La très faible participation au premier tour des élections législatives met le pouvoir face à un dilemme : comment mettre en place un régime censé être l’expression des aspirations populaires sans le peuple ?

La très faible participation au premier tour des élections législatives met le pouvoir face à un dilemme : comment mettre en place un régime censé être l’expression des aspirations populaires sans le peuple ?
Le 17 décembre 2022 était censé marquer l’histoire nationale du seul fait que les Tunisiens ont été appelés aux urnes afin d’élire leurs députés, ce que ces urnes ont délivré l’a pimentée d’avantage. Une nouvelle affreuse nous accompagne depuis : plus de 91% des tunisiens inscrits sur les listes électorales se sont abstenus de voter.
Lors des élections du 17 décembre, «nos observateurs ont été harcelés dans certains bureaux de vote», souligne le président d’ATIDE. Tandis qu’un responsable de Mourakiboun note n’avoir «rencontré aucune difficulté dans le recensement des données le jour du scrutin». Toutefois, les positions des organisations non-gouvernementales observatrices des élections convergent dans la critique du processus électoral dans son intégralité.
En ce 17 décembre, au centre de Thala, les habitants préfèrent profiter de la matinée ensoleillée près des ruines antiques. A Kasserine, un homme âgé clame près d’un bureau de vote: « aujourd’hui, le pays est à genoux, et avec ce scrutin il va finir par ramper ». Difficile de dénicher un quelconque indice de ferveur électorale dans ces villes, berceaux de la Révolution. Reportage.
Si les législatives 2022 affichent un si faible taux de participation, c’est parce qu’elles n’ont pas été entachées par l’argent politique et les irrégularités, claironne le président de l’ISIE. Mais qu’en est-il dans les faits ?
Présentées comme un moment politique crucial, les élections législatives du 17 décembre 2022 sont censées constituer le dernier acte de l’état d’exception enclenché le 25 juillet 2021. Cette affirmation mérite pour le moins d’être relativisée.
A peine 15% des candidats aux législatives de 2022 sont des femmes. Dans la sphère politique, la participation féminine se raréfie. Les candidates ont toutefois « le mérite » de se présenter aux élections malgré les obstacles, estime Torkia Ben Khedher, vice-présidente de la Ligue des électrices tunisiennes (LET). Reste que l’identité politique de ces femmes est difficile à cerner.
Le 17 décembre 2022 auront lieu les élections législatives, aboutissement du projet de refonte politique mené par Kais Saied depuis le coup d’État du 25 juillet 2021. Ces élections, censées redonner un nouveau souffle à la démocratie tunisienne selon les partisans du président, restent à ce jour un événement anecdotique sur la scène politique. Retour sur un processus voué à l’échec.
Une photo d’une femme présentée comme étant celle d’une candidate aux législatives du 17 décembre 2022, portant le numéro 44 et estampillée du slogan « nous bâtissons notre avenir avec nos bras » a provoqué la polémique sur les réseaux sociaux. Et pour cause : la femme paraissait imiter une icône de la culture populaire américaine.
« Les Tunisiens Résidant à l’Etranger (TRE) ont été doublement pénalisés : d’une part, le nombre de sièges de leurs représentants a été revu à la baisse, passant de 18 à 10. D’autre part, la condition exigeant la collecte de 400 parrainages est aberrante et injuste », conteste un candidat non retenu pour les prochaines élections législatives. Manifestement, la nouvelle loi électorale a réduit la chance des TRE d’être représentés au parlement.
Le tribunal administratif de Sfax a accepté le 10 novembre 2022, le recours en appel intenté par un candidat aux élections législatives. La décision a suscité une vive polémique sur le processus électoral et la légitimité de ses résultats.
Les chiffres révélés par le président de l’ISIE suscitent pour le moins des interrogations. La parité hommes-femmes passe à la trappe. Et apparemment tous les Tunisiens ne bénéficieront pas nécessairement d’une représentation parlementaire. Tandis que la visibilité médiatique des candidats pose problème, puisqu’il s’agit désormais d’individus et non de listes électorales.
La nouvelle loi électorale édictée unilatéralement par le président de la République, Kais Saied, a soulevé un tollé auprès des défenseuses des droits des femmes. La dynamique féministe, regroupant plusieurs associations, a organisé, le 7 octobre, un sit-in devant l’ISIE en signe de protestation. Elles revendiquent une parité intégrale entre les hommes et les femmes dans le champ public. Et voici que Saied entend faire table rase de leurs acquis politiques.
[EDITO] Kais Saied vient d’ordonner à Najla Bouden d’amender la loi électorale déjà modifiée il y a trois semaines. Le président se fourvoie et entraine tout un peuple derrière lui, sans renoncer à sa cape de sauveur suprême. C’est la deuxième fois qu’il se rétracte après avoir publié un texte dans le JORT. Et c’est la nième fois qu’il est responsable de propagation de fake news. Et si on appliquait à Kais Saied le décret-loi 54 promulgué le 13 septembre dernier ? Le président risque 50 ans de prison ferme.
On impute souvent la crise politique permanente en Tunisie au mode de désignation des députés. Si le scrutin proportionnel aux plus grands restes a donné lieu à des assemblées fragmentées, le passage à l’élection majoritaire uninominale à deux tours n’est pas en soi une garantie de stabilité. En cela, l’analyse du cas français est riche d’enseignements.
Dans son allocution du 13 décembre 2021, le président de la République Kais Saied a fixé le calendrier du référendum et des élections législatives anticipées, qui auront lieu respectivement le 25 juillet et le 17 décembre 2022. Il a exprimé également son intention de réviser les modalités d’organisation des élections et la méthode de sa supervision, «loin des lois taillées sur mesure». Où en est l’ISIE par rapport à ce calendrier ?