour des raisons a priori peu sympathiques, il encourage, au moins ponctuellement, le développement et l’extension de ces luttes, peut-on pour autant affirmer que celles-ci sont manipulées, injustifiées, illégitimes ? Assurément non.

Youssef Chahed : Je ne suis pas le Père Noël !

Notre Premier ministre est très bavard. Il aime parler, c’est sa nature. Dès que ça flambe quelque part, il saute sur son micro et il parle. La maison là-bas est en feu. ça grille de partout. Déjà, le bébé est carbonisé. Notre Premier ministre s’enfonce virilement un casque de pompier sur le crâne, boucle virilement son ceinturon de pompier, chausse virilement ses bottes de pompier et… convoque les journalistes ! « Vous avez sauvé les habitants ? », demande le représentant d’un grand média national. « Non, mais je les ai rassurés », répond fièrement le Premier ministre.

Printemps de la colère : état des lieux de la contestation

Hier, mardi 11 avril, la grève générale à Tataouine a marqué un tournant dans la contestation sociale dans la région et a généré un effet boule de neige dans tout le pays. Alors que les ouvriers et les habitants du Kef continuent leur sit-in et leurs manifestations quotidiennes, Kairouan a nommé « journée de la colère » cette journée du mardi, avec le rassemblement de près de 2000 manifestants devant le siège du gouvernorat. À Oueslatia ( Kairouan ), les habitants s’organisent en plusieurs sit-ins dans les administrations publiques pour les mêmes revendications sociales qui traînent depuis des années. À Jebenaina, les chômeurs en sit-in depuis 58 jours se rassemblent, depuis hier, sur la route principale liant Sfax à Mahdia pour contester « la non mise en application des accords avec le gouverneur et le délégué régional ». À la Kasbah, une dizaine d’étudiants ont été hospitalisés suite aux agressions des forces de l’ordre lors de leur rassemblement devant le premier ministère qui a promis de les recevoir avant de se rétracter.

Reportage à Redeyef : Derrière les coupures d’eau, les horizons bouchés du phosphate

La grève générale prévue à Redeyef le 16 mars par les sections locales de l’UGTT pour protester contre les coupures d’eau a été annulée suite aux négociations avec les pouvoirs publics. Mais la situation est loin d’être résolue. Derrière le problème des coupures d’eau, les défaillances des organismes publics et la soif insatiable de l’industrie du phosphate, qui empoisonne les habitants et leurs perspectives d’avenir.

Congrès national des mouvements sociaux : complexité, espoirs et risques

À l’exception de deux victoires des habitants de Kerkennah contre la société Petrofac et l’expérience, jusqu’à maintenant unique, des oasis de Jemna, les mouvements sociaux, et surtout les sit-ins des chômeurs, sont de plus en plus isolés. Essoufflés par le silence des autorités locales et nationales, la criminalisation de la contestation et les compagnes médiatiques de dénigrement, la majorité des mouvements sont dans l’impasse et frôlent le désespoir. Réunis par le FTDES dans un congrès national les 25 et 26 mars à Nabeul, plus de 200 participants ont débattu des perspectives des luttes sociales.

Plan de Développement et ses rendez-vous manqués

Le règne de l’impunité conjugué à une détérioration du service public s’est traduit par une perte de confiance des citoyens en leurs institutions. Quant à l’accès aux opportunités économiques, il reste bloqué par le barrage du clientélisme et du copinage. Ce faisant, il renforce le sentiment de marginalisation de pans entiers de la société, qui entretiennent désormais l’espoir d’une vie meilleure à l’étranger.

Reportage : les femmes de Meknassi manifestent contre la double exclusion

« Travail ! Liberté et dignité nationale » les voix des femmes retentissent, pour la première fois, dans l’avenue principale de la ville de Meknassi. Samedi, 21 janvier 2017, des dizaines de femmes ont défilé contre la répression policière et pour revendiquer des emplois dans leur région. Depuis le début du mois, la ville sous embargo des forces sécuritaires, enchaîne les rassemblements, les grèves et les manifestations. Mais cette fois, ce sont les femmes qui ont pris la parole.

Mouvements sociaux : procès en cascade

La Cour d’appel de Nabeul a reporté au 15 février 2017, le procès des jeunes de Kélibia, condamnés par contumace à 14 ans et un mois de prison ferme pour « provocation d’incendie dans des locaux non habités » et six autres chefs d’accusation. Hier, les ouvriers des chantiers, les discriminés politiques et la coordination nationale des mouvements sociaux déclarent une semaine de protestation sociale par des rassemblements, des manifestations et une désobéissance civile à Meknassi. Les prémisses d’un janvier chaud que les médias dominants ont déjà commencé à criminaliser.

De Redeyef à Imider : la justice climatique est une lutte de classes

Les travaux de la COP22 ont pris fin vendredi 18 novembre à Marrakech, sur fond de contestation grandissante du greenwashing de la monarchie marocaine. Alors que le gouvernement tunisien et ses alliés d’une société civile partisane s’alignent avec les multinationales et les Etats pollueurs, d’autres Tunisiens élèvent la voix contre la récupération politique de la lutte climatique. Reportage.

