Politics 934

Réjouissons-nous, les luttes reprennent !

Ennahdha, certaines cliques de Nida Tounes, l’UGTT, des groupes de gauche, sont accusés, les uns ou les autres, de susciter les mobilisations de ces dernières semaines ou de mettre de l’huile sur le feu. Admettons pourtant que tel ou tel parti se solidarise des protestataires en fonction de calculs qui lui sont propres, admettons même que pour des raisons a priori peu sympathiques, il encourage, au moins ponctuellement, le développement et l’extension de ces luttes, peut-on pour autant affirmer que celles-ci sont manipulées, injustifiées, illégitimes ? Assurément non.

Youssef Chahed : Je ne suis pas le Père Noël !

Notre Premier ministre est très bavard. Il aime parler, c’est sa nature. Dès que ça flambe quelque part, il saute sur son micro et il parle. La maison là-bas est en feu. ça grille de partout. Déjà, le bébé est carbonisé. Notre Premier ministre s’enfonce virilement un casque de pompier sur le crâne, boucle virilement son ceinturon de pompier, chausse virilement ses bottes de pompier et… convoque les journalistes ! « Vous avez sauvé les habitants ? », demande le représentant d’un grand média national. « Non, mais je les ai rassurés », répond fièrement le Premier ministre.

Le « je » colonial de Michel Onfray

Le pire, c’est qu’il y a chez nous des gens qui prennent les insultes d’Onfray pour des compliments ! Le pire du pire, c’est qu’il s’en trouve d’autres pour abonder sans s’en apercevoir dans son sens en lui reprochant de négliger que nous aussi nous aurions eu « nos » Descartes. Et le pire du pire du pire, c’est que la majorité d’entre nous partage la conception coloniale de l’histoire comme réalisation du « progrès » dont la modernité, inventé et répandue généreusement par l’Europe, serait le passage obligé voire carrément, pour certains, le but à atteindre.

Les municipales, grandes manœuvres et petites combines

Les élections de décembre, il n’est pas difficile de le prévoir, n’auront à l’échelon local que les enjeux contradictoires de rationalisation de la gestion municipale et de répartition du pouvoir entre notabilités et clientèles. A l’échelon national, ou l’essentiel aujourd’hui se joue, les clivages relatifs à la hiérarchisation sociale seront fort probablement épongés par d’autres lignes de conflits sans pertinence réelle du point de vue des intérêts des classes populaires.

Exclusif : L’obsession sécuritaire face au « grand défi » des flux migratoires

Après le leak du protocole d’accord tuniso-allemand concernant le rapatriement accéléré des 1500 demandeurs d’asile déboutés en Allemagne, Nawaat publie une version officielle d’un projet d’accord portant sur la coopération sécuritaire, dont un pilier constitue une réponse « au grand défi » des flux migratoires de l’Afrique vers l’Europe. Signé le 26 septembre 2016 par Hédi Majdoub, ministre de l’Intérieur et son homologue allemand, Thomas de Maizière, ce projet a été soumis début mars à la ratification du Bundestag. D’après nos sources, le texte n’aurait pas encore été soumis à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).

Gramsci, boîte à outils ou moule à gaufres ?

On ne sait jamais les visages que prennent les morts à distance. Les rides plus ou moins gommées, Gramsci revient après une certaine éclipse. Il revient timide, mais toujours derrière ses bésicles en fil de fer de Nuremberg. Tout dit qu’un petit vent souffle en faveur de son néo-marxisme. Mais après les latinos et les férus des subalterns studies, en quoi cette pensée trouve-t-elle encore à nous parler ? L’occasion nous est donnée d’en savoir un peu plus grâce à la tentative de Penser la transition avec Gramsci. Tunisie (2011-2014), signée Baccar Gherib.
Ce livre a obtenu le prix de l’essai en sciences humaine de la 33 ème édition de la Foire internationale du livre de Tunis (24 mars-2 avril 2017), ex æquo avec celui de Yadh Ben Achour, Tunisie, une révolution en pays d’Islam. Tunis, Cérès, 2016.

On ne saurait libérer le présent sans libérer le passé

Les héros qui se sont exprimés vendredi sur nos écrans de télévision ne nous ont certes rien appris. Ils ont fait beaucoup plus que cela. De faits relégués à l’histoire des historiens, à moitié oubliés, déformés, tronqués, maltraités, noircis ou volontairement occultés par la parole bourguibiste, ils ont fait une histoire toujours vivante, une histoire présente, une histoire qui marche encore, une l’histoire réelle et vraie, parce qu’elle vit, qu’elle est présente et qu’elle marche encore, malgré ses béquilles.

