« J’y tiens. Je suis très malade. Mais je vais vous envoyer l’article », ainsi a répondu Noura Borsali au rédacteur en chef de Nawaat quand il lui a recommandé du repos en apprenant qu’elle a eu un malaise. Elle tenait à respecter son engagement à livrer son article hebdomadaire. C’était lundi, 12h45. Pour elle, cet article est « exceptionnel » puisqu’« il mêle réflexion et témoignage personnel », selon ses termes. La livraison était prévue pour mardi. Elle l’a pourtant envoyé, lundi à 19h42, comme un dernier mot qu’il fallait dire. Elle a rendu l’âme quelques heures après, peu avant l’aube du mardi 14 novembre. Noura Borsali fut habitée jusqu’à ses derniers soupirs par son souci de la mémoire, son amour du journalisme et son attachement à la démocratie… au projet d’une Tunisie progressiste. Qu’elle repose en paix. Que sa lutte et sa passion puissent nous servir de lumière aux moments les plus sombres.
L’Union européenne et la Tunisie : un crocodile et son oiseau cure-dents
Vous connaissez le crocodile du Nil ? Eh bien, c’est un crocodile. Il est particulièrement féroce à ce qu’on dit. Mais ce n’est pas là sa qualité principale. Ce crocodile est surtout connu pour sa bienveillance à l’égard d’un petit oiseau dont l’occupation préférée consiste à lui nettoyer les dents et les gencives. On l’appelle, cet oiseau, le pluvian d’Egypte mais on devrait plutôt l’appeler l’oiseau cure-dents. Vous allez tout de suite comprendre pourquoi je vous en parle.
Lutte contre l’émigration clandestine : une guerre contre les pauvres
Lisez la presse, lisez les rapports et les communiqués officiels tunisiens, jetez un coup d’œil sur les documents publiés par l’Union européenne, vous y trouverez des tas de formulations mais nulle part il ne sera avoué que la lutte contre l’émigration clandestine est une guerre, une guerre contre les pauvres.
Kamel Daoud, un mercenaire au service de Caïd Essebsi ?
Comment penser qu’une personne honorable, dotée d’un certain sens de la dignité, puisse écrire que le chef de l’Etat tunisien est « la figure de proue du mouvement réformiste dans le monde arabe » ? On ne le peut pas. Seul un individu parfaitement méprisable le pourrait.
Abrogation de la circulaire de 1973: Paroles présidentielles sans actes gouvernementaux
Dans son discours à l’occasion de la journée nationale de la femme le 13 août dernier, Béji Caïd Essebsi a, entre autres, lancé un appel au chef du gouvernement Youssef Chahed et au ministre de la justice Ghazi Jribi pour abroger la circulaire du 5 novembre 1973 interdisant à une musulmane d’épouser un non-musulman. Trois semaines plus tard, qu’est-ce qui a été concrètement fait ?
Egalité à l’héritage : repenser les termes du débat
La seule question véritable concerne le paradigme dans lequel le problème est posé. En l’occurrence, le paradigme de l’égalité qui n’est jamais interrogé sinon dans sa compatibilité avec l’identité ou la tradition, sur lesquelles les partisans de l’égalité n’ont rien à répondre sinon leur sempiternelle ritournelle sur l’« ijtihad ».
Egalité homme-femme : Le pouvoir exécutif en marge des avancées juridiques
Près de 7 ans après la révolution et 3 ans après l’élection de Béji Caïd Essebsi, élu par « un million de femmes tunisiennes », le président de la République a plaidé, le 13 août dernier, l’abrogation de la circulaire 73 interdisant le mariage d’une musulmane à un non-musulman. Il a également appelé à un débat sur l’égalité successorale. Or, jusqu’à cette date, le bilan des réformes visant l’égalité homme-femme est mince. D’autant plus que les avancées législatives n’auront que peu de sens si la volonté politique du pouvoir exécutif ne s’exprimerait pas à travers des mesures concrètes.
Edito #9 : La question féminine, sérum politique de Caïd Essebsi
Les annonces faites par le président de la République, dimanche 13 août, l’ont remis au centre du jeu politique au moment où il a commencé à devenir un acteur marginal. Dans un contexte où le parti qu’il a fondé s’enfonce dans une crise sans fin, Chahed se forge une personnalité indépendante du patriarche et Ghannouchi cherche à rappeler son poids politique, Béji Caïd Essebsi a tiré sa carte favorite : la question féminine, talon d’Achille de son allié-concurrent Ennahdha.
Le difficile combat contre des mentalités anachroniques
Les différents organes de presse, comme la plupart des observateurs et membres de la société civile sont unanimes pour saluer la nouvelle loi organique (qualifiée d’intégrale) relative aux violences faites aux femmes qui vient d’être adoptée à l’unanimité par l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) le 26 juillet 2017. On ne peut bien évidemment que joindre notre voix à la leur pour se féliciter de cette nouvelle avancée enregistrée par la Tunisie dans le domaine de la défense et de la consolidation des droits de la femme. Mais, ce faisant et pour garder un minimum de lucidité et ne pas tomber dans une euphorie démesurée, disons tout de suite que les problèmes visés par cette loi (aussi importante et précise soit elle) sont loin d’être définitivement réglés. Car si les lois sont nécessaires et indispensables, elles ne sont hélas jamais suffisantes pour éradiquer les délits et infractions auxquels elles s’attaquent.
Retour sur l’entretien accordé par l’Ambassadeur de France à la revue Moyen-Orient
L’ambassadeur de France à Tunis, monsieur Olivier Poivre d’Arvor, a accordé une interview à la revue Moyen-Orient, N°34, Avril-juin 2017, PP 62-65, édité en France par Areion Group. L’entretien a été réalisé par Sébastien Boussois. Certains passages de cette entrevue nous laissent ahuris, pantois ; des propos qui en effet nous interpellent quant à la profonde persistance de l’état d’esprit paternaliste, pour ne pas dire enfantin, puéril et impubère de la diplomatie française ; une conception que nous croyions –naïvement- révolue, caduque.
Reportage à Gabès : Immersion au cœur de la lutte citoyenne contre la pollution
Une marche vers la zone industrielle de Gabès a eu lieu vendredi 30 juin 2017, échéance retenue pour l’arrêt du déversement de phosphogypse dans la mer. Le même jour, la décision du gouvernement est tombée : les usines polluantes du Groupe Chimique Tunisien seront délocalisées d’ici 8 ans et demi. Sur place, qu’en pensent les acteurs des mouvements sociaux ?
Mouvements sociaux : éveil féminin contre la domination masculine
Il y a deux mois, le mouvement contestataire de Menzel Bouzaiene a connu une scission. 32 femmes ont lancé le sit-in #ManichSekta pour revendiquer leur droit au travail, loin de la domination masculine de leurs camarades. Au sit-in de Sbeitla, elles sont les plus nombreuses à se mobiliser depuis un an et demi. Idem pour celui qui a occupé le siège du gouvernorat de Kasserine début 2016. Durant la même période, à Jebeniana, des ouvrières ont occupé, seules, les locaux de la délégation durant des semaines. Malgré ces prémisses d’une sorte d’éveil féministe dans les mouvements sociaux, de nombreux obstacles restent à surmonter.