Le suicide en chiffres

Mercredi 16 novembre, le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) a présenté son dernier rapport sur les mouvements sociaux. Parmi les points soulevés, lors de la conférence de presse qui a eu lieu au siège de l’Association, a été le taux élevé de suicides ou tentatives de suicides qui a atteint 103 cas, soit le double des chiffres enregistrés pour les mois précédents. Le sociologue Abdessatar Sahbani a expliqué que les deux tiers des suicides ou tentatives de suicide étaient de nature collective se rapportant à la tentative de 30 jeunes de Kasserine. Concernant la répartition régionale des mouvements contestataires, le plus grand nombre se trouve à Kairouan qui arrive en tête de classement, suivie de Kasserine, Gafsa, Jendouba, Sidi Bouzid, mais aussi Tunis et Sfax.

Mouvements sociaux : arrestations et procès à Sidi Bouzid et Kasserine

Jeudi 27 octobre, la société civile conteste à Sidi Bouzid l’arrestation des deux militants, Jamel Sagherouni et Khaled Bakari qui comparaissent devant le Tribunal de première instance, ce 1er novembre. Mardi 25 octobre, à Kasserine, Lawahedh Samaali, a été interpellée par la police dans un parc alors qu’elle lançait une campagne appelant à des élections législatives anticipées.

Jeunes chômeurs : Tentative de suicide collectif à Kasserine et procès à Gafsa

Jeudi 20 octobre, 36 sit-inneurs à Kasserine ont tenté un suicide collectif. Transférés à l’hôpital, sept d’entre eux sont encore sous surveillance médicale dont une jeune femme en état critique. Le même jour, le Tribunal de première instance à Gafsa condamne Walid Aanssi à 18 mois de prison ferme. Au même procès consacré aux jeunes sit-ineurs de Gafsa, Abdelhafidh Mbarek et Nacer Gouadria ont été condamnés à 15 jours de prison ferme et neuf autres jeunes de Metlaoui ont été condamnés à 8 mois de prison avec sursis.

Kerkennah, « l’île aux enchères » : le cinéma amateur contre la propagande

« L’île aux enchères », est un documentaire amateur, qui s’est donné la tache de défendre les habitants de Kerkennah dans leur combat contre les sociétés pétrolières, dont la Pétrofac. Originaire de l’archipel, Majdi Kaaniche, 35 ans, chercheur en arts plastiques, décide de prendre part dans cette « guerre médiatique » en donnant la parole aux « opprimés » et aux « oubliés », face à la stigmatisation des médias dominants.

Immolation de Wissem Nasri : la goutte qui fait déborder Fernana

Depuis dimanche 11 septembre, les habitants de Fernana ( gouvernorat de Jendouba ) sont dans la rue contre le laxisme de l’État. Le même jour, Wissem Nasri qui s’est immolé par le feu, mercredi 7 septembre, est décédé à l’hôpital des grands brûlés de Ben Arous. Les habitants exigent l’ouverture d’une enquête sur des soupçons de corruption dans la municipalité et de trouver des solutions concrètes au chômage et au développement à la commune.

Kerkennah : en première ligne du changement climatique et de la résistance à l’industrie fossile

La Petrofac n’a pas repris ses activités hier, mercredi 15 juin, comme l’avait annoncé mardi dernier, le ministre de l’Energie et des mines. Ahmed Souissi, le représentant de l’Union des chômeurs diplômés à Kerkennah a expliqué que la reprise est tributaire de la satisfaction des revendications des habitants. Les médias dominants ont largement relayé la réunion ministérielle de samedi dernier au siège du gouvernorat de Sfax, la présentant comme une solution aux problèmes de Kerkennah. Mais selon Ahmed Souissi, les habitants ont boycotté cette réunion. Alors que les autorités focalisent sur la création d’une entreprise de services pour embaucher les chômeurs, les habitants de Kerkennah, exigent la création d’un fonds de développement, la lutte contre la corruption, le départ du directeur de Petrofac et plus de redevabilité des entreprises pétrolières. Au-delà des soubresauts de l’actualité, comment le choc entre néolibéralisme et changement climatique pourrait se révéler calamiteux pour l’archipel et ses habitants ? Enquête.

Les médias tunisiens ont-ils renoué avec la propagande ?

En réponse aux mouvements sociaux, nombre de médias tunisiens agitent le spectre de l’effondrement de l’Etat. Toutefois, rares sont les journalistes qui évoquent les causes viscérales de ce bouillonnement général : la rupture consommée entre la classe politique et le reste de la société, l’absence d’une réelle volonté réformiste, le laxisme du gouvernement face aux vrais acteurs du terrorisme, l’opportunisme de la classe dirigeante ainsi que son désengagement et son désintérêt face aux problèmes de la population.