Lors des débats parlementaires sur la loi antiterroriste, aucune mention n’a été faite des abus des forces de sécurité. Pourtant, il est clair que l’impunité de la police continue à exacerber le sentiment d’injustice des populations et à nourrir extrémisme et violence.
Ce travail ne peut prétendre être exhaustif. Il serait impossible de faire un bilan exacte de la mobilisation sociale qu’a connu la Tunisie durant les dernières semaines. Ceci dit, cette liste couvre les événements les plus importants.
Vingt quatre jeunes de Ksibet El Mediouni ont comparu, jeudi dernier, devant le tribunal de Monastir. Ajourné à plusieurs reprises, le procès a été fixé au 26 février 2015. Accusés d’avoir brûlé un poste de police, en février 2013, lors d’une manifestation condamnant l’assassinat de Chokri Belaid, ces jeunes appellent à mettre fin à leur calvaire.
Après avoir rassuré les contestataires avec la création des « chantiers », le gouvernement se rétracte et renie son rôle de protection des classes sociales démunies, en se justifiant de la crise économique. Dans un contexte sécuritaire et politique fragile, le pouvoir pourra-t-il endiguer la colère des affamés ?
L’audience n’aura même pas duré une heure pour les inculpés comparaissant ce mardi 17 juin devant le tribunal de grande instance de Sidi Bouzid. Alors que le procès des quinze habitants de Hichria accusés d’avoir incendié le centre de la garde nationale est reporté au 7 juillet, le procès des douze jeunes de Menzel Bouzaiane est reporté sine die.
Considérés comme un frein à la stabilité économique et sociale, les mouvements sociaux et contestataires subissent une répression policière et judiciaire qui tranche avec les espoirs d’une Tunisie « post-dictatoriale ». Le nombre des syndicalistes, activistes et manifestants ou sitineurs en prison, violentés ou poursuivis par la justice, est de plus en plus croissant.
Des centaines de jeunes passent devant les tribunaux pour délit de résistance et de révolution. En suivant, de près, ce retour de manivelle, les avocats et les activistes ont recensé 130 dossiers d’accusation sur tout le pays. Les poursuites ont été intentées entre 2011 et 2012 et jusqu’à 2013, souvent, pour les mêmes motifs : formation d’un gang, diffamation, trouble à l’ordre public et violence contre la police.
L’atmosphère a commencé à devenir tendue, quand des policiers ont essayé d’interdire aux partisans de Issam l’accès au procès. Des slogans ont été scandés dans le hall du tribunal pour exiger l’ouverture de l’audience à tout le monde. Après quelques minutes, la défense de Issam a réussi à avoir l’approbation du juge pour laisser l’accès libre au procès.
Grave précédent judiciaire : le tribunal de première instance de Gafsa a prononcé le 21/05/2014 des condamnations à 10 ans d’emprisonnement à l’encontre de 14 personnes originaires d’Oum Larayess. Ces condamnations iniques et répressives font suite aux revendications sociales basiques exprimées par les populations de la région
« qu’est-ce qu’un Etat en Tunisie, si ce n’est pas un poste de police, un tribunal, une prison et une choôba*». Les manifestants se sont attaqués alors au talon d’Achille du système : les postes de police. Un acte qui est considéré en temps normal comme un délit, mais dans le contexte du pré 14 Janvier, c’était un acte révolutionnaire.
Quand Azyz est arrivé à Nawaat, nous voulions évoquer avec lui beaucoup de choses, après l’épreuve qu’il venait de traverser avec son ami Sabri Ben Mlouka. L’homme est toujours aussi révolutionnaire dans ses actes comme dans ses pensées. À peine lui avons-nous posé une première question, qu’il s’est mis à sortir ce qu’il avait sur le cœur. Et sur le cœur, il en avait tellement… au point où il ne parvenait plus, parfois, à contenir son émotion.
Sans aucun doute, il s’agit pour nous, à ce jour, du meilleur article écrit suite au non-lieu dans l'”affaire Amami” (cf. l’article, joint ci-bas). Dans un style concis, le magistrat Faouzi Maalaoui contextualise la décision du tribunal correctionnel, pour lui donner le sens qui est le sien par rapport à tant d’aspects, hélas -ô combien hélas- tantôt ignorés par mauvaise foi, tantôt par légèreté, tantôt par ignorance.
L’attente a été très longue, mais finalement, tard la nuit, Azyz Amami et Sabri Ben Mlouka furent libérés suite au jugement du tribunal correctionnel de Tunis, déclarant le non-lieu. Cette longue semaine s’achève ainsi par la victoire de tous les Tunisiens… la victoire du droit sur la violence, la victoire du droit sur la matraque !
La différence entre un État de Police et un État de droit, c’est, entre autres, le Code de procédure pénale. La relaxe de Azyz et de Sabri s’inscrit dans ce long cheminement de notre pays vers cet État de droit. Ça ne sera pas toujours facile. Nombreux sont encore ceux qui se comportent dans ce pays, comme s’il relevait de la ferme du grand-père.
Force est de constater que la réussite de la « transition démocratique » que le gouvernement appelle de ses vœux ne repose pas seulement sur le rétablissement de la croissance, l’organisation d’élections libres et la mise en œuvre d’une constitution. Elle passe aussi par l’abandon des violences policières et la révision de procédures judiciaires aussi injustes qu’absurdes dans le contexte d’une démocratie qu’on veut apaisée. Elle repose sur la capacité des gouvernants à susciter la confiance de leurs administrés.
Azyz Amami et Sabri Ben Mlouka comparaissaient, ce vendredi 23 mai, au tribunal de première instance à Tunis, pour détention et consommation de Cannabis. Arrêtés le 12 mai au soir, lors d’un contrôle de routine à la Goulette, les deux jeunes ont été violemment agressés par la police.