Nawaat Leaks-Migration : Sebsi et Chahed s’inclinent devant le diktat d’Angela Merkel

Le 3 mars 2017, la chancelière allemande et le chef de l’Etat Béji Caid Essebsi ont scellé le sort des 1500 Tunisiens demandeurs d’asiles déboutés en Allemagne. Selon un « protocole conjoint », la Tunisie s’engage désormais à identifier dans «  les trente jours  »ses ressortissants en situation irrégulière et à leur délivrer en une semaine les documents nécessaires à leur rapatriement par vols spéciaux sur l’Aéroport d’Enfidha. Plus inquiétant, sous couvert de coopération technique, nos consulats en Allemagne risquent de perdre une partie de leur souveraineté et les Tunisiens qui y sont enregistrés, leurs droits constitutionnels à la protection de leur vie privée.
Nawaat a obtenu une traduction française non officielle du texte de cet accord, rédigé en allemand.

Que faut-il faire de l’UGTT ?

Cette grève est-elle opportune ? Qui a raison des deux instances de l’organisation syndicale ? La question la plus importante n’est peut-être pas là. Le problème fondamental est ailleurs, plus précisément dans le fonctionnement hiérarchique et fortement centralisé de l’UGTT qui autorise son BE à prendre des décisions en lieu et place des structures intermédiaires ou de base.

Peut-on être ancien ministre de Ben Ali et innocent ?

Puisque l’on aime le mot corruption, eh bien la bande de Ben Ali était la corruption incarnée, la corruption faite chair, la corruption morale dans son sens le plus pur, c’est-à-dire qu’elle se soit accompagnée ou non d’enrichissements illicites, de fraudes, de trafics, de spéculations, de chantages, de vols, et autres procédés que sanctionne normalement le code pénal.

Youssef Chahed a déjà perdu

Le gouvernement de Youssef Chahed, chargé de résoudre la crise, était lui-même en crise avant même que d’être constitué. Il fallait vouloir y croire pour accorder du crédit aux rodomontades et au propos de matamore sûr de lui que nous a assénés ce jeune technocrate dès sa nomination. La relative paralysie et la décomposition rapide d’un cabinet désigné avec difficultés au terme de longues négociations étaient annoncées, en vérité, depuis sa formation.

L’IVD à Tataouine. En finir avec le négationnisme historique

Les souffrances coloniales endurées par les habitants de Tataouine seront exposées le 24 mars prochain dans une audition publique. Une audition qui mérite une mobilisation exceptionnelle de toutes les forces politiques qui considèrent qu’il est temps d’en finir avec le négationnisme historique de la tradition bourguibienne – et française – et de tous ceux qui sont convaincus que la question des réparations n’est ni anachronique ni réductible à un simple « pardon » qui ressemblerait fort aux excuses timides d’un mari brutal à une épouse dépossédée et copieusement battue.

Enquête sur l’attentat de Sousse : agences de voyages, forces sécuritaires mises à l’index

Le 26 juin 2015 à Sousse, les forces sécuritaires auraient raté une intervention rapide et efficace en raison d’une « simple lâcheté » et d’un « retard délibéré et non-justifiable », selon un rapport confidentiel du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme en Tunisie. Un résumé de ce rapport a été présenté lors d’une audition à la Cour royale de justice de Londres le 8 février 2017. Alors que les médias anglophones assistent de près au déroulement des auditions, le silence en Tunisie devient pesant.

Expulsion des migrants : derrière la diplomatie, la solution militaire

Hier, mardi le 14 février, la chancelière allemande Angela Merkel a insisté pour accélérer l’expulsion des tunisiens demandeurs d’asile déboutés. Youssef Chahed, en visite officielle à Berlin s’est montré ferme en estimant que c’est les autorités allemandes qui ralentissent la procédure d’expulsion. Derrière ce dialogue de sourde, les tensions d’une gestion sécuritaire, et depuis peu, militaire des flux migratoires.

La « question noire » en Tunisie

L’implication de la Tunisie dans la lutte contre l’immigration de citoyens tunisiens ou subsahariens en direction de l’Europe n’est pas un fait nouveau. La politique des autorités actuelles ne se distingue guère de celle qui avait été suivie par l’ancien régime. La collaboration avec les politiques racistes des Etats européens, car c’est bien de cela qu’il s’agit, dément les vigoureuses déclarations antiracistes de nos responsables politiques au lendemain de la brutale agression dont ont été victimes des étudiants congolais.

Qu’en est-il des archives de la police politique ?

L’ensemble des documents relatifs à la « sûreté de l’Etat » demeure cependant toujours inaccessible, entre les mains d’un ministère de l’Intérieur inexpugnable. Gageons qu’en six ans beaucoup auront été déchiquetés, brûlés, réduits en poussière ou au mieux expurgés de maintes informations qui permettraient de reconstituer la vérité de la dictature et de mettre en cause les responsables, maîtres d’œuvre, exécutants zélés ou complices de la répression.